Black Rain, Ridley Scott

Dans la filmographie de Ridley Scott, ce n’est certainement pas ce long-métrage que l’on retient. Coincé quelques années après Blade Runner et peu avant Thelma et Louise, deux classiques du cinéaste britannique, il faut bien reconnaître que ce film plus modeste fait pale figure. Pourtant, Black Rain n’est pas mauvais et Michael Douglas est assez convaincant dans ce rôle de flic new-yorkais envoyé au Japon. À défaut d’être très originale, cette idée prouve à nouveau son efficacité, avec de multiples occasions de jouer sur les décalages culturels. Le réalisateur ne tombe pas dans la farce facile à base de clichés et sa photographie très soignée, même si elle rappelle parfois un petit peu trop son travail sur Blade Runner, fait mouche. La bande originale un peu lourde de Hans Zimmer a vieilli, mais Black Rain reste un divertissement honorable.

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Nick est un policier en difficulté à New York, où il officie depuis des années et même s’il est apparemment reconnu pour ses aptitudes, il est aussi soupçonné de piocher de l’argent dans les saisies. La première partie de Black Rain présente ainsi le personnage principal face à la police des polices, mis sur la touche à cause de ces soupçons, tandis qu’il mène difficilement sa vie de famille depuis la séparation avec sa femme. Quand il assiste, avec son partenaire Vincent, au meurtre d’un mafieux japonais par un autre mafieux venu du Japon, on sent qu’il saisit sa chance de retrouver les faveurs de la direction… mais c’est pour mieux tomber sur un os. Le scénario imagine que la diplomatie japonaise obtient son extradition et que Nick et Vincent doivent escorter leur prise jusqu’au pays. Après cette brève introduction américaine, Black Rain pose ainsi ses caméras sur l’archipel où, dès l’arrivée, les deux policiers se font avoir à cause de leur méconnaissance absolue du pays et de la langue. À l’arrivée de l’avion, des mafieux habillés en policiers récupèrent le gangster Yakuza qui parvient ainsi à s’échapper à nouveau. Commence alors une course-poursuite dans le pays, mais aussi une plongée dans l’univers de la mafia japonaise, ainsi qu’une découverte des us et coutumes locales pour les deux policiers. Au fil des péripéties, le duo américain est dissout en faveur d’un duo de flics multi-culturels : Nick s’associe avec Mas, un policier japonais qui n’a jamais quitté son bureau jusque-là, et qui est contraint de faire du travail de terrain.

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Le Japon est un pays souvent très mystérieux pour les Occidentaux, et Black Rain joue sur le décalage provoqué par cette culture pour un vétéran de la police new-yorkaise. On sent bien que Nick n’est pas très à l’aise dans ce pays où le respect et l’honneur priment avant tout, lui qui a la réputation de n’en faire qu’à sa tête et à mener ses enquêtes avec des méthodes pas toujours traditionnelles. Le choc culturel est inévitable et plutôt bien traité par Ridley Scott, qui ne joue pas vraiment sur les clichés, ou en tout cas, qui met en avant les clichés de son personnage principal. Comme on peut s’y attendre, le scénario se construit d’abord sur une opposition frontale des méthodes et modes de vie, puis sur un apprentissage mutuel qui mène à plus de compréhension et de tolérance. Les deux policiers, le Japonais et l’Américain, finissent par travailler et gagner ensemble, c’est assez attendu, mais cela fonctionne assez bien, il faut le reconnaître. Michael Douglas est très bien dans son rôle de flic un peu bourru, tandis que Ken Takakura compose un policier japonais souvent indigné très convaincant. Black Rain a été tourné en majorité au Japon et partiellement dans la langue du pays, une bonne chose pour plonger les spectateurs dans cet univers. En revanche, Hans Zimmer, qui travaille pour la première fois avec Ridley Scott, en fait des caisses et sa musique souvent lourde — et qui tombe malheureusement dans le cliché — nuit à plusieurs scènes. Dommage, d’autant que la photographie est souvent très belle : le cinéaste multiplie les jeux sur les contre-jours et les ombres et il produit des séquences magnifiques.

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Black Rain n’est pas un grand film, certes, mais ce n’est pas un mauvais film pour autant. Ridley Scott mineur, c’est un divertissement que l’on peut recommander sans mal aux fans de Michael Douglas, mais aussi à tous ceux qui ont aimé la puissance formelle de Blade Runner. On pourrait dire que le réalisateur se caricature un petit peu ici, mais son travail reste incontestablement très séduisant.