Adapté d’une série très populaire de mangas publiés au début des années 2000, Death Note a été très critiqué à sa sortie par son manque de respect du matériau original. Le cadre déplacé du Japon aux États-Unis, l’ajout d’une intrigue amoureuse et les changements apportés aux personnages principaux ont transformé en profondeur l’œuvre de Tsugumi Ōba et Takeshi Obata pour tendre vers un blockbuster à l’américaine. Tout ceci est vrai, mais cela n’enlève rien a priori au long-métrage réalisé par Adam Wingard qui peut s’apprécier en tant que tel. Hélas, même en oubliant le travail d’adaptation, le résultat n’est pas vraiment une réussite pour autant. Death Note a quelques bons points à faire valoir, mais son rythme intense cache mal un scénario simpliste et qui oublie très vite son impertinence. Un film qui se regarde aussi facilement qu’il s’oublie.
L’intrigue de Death Note se met en place très rapidement : on découvre le personnage principal, bizarrement nommé Light, sur le campus de son lycée. Alors que tout le monde fait du sport, il reste dans son coin à travailler et on apprend vite qu’il revend en fait des devoirs terminés à qui veut bien la payer. Une sorte de tempête fait rentrer tout le monde juste après et un mystérieux cahier noir tombe aux pieds du jeune adolescent. À l’intérieur, des dizaines d’instructions qui décrivent comment utiliser le cahier pour tuer n’importe qui. S’il écrit le nom et le prénom d’une personne tout en ayant son visage en tête, Light peut provoquer sa mort, éventuellement en précisant les circonstances du décès. D’abord sceptique, il découvre vite que cela fonctionne et entreprend de tuer toutes les mauvaises personnes pour améliorer la situation. Voilà le point de départ, très similaire chez Adam Wingard par rapport au manga, tout comme le reste du film se concentre sur la course-poursuite entre le personnage principal et L, un mystérieux détective extrêmement doué. La particularité de Death Note, sensible dès les premières minutes, est son rythme étonnamment intense. Pendant une heure quarante, le long-métrage avance toujours à toute allure, les péripéties sont étalées très rapidement et on ne s’attarde jamais sur rien. Au départ, cette sensation de vitesse est plaisante et elle permet de ne pas trop s’attarder sur quelques défauts, comme le côté un peu kitsch de Ryuk, sorte de divinité qui exécute les morts exigées par le carnet. Mais à la longue, c’est un petit peu pesant, et cette vitesse extrême ressemble de plus en plus à un cache-misère au fur et à mesure que le film avance.
Dans un premier temps, le film parvient à surprendre par son ton assez sombre et très gore. Quand les premières morts apparaissent, Adam Wingard les filme avec beaucoup de détail et un côté Destination finale qui n’est pas déplaisant. Death Note ne pose alors aucun jugement moral et une voie semble s’esquisser, où le héros n’est pas le chic type habituel qui veut bien faire, mais un lycéen sans aucune morale, prêt à tout pour assouvir une pulsion de mort, ce qui aurait été un angle très intéressant. Malheureusement, les scénaristes reviennent très vite sur la voie habituelle et le personnage essaie très rapidement de faire le bien, puis de se sortir d’une situation difficile en faisant amende honorable. Certes, sa copine reste du côté obscur pour ainsi dire, mais le long-métrage dans son ensemble s’oriente vers une résolution très conventionnelle et un petit peu barbante. Ce n’est pas le seul défaut à son actif, plusieurs personnages sont mal exploités et c’est tout particulièrement le cas de L. Le détective est entouré d’une aura de mystère bienvenue, mais il est beaucoup trop bon et comprend toujours tout, toujours trop vite. Petit à petit, Death Note oublie qu’il est censé être fun et la course-poursuite devient bien trop mécanique, sans compter que les jeux d’acteurs sont rarement au meilleur niveau. À cet égard, on retiendra surtout Willem Dafoe qui offre une épaisseur intéressante et bien nécessaire au personnage Ryuk. Au fond, le problème du film d’Adam Wingard est précisément qu’il s’agit d’un film, et non d’une série. On sent que l’intrigue pourrait être plus riche, que les personnages pourraient avoir une psychologie plus développée… bref, on sent que le scénario est très grossier. Et c’est bien dommage, cela nuit à l’ensemble.
Même en oubliant que Death Note est adapté d’un manga, le film porté par Netflix n’est pas une réussite éclatante pour autant. Il est suffisamment court et rythmé pour ne pas être trop pesant et le long-métrage est divertissant, mais il ne restera pas dans les annales. Il lui manque pour cela un univers et des personnages plus riches et une intrigue moins simpliste. Peut-être que ce format n’était pas le bon pour une telle histoire, mais Adam Wingard aurait probablement pu faire d’autres choix pour tenir sur la durée d’un long-métrage.