Le succès ayant été au rendez-vous la première fois, la saga Hunger Games se poursuit avec un nouvel opus, en attendant une conclusion en deux épisodes les deux années prochaines. Même si Hunger Games a été un succès, Gary Ross n’a pas été reconduit à la réalisation, officiellement pour des raisons de calendrier. C’est donc Francis Lawrence qui reprend la saga et qui a réalisé ce nouvel épisode. Hunger Games : L’embrasement se déroule peu après les évènements du premier film, alors que Katniss doit célébrer sa victoire aux jeux et alors que l’agitation gronde dans le pays. Plus politique et plus dur, cet épisode est plus mature et dans l’ensemble plus réussi que son prédécesseur. Même s’il n’évite pas quelques clichés, Francis Lawrence s’en sort honorablement et offre un bon divertissement en même temps qu’un film étonnamment politique, étant donné son statut de blockbuster pour ados. À voir sans déplaisir…
À la fin de Hunger Games, Katniss et Peeta gagnaient les jeux en refusant de s’entre-tuer et en préférant se suicider ensemble par amour. Interrompue in extremis par les organisateurs de ce jeu qui sacrifie tous les ans deux jeunes de chacun des douze districts sous la coupe du Capitole, cette tentative de suicide devient vite un symbole pour tous les opprimés. Une lueur d’espoir qui soulève vite le pays et Hunger Games : L’embrasement reprend alors que dans tous les districts, des voix s’élèvent. Katniss est à l’origine de tout ce bruit, mais non seulement elle ne le sait pas, mais elle ne le veut pas : c’est la première bonne idée du récit. Francis Lawrence introduit astucieusement son sujet en évitant les explications en guise d’introduction : quand le long-métrage commence, on est au cœur du douzième district, celui qui est dédié aux mines et qui est totalement coupé du reste du monde. On ne sait rien de ce qui se passe par ailleurs et on découvre en même temps que l’héroïne qu’il se passe des choses dans les autres régions. Le Président Snow vient l’avertir avant son départ pour la traditionnelle tournée des vainqueurs : il exige d’elle un soutien total et la jeune femme doit calmer la rébellion ou le pouvoir s’en prendra directement à sa famille. On le voit, Hunger Games : L’embrasement ne commence pas du tout comme une romance adolescente et le film adapté des romans de Suzanne Collins fait preuve d’une noirceur inattendue. La dystocique imaginée par la romancière fonctionne mieux que dans le premier épisode, sans doute parce que les moyens ont été renforcés et les décors sont plus crédibles. Francis Lawrence a la bonne idée de ne pas en faire trop sur le côté misérabiliste, sans l’effacer totalement pour autant. On passe un seuil toutefois et cette suite est plus convaincante. On découvre mieux aussi ce pays étrange découpé en douze sections contrôlées de près par un pouvoir central et sans partage, qui n’hésite pas à tuer sans discernement pour limiter toute forme de rébellion. Plus encore que dans Hunger Games, ce film joue la carte des analogies historiques — on pense notamment aux grands rassemblements nazis — et il faut reconnaître qu’il fait souvent froid dans le dos.
L’univers est une chose, mais qu’en est-il du récit principal ? Comme son titre l’indique, Hunger Games : L’embrasement hausse le ton et marque le début d’une révolution qui est d’ores et déjà annoncée par le titre de la suite, Hunger Games : La Révolte. Avant la révolte donc, les prémices et la trame narrative de ce film est marquée par un contexte politique omniprésent. Même si on retourne à nouveau dans l’arène des jeux, suivant ainsi une structure cyclique assez commune dans cette littérature — on pense aussi à la saga Harry Potter — Francis Lawrence casse cette structure à de multiples reprises. Rien ne se passe vraiment comme prévu et même si on ne peut pas en dire trop sous peine de dévoiler la fin, disons simplement que l’on sent très bien les tensions politiques d’un bout à l’autre. Tout est affaire de politique ici et le long-métrage exploite bien cette idée qui apporte la dose de second degré qui manquait parfois au précédent. Ainsi, les problèmes amoureux de Katniss sont encore une fois au cœur des enjeux et on retrouve le triangle amoureux très classique dans cette littérature également — cette fois, on pense plus à Twilight —, mais on sait d’entrée de jeu que l’amour qu’elle porte à Peeta est lui aussi politique. Il faut convaincre les habitants que leur amour est réel et que leur suicide, à la fin de Hunger Games, n’était pas un acte politique, mais bien un désespoir amoureux. C’est le point de départ au moins, mais peu à peu, on se doute qu’il se trame autre chose, comme dans l’épisode précédent d’ailleurs, même si le cinéaste s’en sort mieux cette fois. Sur ce point comme sur bien d’autres, Hunger Games : L’embrasement n’est pas parfait, mais les scénaristes ont fait des efforts et le résultat est indéniablement meilleur qu’avant. On remarque aussi le changement de réalisateur : Francis Lawrence bouge moins la caméra que son prédécesseur et il exploite au mieux les énormes moyens à sa disposition. Comme on dit, on en a pour son argent avec quelques séquences techniquement sans faute et très impressionnantes à regarder. On sent qu’un cap a été franchi, tout comme dans le jeu des principaux acteurs : Jennifer Lawrence s’affirme plus et elle est souvent excellente pour passer ses émotions. À ses côtés, Josh Hutcherson et Liam Hemsworth sont un peu plus faibles avec leurs rôles de bellâtres, mais on sent du potentiel pour la suite des évènements.
On s’ennuyait un peu avec Gary Ross, ce n’est plus du tout le cas avec Francis Lawrence. C’est bien la preuve d’un progrès : Hunger Games : L’embrasement est un bon divertissement qui a peut-être encore quelques rares coups de mous au démarrage, mais qui est bien plus dense que son prédécesseur dans l’ensemble. Plus dense et plus spectaculaire : la saga a nettement franchi un cap et ce n’est pas plus mal. Au-delà du spectacle pur, le film surprend par une noirceur qui paye : la dystopie mise en place ici ne manque pas d’aplomb et même si Hunger Games : L’embrasement n’est pas une œuvre politique, sa vision cynique du pouvoir mérite d’être saluée. Après près de 2h30, on n’a qu’une envie : voir la suite ; sur ce point au moins, Francis Lawrence a réussi son travail.