Les adaptations de comics se suivent et ne se ressemblent pas toujours. Et pour cause, Hollywood a à sa disposition une source quasiment infinie d’histoires différentes et même d’arcs différents à l’intérieur de chaque histoire. Ainsi, Marvel peut compter sur une troisième saga, en plus de la saga X-Men entamée en 2000 et de celle des Avengers qui l’occupe en parallèle depuis 2008. Avec Les Gardiens de la Galaxie, la maison de production s’attaque à un nouveau comics créé pour la première fois dans les années 19601. Au programme, une bande de superhéros assez étonnants, parce qu’ils sont tous au fond assez minables pris séparément. Comme Avengers avant lui, ce nouveau film fait le pari de l’humour, mais va beaucoup plus loin sur cette voie. De fait, James Gunn signe un blockbuster explosif et très impressionnant — à voir en 3D, une fois n’est pas coutume —, mais Les Gardiens de la Galaxie est d’abord un film fun, parfait pour se détendre en s’amusant !
Après un bref flashback, Les Gardiens de la Galaxie ouvre avec une séquence digne d’un Indiana Jones : Peter Quill, qui aime se faire appeler Star Lord, se rend sur une planète inhabitée pour récupérer un mystérieux objet. Il n’y a pas de pièges, mais une bande de sales types essaie de l’arrêter quand il est parvenu à mettre la main sur une orbe qui semble avoir une valeur immense, sans que l’on sache à ce stade pourquoi. On pense à la saga réalisée par Steven Spielberg pour la chasse au trésor, mais James Gunn marque d’entrée de jeu ses distances avec cette référence. Au lieu de faire preuve de prudence, le héros préfère plutôt mettre un casque sur la tête et shooter dans d’étranges créatures tout en dansant et en utilisant une sorte de rat en guise de micro. La musique, sortie tout droit des années 1970, crée une rupture inattendue avec le style habituel de ce genre de scènes. Alors qu’on est clairement dans un univers de science-fiction, certes pas dans le futur, la bande originale du film est entièrement tournée vers le passé, comme pour marquer sa différence avec les autres productions dans le même registre. Par ailleurs, la technologie mise en scène n’est pas forcément révolutionnaire, bien au contraire. Les spectateurs qui ont eu la chance de connaître la fabuleuse époque des K7 audio reconnaîtront avec bonheur un walkman de ces années, où l’on pouvait si facilement compiler quelques morceaux ensemble. D’ailleurs, Les Gardiens de la Galaxie place une cassette — une compilation de titres rassemblée par la mère du héros avant de mourir — au cœur de son intrigue et de sa musique. Un pari réussi, puisque le long-métrage se forge ainsi une identité spécifique et ce fil conducteur est aussi une excellente bande originale, dans l’esprit de ce qu’un Quentin Tarantino peut réunir pour un film.
La musique crée une première rupture, mais ce n’est pas la seule. Les Gardiens de la Galaxie n’est pas un film sérieux, en tout cas pas un film qui se prend au sérieux. Dès les premières séquences, il est évident que ce « Star Lord » est un seigneur des étoiles pour personne. Quand il se présente, face à ses agresseurs, comme un dangereux hors-la-loi, il n’obtient que des rires et personne ne le connaît. Cette manière de faire bien peu de cas d’un personnage censé être un superhéros n’est pas nouvelle — c’est exactement la stratégie mise en œuvre dans Avengers —, mais elle est toujours aussi réussie. Tous les personnages filmés par James Gunn sont ridicules, et les acteurs choisis mettent bien en valeur cette caractéristique. Chris Pratt n’est pas seulement un beau gosse, il est aussi excellent dans ce rôle de hors-la-loi coureur de jupons qui a du succès avec les femmes et qui se tire bien de situations difficiles, certes, mais qui est aussi très ridicule. Ce personnage nécessite une bonne dose de second degré et l’acteur parvient à l’afficher : il ne se prend pas trop au sérieux, comme tous ceux qui l’entourent. Zoé Saldana est très bien à ses côtés, mais on retiendra surtout Rocket Raccoon, un raton-laveur devenu un être intelligent et qui parle suite à d’étranges manipulations génétiques et Groot, une créature à mi-chemin entre l’arbre et l’humain. Ces deux personnages sont complètement ridicules autant qu’ils sont inventifs, et ils sont pour beaucoup dans la réussite du projet. Les Gardiens de la Galaxie ne serait rien sans un méchant digne de ce nom, et Ronan l’Accusateur est un méchant réussi. Lui aussi a un côté ridicule, mais Lee Pace lui offre beaucoup d’aplomb.
Les Gardiens de la Galaxie ne se prend pas au sérieux, et c’est incontestablement ce qui fait sa réussite. Mais en même temps, James Gunn fait son travail avec énormément de sérieux, faute de quoi le projet aurait était mis en échec. Ce blockbuster n’oublie pas qu’il doit divertir et sur ce front, il est extrêmement généreux. Comme tout bon divertissement estival qui se respecte, le long-métrage en met plein la vue et pendant deux heures, on est emporté dans un univers d’une richesse finalement assez rare au cinéma. La saga Avengers, ou celle des X-Men avaient été préparées sur plusieurs épisodes, laissant aux spectateurs le soin de prendre leurs marques. Rien de tel ici : on est immédiatement plongé dans un univers que l’on ne connaît pas et ce premier bain est délicieusement déroutant. Il faut dire que les graphistes s’en sont donnés à cœur joie pour imaginer des planètes originales, des vaisseaux étranges — mention spéciale pour celui du méchant qui se remodèle — et surtout des populations atypiques. Les humanoïdes sont les plus représentés, mais il y en a de toutes les couleurs, des bleus aux verts, en passant par des rouges et des jaunes. Au-delà des décors et des créatures qui les peuplent, Les Gardiens de la Galaxie impressionne par ses scènes d’action qui atteignent une virtuosité rare. La séquence finale rappelle fortement Star Wars, mais dans une variante gonflée aux stéroïdes. Même si Star Wars, Épisode III : La Revanche des Sith était déjà plutôt efficace dans le genre, ses scènes de combats dans l’espace sont ridiculisés par cette attaque finale où l’on s’en prend plein la vue. Au sens propre si on voit la version 3D qui, cette fois, est vraiment bien exploitée et plutôt amusante — du moins si on aime se recevoir des objets en plein visage.
Spectaculaire, explosif, très drôle… Les Gardiens de la Galaxie est extrêmement fun, tout simplement. James Gunn réussit son pari avec cette adaptation rythmée et particulièrement plaisante à suivre. On est plongé dans un univers de science-fiction original et déroutant, et on adore être perdu dans ce monde bizarre où parler à un raton-laveur paraît tout à fait normal. La formation du groupe de gardiens est totalement improbable et ce qui la rend si réussie. Si bien que quand ce premier volet se termine, on n’a qu’une hâte : découvrir la suite !
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- Les puristes noteront toutefois que ce n’est pas la version originale qui est adaptée ici, mais celle sortie en 2008. ↩