Doctor Foster, Mike Barlett (BBC)

Doctor Foster ne cherche pas à raconter une histoire originale, mais à le faire extrêmement bien. La série créée par Mike Barlett se contente, au moins dans sa première saison, de montrer l’explosion d’une famille tout à fait normale lorsque le docteur Foster découvre que son mari la trompe. Les cinq épisodes oscillent entre l’enquête improvisée par Gemma pour vérifier si Simon fréquente bien une autre femme et désir de revanche qui se concrétise dans un final de haute volée. Le résultat est très plaisant, à défaut d’être novateur et Doctor Foster s’avale d’une traite.

Gemma Foster découvre un long cheveu blond sur l’écharpe de son mari et l’idée est alors ancrée dans sa tête : Simon l’a trompée, voire la trompe. Elle n’a aucune autre preuve naturellement, mais elle ne peut pas s’empêcher d’y penser, alors même que sa collègue et sa voisine semblent dire qu’il n’y a rien à chercher et qu’ils forment un couple parfait. Doctor Foster commence ainsi avec une sorte d’enquête, où le docteur de cette petite ville britannique se prête à la filature, fouille le téléphone de son mari et bien vite, fait appel à ses connaissances et même ses patients pour l’aider. Pendant quelques épisodes, Mike Barlett laisse la conclusion ouverte et à un moment donné, son personnage principal semble même se laisser convaincre que tout va bien et elle donne une nouvelle chance à son mari… mais toute la série tend vers cette vengeance finale que l’on sent dès le départ. C’est l’un des points forts de la première saison en effet, elle parvient à créer une ambiance particulière où l’on sent en permanence que quelque chose ne va pas et que tout va exploser. Même si on ne sait pas encore qui a fait quoi, Doctor Foster exploite pleinement le fait que l’intrigue se déroule dans une petite ville où tout le monde connaît tout le monde, et où Gemma est à la fois une personnalité importante en tant que docteur et une étrangère. On sent venir les coups bas et les trahisons, on sent aussi que personne n’est tout à fait honnête : c’est sans conteste une vraie réussite. La série peut également compter sur ses acteurs en tête sur la principale, Suranne Jones, qui trouve le ton juste pour incarner Gemma. Elle a un grain de folie qui colle parfaitement au personnage et le succès de la première saison lui doit beaucoup.

La BBC a choisi de renouveler la série pour une deuxième saison. On est curieux de voir ce que cela donne, et en même temps, un petit peu inquiet : l’intrigue semblait complète après cinq épisodes. Que peut bien donner la suite de Doctor Foster ? C’est à Mike Barlett de répondre, mais quoi qu’il en soit, la mini-série constituée par cette première saison mérite le détour pour sa description acérée et juste d’un couple qui se déchire. Parfois, l’originalité n’est pas nécessaire et une exécution parfaite suffit largement, Doctor Foster l’a bien prouvé.


Doctor Foster, saison 2

(3 février 2018)

La première saison de Doctor Foster se concentrait sur l’enquête d’une femme trompée par son mari. Après cela, la série devait nécessairement partir vers d’autres horizons et l’ultime épisode de la saison donnait en fait le ton : après l’enquête, le temps de la vengeance est venu. Mike Barlett poursuit son travail avec une suite qui ne cherche pas davantage l’originalité, mais qui est toujours d’une précision remarquable. La saison 2 se déroule deux ans après la précédente et elle reprend alors que Gemma commençait à trouver une nouvelle vie sans Simon. Ses efforts sont ruinés quand son ex-mari revient dans la petite ville fictive où se déroule Doctor Foster et entreprend de détruire son ancienne femme tout en récupérant leur fils. Cette suite ne dure que cinq épisodes, mais ils sont tous si intenses qu’on pourrait croire qu’elle en fait le double. Toujours aussi précise sur la construction des personnages, c’est une franche réussite et on espère qu’elle bénéficiera d’une suite, même si rien n’est prévu à ce stade.

Quand Simon revient en ville après deux ans passés à Londres, il a la ferme intention d’écraser son ex-femme de tout le poids de sa réussite. Il s’installe avec sa nouvelle femme plus jeune et leur petite fille dans une immense maison luxueuse et il envoie à tous ses anciens amis une invitation pour célébrer son mariage et ses succès. Sans attendre, Doctor Foster impose ce thème de la vengeance quand l’ex-mari annonce à Gemma qu’elle partira très rapidement, seule, pour refaire sa vie ailleurs. Le ton monte très vite et Tom, coincé entre les deux parents, en fait vite les frais. Naturellement, cette attention constante de Simon pour celle qui a partagé sa vie durant quinze ans cache une attirance toujours marquée et comme on le disait déjà pour la première saison, le scénario de cette série ne cherche jamais l’originalité à tout prix. On devine assez vite ce qui va se dérouler dans cette saison, même si l’ultime épisode construit à nouveau en bouquet final réserve quelques surprises. Mais cet aspect attendu n’est pas gênant, bien au contraire, c’est même la force de la série créée pour la chaîne BBC. La preuve en est que ces surprises, dans le dernier épisode, ne sont manifestement pas aussi bien maîtrisées et sonnent un petit peu fausses.

Pas de quoi gâcher le plaisir de l’ensemble toutefois, et Doctor Foster confirme son statut d’excellente série. Les acteurs sont tous impeccables, avec à nouveau une mention spéciale pour Suranne Jones dans le rôle principal, même si Bertie Carvel dans celui de Simon est excellent également, et Tom Taylor dans le rôle du fils est bien plus intéressant dans cette saison. Les cinq nouveaux épisodes proposés par Mike Barlett sont extrêmement puissants, parfois à la limite du déplaisant, ce qui est un signe de réussite. Doctor Foster ne paie pas de mine à la lecture de son synopsis, mais on aurait tort de s’y arrêter : c’est une vraie réussite.