À l’origine, Le guide du voyageur galactique ou H2G2 pour les intimes, était une émission radiophonique. À la fin des années 1970, l’écrivain britannique Douglas Adams imagine un univers de science-fiction très proche des plus grands space opéras, mais dans une variante complètement délirante. Le succès a été tel que le feuilleton est devenu un roman, puis une série télévisée et cet univers est entré dans la famille des univers cultes, au même titre que ceux de Star Wars ou de Star Trek, mais sur un plan largement plus déjanté, naturellement. En faire un film était logique et c’est Garth Jennings qui s’y est attelé en 2005. À l’heure des bilans, H2G2 : le guide du voyageur galactique n’est pas un mauvais film et il parvient même assez bien à capter quelques caractéristiques de l’humour si absurde de l’œuvre originale, mais ce n’est pas une vraie réussite pour autant.
Avoir écouté le feuilleton radiophonique, ou avoir lu les excellents romans, ou bien encore avoir vu la série télévisée… bref, connaître l’univers de la saga n’est pas indispensable pour regarder H2G2 : le guide du voyageur galactique, mais c’est quand même recommandé. Le scénario exploité par Garth Jennings tente bien d’expliquer les nombreuses idées loufoques sorties de l’esprit tordu de Douglas Adams et ce dernier a même participé à son écriture. Malgré tout, si on n’a jamais entendu parler du rôle des dauphins ou de la réponse à la question universelle, on risque bien d’être un petit peu perdu. Il faut dire que le film plonge ses spectateurs sans autre forme de cérémonie dans l’univers déjanté de la saga : on commence ainsi dans un parc aquatique plein de dauphins, avec un commentaire expliquant que ces créatures que l’homme considérait à sa merci sont en fait bien plus intelligentes que nous et qu’elles cherchaient à nous avertir d’un danger imminent sans succès. Alors que tous les dauphins quittent la surface terrestre, H2G2 : le guide du voyageur galactique suit le premier roman qui commence avec la destruction de la planète terre, parce qu’elle se trouve sur l’emplacement d’une autoroute galactique. Toute l’ironie du récit est de mettre en parallèle cette destruction à grande échelle avec celle de la maison d’Arthur. Le héros involontaire de cette histoire voit également disparaître sa maison à cause d’une autoroute, mais cette fois du fait des humains, en même temps que les Vogons viennent pour détruire la terre. Ce anti-héros par excellence est sauvé à la dernière seconde par Ford Prefect, un ami qui est aussi un extra-terrestre venu sur terre pour alimenter le fameux guide du voyageur galactique. Commence alors un récit tout aussi fou autour d’une question centrale : la grande question sur la vie, l’univers et le reste.
Comme les romans de Douglas Adams, le film de Garth Jennings réussit à jouer sur nos attentes pour mieux nous surprendre. Dans H2G2 : le guide du voyageur galactique, tout ressemble à de la science-fiction traditionnelle, mais rien n’en est vraiment. Par exemple, quand les Vogons entourent la planète pour la détruire, on s’attendrait à une réaction de la part des humains, à une tentative pour se battre à la manière d’un Independence Day. Et non, les Vogons détruisent la planète en un clin d’œil, et c’est tout. Les héros ne sont pas ceux que l’on croit et ceux que l’on suit ici n’ont rien, mais alors vraiment rien d’héroïque. Le pire est peut-être Arthur qui reste pendant tout le film en pyjama et en chambre de nuit et qui n’a qu’une envie : retrouver sa petite maison un peu minable. L’humour absurde du récit original fonctionne ainsi énormément sur l’attente et la déception : quand les héros sont capturés, on s’attend à quelque chose de spectaculaire, mais en fait ils sont torturés en leur lisant de la poésie. Le robot intelligent de l’histoire est aussi dépressif, tandis que le vaisseau spatial est enjoué, même dans les pires situations. Et puis naturellement, la plus grande déception reste la fameuse réponse à la question du sens de l’univers, le mythique « 42 » qui passionne tant les fans. Toutes ces déceptions sont plutôt bien rendues dans le film qui, à défaut de faire des étincelles côté mise en scène, propose une illustration propre et amusante du roman originale. Dans un premier temps, H2G2 : le guide du voyageur galactique est ainsi vraiment drôle et on sent que Garth Jennings aime l’œuvre originale, tandis que les moyens techniques modernes lui permettent quelques idées visuellement très drôles, à l’image du Générateur d’Improbabilité Infinie qui est vraiment bien rendu. Malheureusement, le film s’allonge un peu vers la fin, le rythme baisse un peu et même si on apprécie la poésie de l’usine des planètes, la fin est un peu moins réussie dans l’ensemble.
Pouvait-on vraiment adapter une œuvre aussi complexe et surtout aussi absurde que celle de Douglas Adams ? H2G2 : le guide du voyageur galactique prouve qu’on peut le faire, mais pas forcément le faire très bien. Garth Jennings s’en sort plutôt bien avec cette adaptation assez proche de l’original et plutôt convaincante, surtout dans sa première moitié. On ne l’apprécie pas autant si on ne connaît pas du tout l’original et on peut regretter une fin un peu plus molle, mais l’ensemble reste très amusant et le principe de décevoir par rapport aux attentes des spectateurs fait ses preuves. Dans l’ensemble, H2G2 : le guide du voyageur galactique est une adaptation honorable, mais inférieure à sa bande-annonce extrêmement prometteuse…
Et pour finir, le conseil toujours aussi indispensable : « DON’T PANIC ».