Adaptée d’un roman de Walter Tevis, Le Jeu de la Dame est une mini-série en sept épisodes qui parvient à faire des jeux d’échecs un sport intense et haletant. Scott Frank et Allan Scott ont fait appel à des spécialistes, dont le champion du monde Garry Kasparov, pour recréer des parties crédibles. Si vous n’êtes pas amateur d’échecs, vous passerez à côté bien sûr, mais ce n’est pas grave pour autant. D’ailleurs, la création de Netflix s’apprécie même si vous ignorez tout du jeu et de ses règles. Elle a d’autres qualités que ses parties fidèlement reconstituées, à commencer par la présence d’Anya Taylor-Joy, tout simplement excellente dans le rôle principal. Le Jeu de la Dame est un divertissement très plaisant, à ne pas rater.
Beth n’a que neuf ans quand elle découvre pour la première fois les échecs, dans la cave de l’orphelinat où elle grandit depuis l’accident mortel qui a emporté sa mère. C’est le gardien de l’établissement qui est amateur du jeu et qui le pratique pendant ses pauses. La jeune fille n’est pas censée rester dans cette cave où elle se rend pour nettoyer les brosses de tableau, mais elle observe du coin de l’œil le plateau de 64 cases et apprend les règles de base par elle-même, simplement en regardant le jeu se dérouler. Elle comprend presque instinctivement le but du jeu, les règles de déplacement de chaque pièce et élabore même quelques stratégies rudimentaires dans sa tête, avant même de demander au gardien de lui apprendre à jouer. Beth est une surdouée capable de visualiser toutes les options pour découvrir la meilleure et son niveau progresse très rapidement, pour dépasser celui du gardien et même des joueurs du club local. Le Jeu de la Dame déploie son histoire comme s’il s’agissait d’un biopic, même si tout est fictif ici. Le roman original s’inspire de faits réels, dans le sens où il y a bien eu des prodiges des échecs qui battent des champions pratiquement sans avoir à apprendre à jouer, et dans le sens où les Russes sont bien les maîtres de ce jeu. Même si ce n’est pas une histoire vraie, Scott Frank et Allan Scott ont apporté un très grand soin à la reconstitution des années 1950 et 1960 pendant lesquelles se déroulent le récit. Tout est très bien reproduit, avec un sens du détail caractéristique des films historiques. À part pour quelques fonds numériques assez mal réalisés, c’est du très bon travail et une belle réussite pour cette adaptation. Toutefois, la série de Netflix brille avant tout pour son casting et tout particulièrement pour Anya Taylor-Joy qui incarne Beth. L’actrice a une présence incontestable à l’écran et surtout, elle parvient très bien à rendre la complexité de son personnage, génie des échecs et addict incapable de résister à l’alcool et à ce calmant qu’on lui a donné dès l’orphelinat. Le Jeu de la Dame lui doit beaucoup et la série vaut le détour rien que pour elle.
Succès sur toute la ligne pour Scott Frank et Allan Scott, qui signent une adaptation très convaincante de ce roman sur les échecs. Le Jeu de la Dame se suit avec beaucoup de plaisir, même si on ne s’intéresse pas du tout aux échecs, et même sans déplaisir si on s’y intéresse, ce qui est apparemment très difficile. La création de Netflix ne devrait pas dépasser les sept épisodes de cette saison unique, mais l’histoire est joliment bouclée et une suite n’est pas nécessaire. À voir.