Great News, Tracey Wigfield (NBC)

Great News s’apparente par bien des aspects à l’exacte opposée de The Newsroom, célèbre série d’Aaron Sorkin. Le contexte est le même, une série qui se déroule au cœur de la salle de presse d’un journal télévisé, mais là où HBO traitait le sujet au premier degré et avec sérieux, NBC en fait une sitcom délirante. Tracey Wigfield n’a peut-être pas l’idée la plus originale du monde, mais elle a imaginé une galerie de personnages drôles et attachants. Le résultat est très plaisant et plus sérieux qu’on ne pourrait le croire, avec une critique acerbe et à peine masquée des dérives actuelles des médias, mais le public n’a pas suivi. La chaîne a annulé la série après deux saisons seulement, et c’est dommage, on aurait aimé en voir plus…

Katie est productrice pour l’émission The Breakdown, un journal télévisé sur une chaîne du câble américain. Elle a déjà du mal à trouver sa place et faire les sujets dont elle rêve, puisque Greg, son chef, se contente souvent de lui donner des sujets très secondaires, sans aucun intérêt. Mais c’est encore pire quand Carol, sa mère, se met en tête de découvrir le monde du travail pour la première fois de sa vie et postule pour devenir stagiaire dans l’émission. C’est autour de ces deux personnages que l’intrigue principale de Great News se construit. Comme toutes les sitcoms, celle-ci déploie des épisodes d’une vingtaine de minutes qui se déroulent pour l’essentiel dans la rédaction de l’émission. Il n’y a pas de rires enregistrés, mais on retrouve pour le reste tous les codes du genre, avec un humour constant et un rythme élevé. Les personnages sont tous médiocres au mieux et l’émission au cœur des enjeux est tout aussi mauvaise. Rien ne va dans cette équipe, le présentateur principal est un vieux journaliste aussi vantard que trouillard et il est accompagné d’une jeune présentatrice snob et qui ne supporte pas son collègue. Les journalistes sont tous des incapables et ils enchaînent les bourdes à l’écran. Toute cette incompétence est un moteur de l’intrigue et un élément central de l’humour de Great News, mais c’est aussi une manière, pour Tracey Wigfield, de critiquer les médias contemporains. Ses piques contre les vraies chaînes de télévision sont à peine voilées et la série peut même parfois devenir quasiment politique quand les décisions prises par les journalistes dépendent de procès faits par un milliardaire. Rien n’est vraiment sérieux toutefois et la bonne humeur domine, même si l’humour est souvent plus noir qu’il n’y paraît. Les problèmes amoureux de Katie et surtout sa mère envahissante sont des moteurs permanents et les deux actrices s’en donnent à cœur joie avec leurs personnages assez ridicules, mais qui restent attachants. C’est d’ailleurs un point fort de la série portée par NBC, elle imagine des personnages et des situations qui ne sont pas seulement drôles, mais qui peuvent être touchants également. C’est le cas, par exemple, de Chuck, le présentateur dépassé qui est à la fois odieux et charmant par moment. La véritable star de la série toutefois, c’est bien la mère, Carol. Andrea Martin est excellente dans ce rôle, elle est délicieusement odieuse et l’actrice est parfaitement à l’aise dans son rôle de mère bien trop protectrice. La sitcom a été interrompue trop tôt pour offrir à ces personnages toute l’ampleur qu’ils pouvaient espérer, mais le potentiel était là et le plaisir de la série venait indéniablement de ce bon équilibre.

Même si elles restent sans suite, les deux premières saisons de Great News méritent le détour si vous cherchez une sitcom sympathique. Tracey Wigfield n’a pas signé une série qui restera dans les annales, certes, mais elle était réussie dans ce genre très calibré et elle avait le mérite de ne jamais se prendre trop au sérieux. L’humour est bien au rendez-vous, les personnages bien écrits s’éloignent petit à petit des caricatures simplistes des débuts, et la série ose même s’aventure sur d’autres terrains, entre critique des médias et émotion. Dommage en somme que Great News n’ait pas trouvé suffisamment son public pour convaincre NBC de lui laisser plus de temps.