S’il ne fallait garder que 10 films d’animation…

La mode est au classement en ce moment dans la blogosphère cinéma. De nombreux blogueurs, suivant une initiative d’Alexandre de Plan-c, ont en effet publié des top contenant les 10 meilleurs films d’animation selon eux. Étant explicitement convié à le faire par Alexandre, j’ai fini par réfléchir à la question, même si je déteste les classements presque autant que les notes. Voici donc 10 films d’animation, si vraiment il fallait n’en garder que 10…

J’ai commencé par constituer une liste de 10 films d’animation qui me venaient spontanément. Et plutôt que de la modifier ultérieurement, j’ai préféré m’y tenir. Cette liste révèle des surprises, au premier rang desquels l’absence presque totale de films asiatiques, région pourtant reine en matière d’animation. Il y a bien Le voyage de Chihiro, mais il y en a tant d’autres qui me viennent à l’esprit, et tant d’autres encore que je ne connais que de nom. J’ai sans aucun doute des lacunes dans le domaine, n’ayant jamais apprécié l’univers des manga et les autres classements m’aideront à les combler. La nationalité dominante est finalement la France, avec cinq des dix films proposés ici. Comme quoi, le cinéma tricolore peut convaincre…

Sans plus de commentaire, voici mon top 10 des films d’animation.

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10 – Peur(s) du Noir

Peur(s) du Noir est de toute évidence à part. Difficile en effet de parler de film à propos de cet ensemble de courts métrages reliés par la thématique de la peur et le choix graphique du noir et blanc, mais que tout oppose par ailleurs. Tout n’y est pas convaincant, l’ensemble s’avère même assez difficile à suivre, voire soporifique par moment… mais je l’intègre à ce classement en raison de graphismes vraiment intéressants. La technique diffère, du dessin crayonné rapidement au dessin à l’ordinateur, mais elle a toujours un intérêt et une originalité forte. Finalement, Peur(s) du Noir se rapproche plus de l’œuvre d’art telle qu’on peut en voir dans les musées d’art moderne, que du film en tant que tel.

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9 – Numéro 9

Ce film d’animation remarqué à sa sortie grâce à son producteur (un certain Tim Burton) m’avait bluffé sur le plan graphique et j’en garde encore le souvenir d’un univers très beau, très poétique dans le genre post-apocalyptique. Le scénario m’avait paru faiblard, mais avec le recul et l’aide de ce très long commentaire, je ne le trouve pas si mauvais que cela. L’animation est en tout cas magnifique et mérite à elle seule de voir le film.

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8 – Renaissance

Encore un film d’animation pêchant par le scénario, mais brillant par la forme. Renaissance fait le choix radical d’un noir et blanc très tranché, sans aucun niveau de gris. Le résultat à l’écran est magique dans un esprit BD très plaisant. Ici, ça n’est pas le réalisme qui est recherché à tout prix, mais les jeux constants sur les contrastes entre les deux couleurs. Dommage que l’intrigue, une vague histoire de science-fiction qui ne passionne jamais vraiment faute de la moindre originalité, ne suive pas, l’ensemble aurait été excellent.

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7 – Mary and Max

J’ai longuement hésité entre Mary and Max et la série des Wallace et Groomit, proches par la technique à base de pâte à modeler et de photographies. Un travail lent et minutieux qui donne des images vraiment magnifiques, à la poésie désuète. Wallace et Groomit conserve un charme fou grâce à son humour anglais si typique, mais Mary and Max dispose d’un sujet exceptionnel avec cette idée d’un échange épistolaire entre deux inconnus mal dans leur peau. Le film, en noir et blanc et sépia, est sublime et l’histoire magnifique.

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6 – Les Triplettes de Belleville

Surprenant récit autour d’un cycliste hautement improbable poussé par sa grand-mère à faire le tour de France et une galerie de personnages haut en couleur, dont les fameuses triplettes du titre. Les Triplettes de Belleville réussit à construire un univers tendance après-guerre et à dépeindre un récit original quasiment sans la moindre ligne de dialogue. L’animation à l’ancienne sert à merveille un dessin vieillot — c’est un compliment — et souvent proche de la caricature. L’ensemble marque : on se souviendra longtemps des grenouilles pêchées à la grenade par les triplettes…

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5 – Le voyage de Chihiro

Comment faire un classement des meilleurs films d’animation sans penser à Miyazaki, maître incontestable dans le domaine ? Il en fallait un, et j’ai choisi Le voyage de Chihiro, pas tant parce que je le considère au-dessus du lot, mais plus sans doute parce que j’ai découvert l’univers fantastique du Japonais par ce film. Ce récit initiatique plein de fantasmes d’enfants est aussi un très beau conte sur l’enfance et l’âge adulte. L’animation à l’ancienne a encore un mot à dire, c’est ce que les film de Miyazaki semblent aussi dire.

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4 – Lascars

Véritable coup de cœur de 2009 en matière d’animation, Lascars est un film étonnant. Parlant de la banlieue sans misérabilisme, à travers une galerie de personnages hauts en couleur dans tous les sens du terme, ce film enchante tant par les trouvailles graphiques que par l’histoire et surtout l’univers proposé. Très drôle et proposant un message pas bête sur les banlieues, Lascars est une vraie réussite.

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3 – Wall-E

Il fallait sans doute un Pixar dans ce classement. Le studio n’a cessé, depuis sa création, d’innover tant sur le plan technique (l’animation devenait pour la première fois photoréaliste) que sur le plan scénaristique, pariant toujours sur l’originalité. Wall-E est, à mon avis, leur plus grand succès. La technique fit encore un pas en avant avec un univers plus réaliste que jamais, mais ce fut surtout une histoire un peu folle d’amour entre deux robots que tout sépare. Ces robots bien plus humains que leur apparence ne laissait entendre marqueront sans doute longtemps l’imaginaire collectif.

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2 – Valse avec Bashir

Valse avec Bashir est le récit autobiographique du réalisateur israélien Ari Folman. Alors adulte, les cauchemars récurrents d’un ami font remonter de nombreux souvenirs de la guerre du Liban à laquelle il a participé, au début des années 1980. Une image en particulier : il se revoit se baigner nu avec deux autres soldats, dans la nuit. Son film raconte comment il a reconstitué des souvenirs complets à partir de ce fragment, en allant à la rencontre d’anciens camarades soldats. C’est donc une autobiographie en train de se construire que propose Valse avec Bashir à travers une animation fourmillant d’idées fortes et marquantes. Un très grand film et un film terrible sur les dégâts de la guerre.

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1 – Persepolis

Il en fallait un en tête de ce classement et je crois que Persepolis y avait toute sa place. Alliant univers graphique issu de la bande dessinée et récit autobiographique passionnant, ce film est une réussite indéniable. L’histoire de Marjane Satrapi, auteur du livre puis du film, est riche en évènements : née à Téhéran au début des années 1970, elle assiste à la révolution islamique qui contraint finalement ses parents à l’envoyer à Vienne. Le récit narre avec un humour permanent ces péripéties qui dévoilent une vie en même temps qu’un pays et une société. Le style, un noir et blanc contrasté, est splendide et le film regorge d’idées originales.

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Ce classement reflète un état d’esprit actuel, je pense que si je le refaisais dans quelques mois, il serait très différent. De nombreux autres films y avaient toute leur place, mais il fallait se tenir à 10 films. À partir de ce classement, je remarque que les meilleurs films sont deux autobiographies : la mise en image du récit de sa propre vie ne peut-il passer que par l’animation, la seule à même de représenter des souvenirs tels qu’on les voit ? Je trouve, en tout cas, ce constat a posteriori intéressant : l’imaginaire occupe une place importante en animation, forcément, et avec lui vient sans doute l’introspection.

Ces dix films sont quasiment tous sérieux : seul Lascars est une vraie comédie. Preuve encore, s’il en fallait encore une, que l’animation n’est pas forcément un sous-genre destiné à amuser les enfants.