Le Royaume des chats est une nouvelle adaptation par le studio Ghibli d’un manga d’Aoi Hiiragi, sept ans après Si tu tends l’oreille. Le premier long-métrage a connu un tel succès que l’idée d’un spin-off est né, d’abord pour un un court-métrage destiné à un parc d’attraction, puis à un nouveau film d’animation destiné au cinéma. La créatrice du manga a elle-même écrit l’histoire sur papier avant de laisser le studio d’animation la transcrire en images. Les deux histoires sont liées par le personnage de Baron, un chat anthropomorphisé qui donne l’idée d’un royaume de chats qui se comportent comme des humains. Le Royaume des chats est à cet égard un film d’animation très convenu, mais on peut compter sur le ton original du studio pour se distinguer. Hiroyuki Morita signe une œuvre qui parviendra à surprendre et toucher même les plus grands.
Tout commence quand la lycéenne Haru sauve un chat qui traverse un grand boulevard alors que le feu passe au vert. Sain et sauf sur le trottoir, l’animal ne fuit pas, mais il se dresse sur ses pattes arrières et remercie celle qui lui a sauvé la vie en parlant comme un humain. Passé le choc de cette découverte, Haru pense avoir rêvé et elle poursuit sa vie normalement, mais découvre le soir venu une longue procession de chats qui marchent et parlent devant chez elle. Le roi des chats lui apprend alors qu’elle a sauvé son fils, le prince, et il vient la remercier en personne tout en lui promettant le bonheur. Comme dans tant de films d’animations, les animaux se comportent ici aussi comme des humains, en marchant, en parlant et même en s’habillant. Mais Hiroyuki Morita le fait avec une forme de réalisme, au sein d’un univers fantastique communément réservé aux adultes. Ainsi, il y a des chats humanisés et d’autres « normaux », qui miaulent et marchent uniquement à quatre pattes. Le Royaume des chats n’essaie jamais d’expliquer pourquoi des animaux se comportent différemment, le film demande de son spectateur qu’il accepte ce fait et l’histoire se construit comme si c’était la chose la plus naturelle au monde. C’est une constante dans le cinéma de Ghibli, tout comme l’est son traitement d’une histoire qui pourrait être banale ailleurs. Ainsi, le fait que l’héroïne sauve le prince laisse entrevoir une histoire d’amour, et d’ailleurs Haru est invitée par la suite à se rendre dans le royaume pour l’épouser. Cette piste est toutefois un leurre, le roi est représenté comme un chat fourbe et même violent, qui n’hésite pas à tuer tous ceux qui le gênent et qui ne fait rien sans arrière-pensée. L’héroïne typique de Ghibli ne se laisse pas faire et avec l’aide de Baron et de Matu, un gros chat blanc qui l’accompagne, elle fait tout pour sortir du royaume et échapper à ce destin qu’elle ne souhaitait pas. C’est une bonne manière de détourner les clichés et d’offrir une histoire plus mature qu’on pourrait le croire initialement. C’est aussi la signature du studio et même si Le Royaume des Chats n’est pas le plus adulte du lot, il conserve plusieurs niveaux de lecture et reste intéressant à tous les âges.
Loin de l’histoire niaise que l’on pouvait craindre, Le Royaume des chats déploie un univers fantastique assez complexe, où les chats se comportent entièrement comme des humains, y compris pour reprendre le pire. La réalisation de Hiroyuki Morita est à cet égard dans la plus grande tradition du studio, avec cette même aptitude à surprendre avec des intrigues que l’on pensait bien connues. Ce n’est sans doute pas le meilleur Ghibli qui soit, mais il mérite pour autant votre curiosité.