Catastrophe écologique sans précédent aux États-Unis, l’explosion de la plateforme pétrolière Deepwater Horizon en avril 2010 au large de la Louisiane a aussi éveillé les consciences sur le danger de ces forages off-shore. Onze morts, 780 millions de livres de pétrole déversés dans l’océan… ce fut une catastrophe sans précédent et Hollywood devait s’y intéresser. Quand on apprend que c’est Peter Berg qui réalise le projet, on s’attend à au moins autant de finesse et de subtilité que pour Battleship. Et pourtant, même si Deepwater a tous les attributs du blockbuster catastrophe sans intérêt, le film parvient à surprendre. En repoussant l’action au maximum déjà et en proposant pendant sa majeure partie une montée en puissance étonnamment technique. En dressant un dossier très sévère contre BP ensuite, même si Peter Berg évite consciencieusement d’expliciter le message écologique, hélas. Le résultat est très impressionnant quand l’explosion survient et moins stupide qu’on ne pourrait le croire.
Puisqu’il est basé sur une histoire vraie et très connue, Deepwater ne fait pas semblant et n’essaie pas de créer un faux suspense inutile. Le spectateur sait très bien que la plateforme pétrolière va exploser, et si ce n’était pas clair, l’affiche vend à nouveau la mèche. Peter Berg ouvre son film sur le procès qui a suivi la catastrophe et sur des déclarations qui disent en substance que les alarmes prévues ne se sont jamais déclenchées, sans raison, ni explication. Le ton est donné et le scénario se met en place avec la présentation du principal personnage. Le début ressemble à n’importe quel autre film catastrophe : on découvre les personnages en route vers le lieu où aura la catastrophe et pour créer un lien émotionnel, on les voit dans leur milieu familial. Mike, électricien sur la plateforme, avec sa fille qui récite son exposé pour la classe et puis Andrea, conductrice de la plateforme, qui essaie de réparer sa vieille voiture américaine. On baigne un petit peu dans le cliché et quand les protagonistes partent en hélicoptère avec le drapeau américain qui vole dans un coin de l’écran, on se dit que l’on est en train de voir un blockbuster sans grand intérêt de plus. Deepwater s’avère pourtant un petit peu plus surprenant que cela, notamment parce qu’il repousse longuement l’explosion. Le long-métrage dure moins de deux heures et il se passe un long moment avant de voir la boue projetée depuis les profondeurs de l’océan, puis le pétrole et enfin les flammes. En attendant, Peter Berg expose les préparatifs et tous les problèmes potentiels en des termes étonnamment techniques. Ce n’est pas un documentaire et on ne comprend pas d’ailleurs tout ce qui se passe, mais on est loin du blockbuster décérébré que l’on pouvait attendre. Et puis le cinéaste est assez dur contre BP, représenté ici par une bande d’incompétents imbus d’eux-mêmes qui font tout pour provoquer la catastrophe. Le message écologique reste toujours implicite et on aurait apprécié au moins une mention de la marée noire qui suivait, mais le film est un bon messager contre les plateforme off-shore et en faveur des énergies renouvelables. L’explosion elle-même est un modèle du genre, avec une mise en scène pleine de tension et il faut reconnaître que Deepwater est extrêmement impressionnant. Ces images sont un beau plaidoyer contre cette activité complexe et aussi très dangereuse et on n’est nullement surpris d’apprendre que les principaux protagonistes n’ont jamais remis un pied sur une telle structure.
Peter Berg a signé un film catastrophe, et un bon si l’on en juge à la scène d’explosion à la fin. Dans le genre, il est difficile de faire mieux et Deepwater mérite d’être vu ne serait-ce que pour cette séquence explosive très bien menée. Néanmoins, ce n’est pas son seul attrait et le fait historique n’est pas qu’un prétexte pour signer un énième blockbuster sans âme. Le cinéaste prend son sujet à bras le corps et il le traite avec beaucoup de sérieux, prenant même position contre le groupe pétrolier qui s’était lancé dans ce forage qui était alors le plus profond de l’histoire. Il s’est concentré sur les hommes et en particulier sur Mike incarné par Mark Wahlberg et Deepwater aurait mérité de creuser la question écologique, mais c’est une plutôt bonne surprise dans l’ensemble.