Quelques mois après Sans un bruit qui explorait l’idée d’un univers post-apocalyptique où le bruit était le danger, Bird Box suit cette même idée de base, en remplaçant le bruit par la vision. Dans cet univers de science-fiction, un phénomène conduit tous ceux qui regardent une forme en mouvement à vouloir se suicider plus que tout. En quelques jours, la population mondiale est réduite à peau de chagrin et le film réalisé par Susanne Bier suit une famille qui survit dans ce monde post-apocalyptique. Ils vivent enfermés dans des maisons et ne sortent que les yeux bandés, pour ne jamais voir ce qui a poussé le reste de l’humanité à se tuer. L’idée est originale et Bird Box l’exploite assez bien, en gardant une bonne dose de mystère plutôt que de dévoiler les causes du problème sans détour. Ce n’est peut-être pas un grand long-métrage, mais c’est un spectacle très plaisant et qui parvient bien à communiquer la difficulté de la situation.
Bird Box suit en parallèle deux trames narratives. Le présent est présenté dès la première scène, c’est le monde après l’apocalypse, alors qu’une mère de famille donne des consignes très strictes à ses deux enfants. Pour survivre, ils vont tenter de rejoindre un camp de réfugiés situé à deux jours de trajet en suivant la rivière. Cela n’a l’air de rien, mais pour une raison que l’on ne saisit pas encore, ils doivent absolument porter des bandeaux et ne jamais, au grand jamais, ouvrir les yeux. Le discours est terrifiant, surtout que l’on ne sait encore rien de ce qui s’est passé, une excellente idée de la part de Susanne Bier. En parallèle, le film revient cinq ans en arrière, pour évoquer ce que l’on devine être le point de départ de la catastrophe. Le scénario est assez conventionnel sur ce point, on découvre deux personnages dans leur quotidien, il y a une menace sur la télévision, encore lointaine et floue. Et puis à l’occasion d’une sortie en ville, la vague de suicides qui semble s’être emparée du reste du monde survient brutalement. C’est le chaos et la panique et Malorie trouve refuge presque par miracle dans une grande maison où une poignée d’autres survivants se sont retrouvés. Comme toujours en pareille circonstance, ils découvrent petit à petit comment survivre. Regarder par le biais d’un écran ne sert à rien, comme un personnage en fait la tragique expérience. Petit à petit, la survie s’organise, mais ce n’est pas vraiment le sujet au cœur du récit, adapté d’un roman par la réalisatrice. Bird box revient constamment à ce présent cinq ans après, alors qu’ils ne sont plus que trois, Malorie et deux enfants. On ne sait pas immédiatement ce qui s’est passé entre les deux, ce que sont devenus tous les autres, et pourquoi il y a deux enfants. Tout cela est dévoilé petit à petit, par touches successives et les deux heures que durent le film passent très vite. La mise en scène est assez simple, mais elle sait être efficace et transmettre la tension suscitée par la situation. En particulier, toute la partie de descente du fleuve est intense et prenante, on ressent bien la terreur de Malorie et des deux enfants. Sandra Bullock est excellente dans ce rôle et elle est la véritable star du film, même si les acteurs secondaires pour tous les personnages qui sont avec elle dans la maison sont également tous convaincants.
Bird Box reste un film assez simple, porté avant tout par un concept. À cet égard, il est très proche de Sans un bruit, tout en offrant davantage de place à l’intrigue et notamment aux origines. Pour autant, Susanne Bier ne dévoile jamais d’explications complètes et son long-métrage se termine de façon plutôt abrupte, sans que l’on ne sache très bien qui était cette créature, ou même s’il s’agissait d’une créature tout court. S’agit-il d’une métaphore des réseaux sociaux ? Cette lecture est possible, tout comme l’hypothèse plus « banale » de créatures malveillantes, le scénario reste très ouvert. Bird Box n’a pas l’ambition de renouveler le genre, mais il n’en est pas moins plaisant et mérite d’être vu.