Partie sur de mauvaises bases avec un premier volet trop long, trop téléphoné et trop ennuyeux, la saga Hunger Games a redressé le tir l’an dernier avec Hunger Games : L’embrasement. Sans éviter quelques scories, probablement inévitables en raison de sa cible si ouvertement assumée, ce deuxième opus de l’adaptation au cinéma de la trilogie de Suzanne Colins était beaucoup plus sombre et politique, plus mature en somme et donc plus intéressant. Une vision qui a manifestement plu, puisque Francis Lawrence a été reconduit à la réalisation pour clore la saga, et comme Hollywood sait exploiter au maximum ses meilleurs filons, le troisième volet a été adapté en deux films. Voici donc Hunger Games : La Révolte, partie 1 en attendant la suite (et fin), dans un an. Ce genre de division est toujours un peu artificiel, mais le scénario s’y prête plutôt bien et cette première partie de la dernière partie de Hunger Games (tout le monde suit ?) tient la route. Comme son titre l’indique bien, la révolte qui grondait dans le deuxième film éclate, c’est la guerre civile qui commence et là encore, Francis Lawrence impose un traitement beaucoup plus brutal que l’on aurait attendu. Dans l’ensemble, c’est une bonne surprise, même si ce long-métrage divertissant et prenant n’est, lui non plus, pas épargné par quelques erreurs probablement liées à son statut de blockbuster pour ados.
Hunger Games : L’embrasement se terminait sur une menace pour le régime dystopique qui règne sur l’univers fictif imaginé pour les besoins de la saga. Katniss, héroïne de cette histoire, était aussi l’une des participantes d’un jeu télévisé organisé par Capitole, le pouvoir centralisé, qui règne en maître sur les districts autour de lui et qui leur impose de sacrifier chaque année deux enfants. À la fin de ces jeux, alors que Katniss devait mourir ou tuer un autre jeune, elle tire une flèche et détruit la barrière qui enferme tous les joueurs, l’arène qui est la condition sine qua non à ces Hunger Games. La révolte peut commencer et le film s’arrêtait sur la promesse que l’on allait en entendre parler. Sans surprise, Hunger Games : La Révolte, partie 1 est consacré précisément à cette révolution des districts contre le pouvoir central. Même si le film appartient toujours à la saga Hunger Games, il n’est plus du tout question de jeux : ils sont toujours là, en tâche de fond, mais ils ne sont plus organisés, les héros n’y participent plus, on est définitivement passé à autre chose. À quoi alors ? À la guerre, tout simplement et à la pire sorte qui soit, puisque c’est une guerre civile qui se joue dans ce film et qui se jouera dans le suivant. Katniss rejoint le District 13 qui n’a pas disparu comme on le croyait, mais qui a été converti en une base rebelle enterrée et extrêmement bien armée et elle participe à la résistance, notamment en acceptant de devenir le leader de la révolte ; le Geai moqueur, symbole de cette rebellion contre le Capitole, c’est elle. Comme dans le précédent film, Francis Lawrence surprend en filmant des scènes que l’on n’aurait pas vu dans un film aussi formaté. Certaines séquences, notamment dans le District 12 transformé en une gigantesque fosse commune pleine de cadavres, ou celle dans l’hôpital de fortune du District 8, sont assez fortes et même si Hunger Games : La Révolte, partie 1 reste un film grand public, sans interdiction, on peut penser qu’un autre cinéaste aurait masqué totalement cette violence.
La guerre n’est pas quelque chose de beau à voir, il faut faire des sacrifices et beaucoup d’innocents doivent mourir. C’est un peu le message que semble faire passer Hunger Games : La Révolte, partie 1 qui ressemble, à cet égard, à une sorte de « La guerre civile pour les ados », après la politique pour les ados et la société des médias pour les ados. Un sentiment renforcé par certaines idées grossières, qui ne sont pas le fait du film, ni du réalisateur, mais plutôt de l’œuvre originale. Il est probablement vain d’en reparler dans le troisième film de la saga, mais quand même : fallait-il séparer de manière aussi tranchée et caricaturale les districts ? Qui peut croire que l’on peut organiser une société avec des mineurs dans une part de pizza, des bucherons dans une autre, des ouvriers dans une autre, tout ça autour d’une zone centrale où l’on vit à l’époque de Versailles ? C’est grotesque depuis le début, mais dans notre cas, cela nuit à tous les efforts de Francis Lawrence pour rendre l’ensemble plus réaliste. Un exemple parmi d’autres : quand Katniss rend visite à des malades dans un hôpital, on nous montre le président du Capitole en train de boire du champagne dans son palais qui décide, comme un gamin décide de se venger d’un autre gamin qui vient de lui piquer un jouet, de bombarder l’hôpital. Son argument ? Personne ne doit être ami avec Katniss, ce qui n’est pas inintéressant, mais Hunger Games : La Révolte, partie 1 passe alors à côté d’une piste beaucoup plus riche. L’héroïne est en plein débat pour savoir si elle doit s’engager dans cette cause qui la dépasse et qu’elle n’a pas souhaité. Si le Capitole tuait tous ceux qu’elle aidait, pour la démoraliser, le scénario aurait été plus tortueux et plus intéressant. Mais évidemment, ce n’est pas ainsi que le roman original a été écrit et on peut déjà remercier Suzanne Collins de nous épargner une romance trop présente. Certes, l’amour de Katniss pour Peeta est au cœur du film, mais en tâche de fond, pas au premier plan. Malheureusement, on imagine que ce ne sera pas le cas dans la deuxième partie, néanmoins le début de la conclusion est plutôt réussi sur ce point.
Hunger Games : La Révolte, partie 1 ne prétend pas au titre de film de l’année, mais Francis Lawrence a trouvé le ton juste avec cette saga pour ados. Il doit composer avec certains défauts qui proviennent de l’œuvre originale et il doit aussi probablement respecter un cahier des charges extrêmement contraignant, mais malgré tout, ce n’est pas le plus mauvais blockbuster formaté du moment, loin de là. On apprécie ce personnage féminin au fond assez atypique, car très peu féminisé justement : Jennifer Lawrence est toujours meilleure dans le rôle de Katniss et elle est même touchante ici, notamment sur la scène de l’hôpital. La romance attendue est reportée jusqu’à la toute fin et on attendait aussi de l’action à tout rompre, alors que le long-métrage en est finalement assez peu pourvu. Hunger Games : La Révolte, partie 1 est plus étonnant qu’on n’aurait pu le croire… dans les limites du genre, bien sûr.