In The Loop, Armando Iannucci

In The Loop est une comédie caustique sur la politique internationale. Autour d’une déclaration de guerre « au Moyen-Orient », le réalisateur propose une joute verbale entre Américains et Anglais où la victoire revient à la meilleure insulte. Et le florilège d’insultes est pour le moins fourni…

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In The Loop évoque une situation fictive, mais que l’on conçoit sans peine inspirée de faits réels, où Américains et Grands-Bretons vont peut-être attaquer un pays du Moyen-Orient. Entre les deux Alliés, les tractations vont bon train pour savoir si, oui ou non, la guerre doit être déclarée, quand un ministre en Grande-Bretagne balance une bourde à la radio en déclarant la guerre « imprévisible ». Un véritable deus ex machina commence alors, entraînant tout le monde dans un gros bazar qui mène finalement à une décision… qui importe peu en fait.

Le fond de l’histoire, les tenants et les aboutissements de ces complexes relations diplomatiques, importent vraiment pas, ou en tout cas peu, dans In The Loop. De toute façon, les personnages eux-mêmes semblent rien n’y comprendre, des alliances se font et se défont continuellement au grès des insultes, on assiste à de mémorables passes d’armes dont on ignore jusqu’à l’origine… Qu’on se le dise, In The Loop n’est pas un documentaire sur la politique internationale, même pas un film sur la politique. Certes, la politique est omniprésente, mais ici c’est une vaste farce.

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Par bien des aspects en effet, In The Loop rappelle le théâtre. Le film ne tient quasiment que grâce à ses dialogues, d’une violence rare au cinéma. Les insultes fusent, et on est bien éloigné des gentillets « shit » ou « fuck ». Non, ici l’insulte se fait art quand elle convoque les images les plus délirantes à base de zoophilie ou de tous les organes humains possibles et imaginables. Le vrai héros du film ne se voit pas, mais s’entend partout, même si certains personnages sont de véritables maîtres ès insulte.

On pense ici d’abord au personnage génialement incarné par Peter Capaldi (ci-dessous) qui prend des airs de furie tout en balançant les pires cochonneries que l’on pourrait concevoir sur ses victimes. Son imagination en la matière n’a d’égale que son rythme qui fait qu’il est difficile à suivre, même avec les sous-titres. Quand il ne gesticule pas en vociférant, il court dans Londres ou Wahsington, incapable de s’arrêter plus de 10 secondes. Ce personnage est vraiment fascinant et, disons-le, génial dans le registre de la cruauté et de l’humour noir.

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Le film, essentiellement basé sur des dialogues très riches, peut finir par devenir assez indigeste. Aussi brillants soient-ils, les dialogues sont vraiment difficiles à suivre avec attention de bout en bout. On n’a à peine le temps d’ingérer une salve d’insultes que le scénario en a envoyé deux autres, encore plus fortes, encore plus drôles peut-être, mais qui nous échappent en partie. Par certains côtés, In The Loop m’a rappelé des livres comme ceux de Terry Pratchett où se cachent jeux de mots et traits d’esprit au détour de chaque mot. Mais l’écrit permet de revenir en arrière, permet de relire. Ici, tout nous tombe dessus sans avertissement, et il faut reconnaître que l’on peut étouffer un peu devant la masse. Néanmoins, les dialogues sont ici vraiment jouissifs et si vous aimez les films de dialogue, In The Loop ne doit être raté sous aucun prétexte.

Je n’ai pas le courage de développer encore plus l’analyse sur ce film, mais j’ajouterai quand même qu’il ne s’agit pas simplement d’une farce pleine d’insultes rigolotes. In The Loop offre l’image d’un monde politique de « second rang » — ils sont tous ministres, conseillers… mais il n’y a aucun premier ministre ou président — entièrement occupé par des gamins colériques et capricieux, ou au contraire faibles et totalement sous influences. L’image n’est pas très valorisante, d’autant que le film montre explicitement que ce sont eux qui ont le pouvoir et décide de nos vies. C’est, disons, intéressant… Oh, et les changements à peine subtils dans les preuves pour transformer un document contre la guerre en rapport belliciste.

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Une fois n’est pas coutume, je suis en accord total avec Rob. Critikat est très enthousiaste et cite une des répliques du film prononcées par l’acteur évoqué plus haut. C’est vraiment génial dans le genre, mais je préfère vous laisser la découvrir directement sur leur site (éloignez les enfants de l’écran, etc., etc.).