Titans imagine un nouveau groupe de super-héros dans l’univers de Batman. Ce dernier n’est jamais vraiment présent, mais la série adaptée du comics Teen Titans se construit autour de Dick Grayson, mieux connu sous le nom de Robin. Cela ressemblerait presque à un spin-off, mais ce nouvel univers ne partage quasiment rien avec l’original, si bien qu’on peut le considérer comme une véritable nouvelle voie. Créée par Akiva Goldsman, Geoff Johns et Greg Berlanti, l’adaptation en série a perdu le côté adolescent dans son titre, mais l’idée reste là, même si les producteurs ont cherché à suivre une voie plus noire et même violente. Par certains aspects, on retrouve ici le traitement appliqué par Netflix aux series Marvel, mais en gardant un pied du côté teen. Le résultat est une première saison de onze épisodes avec de très bons moments et quelques faux pas. Cette ouverture de Titans reste plaisante et elle est suffisamment intriguante pour donner envie de voir la suite.
Les scénaristes rappellent rapidement l’origine de Dick Grayson, fils de parents acrobates de cirque qui est recueilli par Bruce Wayne à leur mort et qui devient son bras droit. Une série de flashbacks permet de redonner ce contexte général, mais Titans ne perd pas trop de temps avec Gotham et Batman, et la série suit plutôt le Dick qui a renié ce passé et qui essaie de changer de vie à Détroit, comme simple détective. Dès le pilote, il est évident qu’il n’y parvient pas tout à fait, il utilise encore son costume et les technologies de Wayne Enterprise et n’hésite pas à faire appel à la force quand la justice est défaillante. L’intrigue de la saison se met en place quand il croise Rachel, une jeune fille paumée qui se retrouve à Détroit après le meurtre de sa mère. Elle souffre d’un étrange mal, une noirceur extrême qui s’empare d’elle et peut faire du mal à ceux qui l’entourent et le détective la sauve in extremis après un kidnapping. Commence alors une sorte de course-poursuites, alors qu’une famille de psychopathe essaie de prendre Rachel et qu’ils rencontrent d’autres super-héros. Il y a Kory, femme aux cheveux roses, qui se réveille totalement amnésique en Europe et qui découvre qu’elle peut lancer des boules de feu. Il y a Gar, un jeune homme aux cheveux verts, qui peut se transformer en tigre vert à la demande. Ensembles, ils forment les Titans, mais ce n’est pas encore tout à fait le sujet de cette première saison. Ces épisodes sont consacrés à la formation du groupe et à la découverte de ces membres, et il faudra attendre la deuxième saison de Titans pour qu’ils agissent vraiment ensemble. Pour le moment, chacun apprend à se connaître et à maîtriser ses pouvoirs, ce qui n’est pas une mince affaire.
Cette histoire des origines est à la fois très conventionnelle dans l’univers des comics, chaque personnage ayant droit à un exposé de sa naissance, et elle est à la fois atypique dans Titans. Déjà, parce qu’elle intervient alors que plusieurs personnages sont déjà des super-héros, et ont déjà une histoire des origines à raconter. C’est le cas de Dick Grayson, bien sûr, devenu Robin comme des flashbacks le rappellent régulièrement. Mais c’est aussi le cas d’autres personnages secondaires, comme Hawk, Dawn ou encore Donna qui était Wonder Girl, la Robin de Wonder Woman. Tout cet historique est présent dans la série, avec des choix scénaristiques parfois audacieux. La saison ne compte que onze épisodes, dont un entier est consacré à l’histoire de Hawk et de son frère, puis sa rencontre avec Dawn. Cela n’a rien à voir avec l’intrigue principale, c’est un aparté qui prendra peut-être du sens plus tard, mais qui semble gratuit ici. Il intervient en outre à un moment clé de la première saison, ce qui est un petit peu gratuit d’ailleurs, mais cet épisode est si bien mené et l’un des meilleurs de Titans qu’on pardonne aisément cet écart. Quoi qu’il en soit, ces retours vers le passé complexifient l’intrigue de la saison, qui n’est absolument pas linéaire et qui se permet au contraire des écarts constants. C’est déroutant et plutôt bien trouvé pour éviter un scénario trop simple, mais c’est aussi l’un des défauts de cette saison qui part un petit peu dans tous les sens. Terminer ainsi, sur un épisode en rupture totale et qui est assez audacieux là encore, est aussi un procédé assez artificiel pour créer un cliff-hanger. Artificiel, c’est un mot qui revient souvent tout au long de la saison, notamment à cause d’effets spéciaux numériques vraiment catastrophiques. C’est un gros point noir, le manque de moyens est évident et que ce soit le tigre de Gar ou bien les flammes de Kory, tout fait faux et cheap.
C’est dommage, mais en même temps, ces défauts sont compensés par une intrigue qui, dans l’ensemble, tient la route et par des personnages intéressants. Cette saison de Titans est trop tirée vers le passé et d’autres intrigues pour que ces personnages soient psychologiquement assez riches, mais il y a indéniablement du potentiel. Et puis il faut saluer l’univers en général et sa noirceur bien représentée. On ne peut plus dire à ce stade que ce soit nouveau dans les comics, mais on peut reconnaître que c’est bien fait, avec une bonne dose de second degré par endroits1. On a hâte de voir ce qu’Akiva Goldsman, Geoff Johns et Greg Berlanti ont en réserve pour la suite, et c’est bien le signe que la série a réussi à convaincre, malgré ses défauts.
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- Mention spéciale pour la famille de tueurs, vraiment très drôle dans le décalage entre un style de vie qui semble tout droit sorti des années 1950 et leur psychopathie absolue. ↩