Revisiter la comédie romantique traditionnelle en utilisant la folie ? C’est le pari de Happiness Therapy, le dernier long-métrage de David O. Russel qui signe la rencontre de Bradley Cooper et Jennifer Lawrence. Un pari globalement réussi : même si le film n’est pas le chef-d’œuvre de l’année, c’est une comédie très agréable et plutôt drôle, de quoi passer un très bon moment.
Un homme et une femme censés ne pas s’aimer au début du film, mais qui se découvrent peu à peu et finissent par se déclarer leur flamme. La trame est connue et ne surprendra aucune amatrice de comédies romantiques. L’originalité, et donc l’intérêt, de Happiness Therapy tient justement au choix de deux personnages pas tout à fait sains d’esprit. Lui, Pat, sort tout juste d’hôpital psychiatrique où il a passé huit mois après avoir frappé quasiment à mort l’amant de sa femme. Il a tout perdu, sa femme, son travail et sa maison et il est obligé de retourner vivre chez ses parents. Elle, Tiffany, a complètement dérapé après la mort de son mari et elle vient de perdre son travail après avoir couché avec tout le monde. Elle vit elle aussi chez ses parents et semble incapable de sortir de sa dépression. Quand ces deux-là se rencontrent, quelque chose passe entre eux : Pat, incapable de retenir la moindre pensée, demande à Tiffany comment son mari est mort. Malaise, mais les deux personnages de David O. Russell sentent une sorte de connexion et ils repartent ensemble. Dans un premier temps, c’est elle qui veut le fréquenter, même si Pat refuse tout contact rapproché, car il espère toujours retrouver Nikki, sa femme. C’est pourquoi il accepte le marché que lui propose la jeune femme : en échange de l’accompagner en danse, elle transmettra une lettre à Nikki. Happiness Therapy ne décevra pas : Tiffany espère bien se rapprocher de Pat par ce biais et advient ce qui devait advenir.
Ce côté prévisible fait évidemment partie de l’exercice et il fera plaisir à tous ceux qui aiment le genre, autant qu’il refroidira tous ceux qui ne l’apprécient guère. Il faut malgré tout reconnaître à David O. Russell sa capacité à surprendre en dépit de la trame générale. La force de Happiness Therapy, c’est que la folie n’est pas uniquement là où elle est désignée comme telle. Pat et Thiffany sont tous les deux atteints de problèmes psychologiques graves, mais les parents de Pat ne sont pas vraiment des modèles de stabilité psychologique non plus. Le pire, c’est peut-être le père de Pat qui a un gros problème avec les paris. Supporter de l’équipe de baseball locale, il a été interdit de stades après plusieurs bagarres avec d’autres supporters et il reste maintenant chez lui, à parier sur les matchs avec un ami. Très superstitieux et maniaque, il tient à ce que tout soit parfaitement en ordre — les télécommandes toujours au même endroit — et il veut surtout avoir son fils à ses côtés pour gagner. Tout compte fait, ce n’est pas le personnage le plus sain dans Happiness Therapy, peut-être même le plus fou et il convient de saluer l’impressionnante prestation de Robert De Niro qui s’en donne à cœur joie dans ce rôle. Le long-métrage est d’ailleurs assez drôle, même s’il tend constamment vers le drame : David O. Russell hésite manifestement entre les deux genres et compose un film hybride, où la romance finit malgré tout par l’emporter. Fort heureusement, on peut compter sur Jennifer Lawrence et Bradley Cooper pour l’efficacité de leur jeu, plus subtil qu’il n’aurait pu y paraître. Dommage malgré tout de ne pas avoir poussé plus loin le côté hystérique : les meilleurs moments dans Happiness Therapy ont bien sûr lieu quand Pat ou Tiffany pètent les plombs, pas quand ils se stabilisent et tombent amoureux.
Porté par une bande originale éclectique et de très bon goût, Happiness Therapy est incontestablement un divertissement de qualité, plaisant et jouissif par moments. David O. Russell réussit même à convaincre totalement quand la folie s’empare vraiment de son film, mais la comédie romantique finit par reprendre le dessus. Le résultat est honorable, mais pas aussi bon qu’escompté, dommage. Reste, encore une fois, un petit film parfait pour une séance en couple ou entre ami(e)s…