Après Shaun of the Dead, une « comédie romantique avec des zombies », Edgar Wright s’attaque à un autre genre pour mieux le détourner et le parodier. Hot Fuzz rend explicitement hommage au cinéma d’action des années 1990 et aux duos de flics que l’on retrouvait dans tous les films. Un super-flic londonien est puni en étant muté à Sandford, dans une petite ville de province qui n’a pas connu de meurtres depuis 20 ans et qui a le taux de criminalité le plus bas du pays. Le soir de son arrivée, il arrête déjà une dizaine de personnes, à la grande surprise du commissariat local, puisque la majorité des affaires se concentrent autour de haies et de cygnes. Edgar Wright ne se contente pas d’une comédie née du décalage de situation toutefois, il va beaucoup plus loin avec une série de meurtres sanglants (et quelques glaces, naturellement) et une enquête de haute volée à résoudre. Hot Fuzz part très vite dans le n’importe quoi, c’est la marque de fabrique du réalisateur et ici, cela fonctionne très bien. Un gros bordel très fun !
Hot Fuzz commence par la présentation de son personnage principal : à Londres, Nicholas Angel est le meilleur policier de son équipe. Aussi bon pour résoudre une enquête que dans le feu de l’action, il ridiculise ses collègues et ses supérieurs qui décident ainsi de l’envoyer loin, très loin, dans le Gloucestershire. Une promotion en forme de punition et le sergent découvre un petit village tout mignon, où les crimes les plus graves impliquent le pub et quelques jeunes cagoulés dans les rues. Edgard Wright joue d’abord sur l’efficacité implacable du policier et le calme paisible des habitants. Son premier soir au pub, Nicholas fait sortir tous les mineurs et il arrête un type pour état d’ébriété, puis un autre et encore un autre. L’humour repose alors sur ce décalage, un classique qui fait à nouveau ses preuves : le flic des villes opposé aux flics des champs, pour qui l’idée même d’un meurtre à Sanford paraît totalement loufoque. Hot Fuzz joue très bien sur cette corde, mais le scénario monte vite en rythme quand un accident de voiture laisse deux personnes décapitées. Un drame sanglant qui ne ressemble pas à un accident pour le policier expérimenté qui se doute de quelque chose. Malheureusement pour lui, son supérieur n’est pas de cet avis et il est chargé d’affaires insignifiantes, comme de récupérer un cygne qui s’est enfui, ou surveiller la tombola de l’église. Oui, mais voilà : les accidents se multiplient et certains habitants deviennent de plus en plus suspects…
Le mélange des genres est au cœur du cinéma d’Edgar Wright. Un autre réalisateur aurait pu se contenter de l’adaptation difficile d’un policier extrêmement efficace dans un village paisible de la campagne britannique, mais pas l’auteur de Hot Fuzz. Il ajoute à cette base prometteuse une bonne dose de parodie, cette fois en direction du cinéma d’action. Bad Boys II et Point Break sont cités directement à plusieurs reprises et on en voit même des extraits à un moment, avant de voir la parodie de ces extraits dans le film lui-même. Danny, le coéquipier de Nicholas interprété par un Nick Frost qui est parfaitement juste, est fan de ces films et on suspecte le cinéaste de les aimer tout autant. D’ailleurs, le titre du long-métrage est un hommage à ce cinéma qui portrait souvent comme titre deux mots, sans avoir toujours de lien direct avec l’intrigue. Edgar Wright ne se contente pas de citer cet autre cinéma, il le reprend à son compte. Même si c’est une comédie, Hot Fuzz contient quelques séquences d’action redoutables d’efficacité et même si le sang est plus souvent du ketchup, le long-métrage n’hésite pas à frôler le thriller plus d’une fois. Simon Pegg est excellent dans le rôle principal, l’acteur garde toujours son sérieux et il joue très bien le flic inflexible, même quand il court après un animal. La distribution compte un grand nombre de seconds rôles croustillants, avec une mention spéciale pour Jim Broadbent, impeccable en commissaire diabolique, et surtout pour Timothy Dalton, parfait dans ce rôle de gentleman psychopathe.
La meilleure réussite de Hot Fuzz, c’est sans doute de ne jamais oublier que c’est un délire complet et de ne pas se prendre trop au sérieux. Sans cela, le long-métrage réalisé par Edgar Wright aurait été probablement insupportable tant il en fait trop tout le temps. Mais avec une bonne dose de second degré, le film se regarde avec grand plaisir et on ne voit pas le temps passé. Si vous aimez les glaces et le sang, vous auriez tort de passer à côté !