A Cure for Life, Gore Verbinski

Pour son dixième long-métrage, Gore Verbinski change de genre et d’envergure avec un projet partiellement européen et beaucoup plus modeste que l’énorme The Lone Ranger, Naissance d’un héros qui en mettait plein la vue, mais peinait à passionner à trop hésiter entre plusieurs genres. A Cure for Life1 est beaucoup plus simple, mais c’est un petit peu le problème. Si le style gothique très travaillé et l’ambiance mystérieuse doivent être salués, l’histoire elle-même est absolument sans intérêt, déjà vue mille fois ailleurs et oublié sitôt la séance terminée. Dommage, mais le dernier projet de Gore Verbinski ne fera pas date, à nouveau.

A Cure for Life pose d’emblée son ambiance en présentant un mort. Un homme qui travaille seul dans un immense open-space, il est manifestement très tôt ou très tard. Il se lève pour se rendre à la fontaine à eau et meurt d’une crise cardiaque, que l’on peut facilement attribuer à un surmenage au travail. Gore Verbinski enchaîne ensuite rapidement en présentant le personnage principal, Lockhart, un jeune ambitieux dans la même entreprise financière qui prend justement la place de l’employé tout juste décédé. La société est en crise alors qu’elle doit se fusionner avec une autre firme, et que son créateur est parti en Suisse pour se reposer et suivre une cure thermale. On a besoin de lui pour signer des papiers, et c’est le jeune Lockhart qui est envoyé de toute urgence. Toute cette première partie est assez brève et elle est marquée par un rythme intense, mais ce n’est pas le cœur du film. Très vite, A Cure for Life débarque en Suisse, dans cet étrange château posé sur une colline où se situe l’établissement thermal. Le réalisateur prend soin de ralentir son montage et de poser ses caméras et on entre presque dans une nouvelle dimension, en tout cas à une autre époque. Les téléphones portables ne passent pas, il n’y a aucun ordinateur dans ce centre et tout semble avoir été bloqué au début du siècle précédent. Naturellement, Lockhart est pressé de repartir, mais les choses ne se déroulent pas comme prévu et lui qui devait repartir le soir-même se retrouve finalement bloqué, à suivre la thérapie du mystérieux docteur Volmer.

Vous avez l’impression d’avoir déjà entendu cette histoire quelque part ? Ce n’est pas que vous… A Cure for Life a beau être une histoire originale et non une adaptation, c’est un récit extrêmement conventionnel qui est suivi pendant près de deux heures et demi. On ne va pas le détailler, mais disons simplement que l’on voit venir les intrigues bien longtemps avant leur arrivée à l’écran, que tous les personnages agissent comme on s’y attendait et que les twists censés nous laisser sans voix sont en fait des clichés que l’on espère ne pas voir venir. Ce n’est pas qu’on s’ennuie ferme et même si Gore Verbinski tire un petit peu sur la corde, le long-métrage reste divertissant. Mais il n’est pas vraiment passionnant et quand le générique final s’affiche, on reste avec le sentiment étrange d’avoir déjà oublié de quoi il retourne exactement. Tout n’est pas à jeter pour autant et il y a un point particulièrement réussi. Non pas la bande-originale composée par un Benjamin Wallfisch bien peu inspiré, pas vraiment par le casting correct à défaut d’être inoubliable — Dane DeHaan est pas mauvais dans le rôle principal, Jason Isaacs compose un méchant efficace, mais sans saveur, Mia Goth dans le rôle de Hannah est probablement la meilleure du lot —, mais bien l’image. La photographie très verte, marque de fabrique du réalisateur depuis les Pirates des Caraïbes, est souvent splendide et elle contribue à cette aura de mystère qui entoure le château. Certains plans sont très beaux et la mise en scène est soignée, avec un jeu permanent sur les images qui se réfléchissent, souvent dans l’eau. Gore Verbinski a composé un écrin de toute beauté, quel dommage de l’avoir rempli avec une histoire aussi banale et sans intérêt…

Au bout du compte, A Cure for Life est une déception. La réussite technique ne fait pas tout et elle ne suffit pas : l’image a beau être parfois magnifique, elle ne sert à rien si elle ne sert pas de support à une bonne histoire. L’échec à sa sortie est facile à comprendre dans ces conditions. Le dernier long-métrage de Gore Verbinski n’est pas bon, tout simplement.


  1. Encore un excellent exemple d’un titre « traduit » stupidement en français. Le titre original, A Cure for Wellness n’a pas du tout le même sens, et il aurait très bien pu être traduit dans notre langue, ou laissé inchangé.