L’ExoConférence, Alexandre Astier à L’amphithéâtre (26 septembre 2015)

« Que dit Einstein ? Rien, il est mort ! ». L’humour d’Alexandre Astier est bien connu depuis l’apparition de Kaamelott sur le petit écran, mais on ne s’en lasse jamais et surtout, il s’applique à tout. Prodige touche à tout, l’humoriste l’avait déjà exploité pour parler de Bach dans Que ma joie demeure !, un excellent spectacle sur le compositeur et sur la musique en général. Et cette fois, il remet le couvert avec un tout autre sujet : l’univers et plus précisément la vie dans l’univers. L’ExoConférence exploite la même formule, mais avec un sujet différent : Alexandre Astier compose à nouveau un spectacle comique et pédagogique, cette fois pour parler de planètes, d’extra-terrestres et autres soucoupes volantes. Une formule éprouvée, qui fonctionne encore très bien ici, même si la conférence est peut-être moins bien maîtrisée que celle sur Bach. On s’amuse beaucoup, on apprend aussi au passage, mais l’ensemble est par moment brouillon et le spectacle précédent était plus convaincant. Reste que L’ExoConférence, comme tout ce que fait Alexandre Astier, mérite le détour !

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Désormais parfaitement huilé, le spectacle commence sur les chapeaux de roues avec… une grosse explosion évidemment. En quelques secondes, L’ExoConférence rappelle les principes de base du big-bang avec une vidéo spectaculaire, interrompue par le maître de cérémonie qui débute le show en expliquant qu’il n’y a probablement jamais eu d’explosion et que, de toute manière, on n’en sait grosso-modo rien. Le ton est donné : cette conférence entend « régler la question de la vie extraterrestre » et dès le départ, Alexandre Astier impose son humour si particulier pour le faire. Toujours dans le second degré et le sarcasme, le comédien prend à rebours la majorité des grands mythes autour de la question, en commençant par la création de l’univers et en allant jusqu’à la folie américaine des OVNI au siècle dernier. Comment l’homme s’est représente par rapport à l’univers ? Peut-on vraiment se déplacer à la vitesse de la lumière ? Qu’est-ce que le temps ? Est-on seul dans l’univers ? Autant de questions qui sont brassées pendant près de deux heures, avec une succession de moments sérieux et plein d’informations scientifiques et vérifiées et de moments de rires, pendant lesquels l’acteur incarne tour à tour Ptolémée, un prêtre à l’époque de Copernic, un soldat américain et même un extra-terrestre. C’est le même dispositif qu’avec Que ma joie demeure !, mais plus varié, puisque l’on ne s’en tient plus à un personnage, ni même à une époque. On passe sans peine d’une époque à l’autre, d’un pays à l’autre et… il faut reconnaître que l’on est parfois perdu. D’autant qu’Alexandre Astier ne suit pas une chronologie, mais insère ces séquences comiques en fonction du sujet en cours : on peut ainsi passer de Ptolémée à un scientifique du XXe siècle dans un bar sud-américain, avant d’enchaîner sur une scène avec Jésus, puis une séquence sur une planète extra-terrestre. Pourquoi pas, mais L’ExoConférence perd en cohérence et là où le spectacle précédent était resserré et fluide, celui-ci est un petit peu plus relâché et peut-être moins convaincant.

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L’autre défaut de L’ExoConférence, c’est que les séquences humoristiques ne sont pas toujours parfaitement intégrées au discours scientifique. Cette fois, l’idée d’allier pédagogie et humour paraît un petit peu plus forcée et certaines scènes tombent un petit peu comme un cheveu sur la soupe, tandis que les multiples allers et retours avec son ordinateur sont vraiment répétitifs. Alexandre Astier est plus à l’aise avec certains personnages que d’autres, c’est bien normal après tout, mais il est vrai que l’on n’avait pas ce sentiment de disparité avec son précédent spectacle. On chipote, mais il ne faudrait pas perdre de vue toutes les réussites de l’ensemble, des réussites qui contrebalancent les défauts que l’on pourrait relever. Le comédien est un pédagogue hors-pair et il le prouve encore en expliquant certains concepts compliqués, comme la relativité temporelle chère à Einstein, avec beaucoup de facilité. On reste à un niveau très grand public et si vous vous intéressez un petit peu à l’espace et aux vies qu’il renferme peut-être, vous n’apprendrez pas forcément beaucoup de choses. Mais pour le néophyte, c’est une bonne entrée en matière et on apprend des choses sans même s’en rendre compte. Et puis Alexandre Astier est un excellent humoriste et on rigole de bon cœur très souvent. La séquence avec Copernic est un délice, mais on retiendra surtout la plaque de Pioneer, qui revient en permanence comme un fil rouge. Cette plaque envoyée sur une sonde dans les années 1970 est censée informer de potentiels extra-terrestres de notre existence. Mais, comme le comédien le montre bien à de multiples reprises, cette plaque n’a aucun sens et elle est l’occasion de plusieurs séquences vraiment drôles.

On peut trouver à redire, mais L’ExoConférence reste un spectacle bien mené, avec des moyens techniques conséquents — une disposition de concert est même mise en place pour quelques minutes seulement de musique — et un humour bien rodé. Alexandre Astier n’est pas seulement un très bon comique, c’est aussi un type intelligent qui parvient à transmettre ses passions. C’était peut-être mieux réussi pour la musique et Johann Sebastian Bach, mais ça ne veut pas dire que sa vision de la vie extra-terrestre est ratée, loin de là. Et même s’il y a des défauts, la fin gonflée et très bien vue permet de finir sur une très belle note. Un spectacle à ne pas rater si vous avez l’occasion de le voir en salles, ou sinon à découvrir en DVD et Blu-ray dans les prochains jours !