Depuis la sortie de Jurassic Park III qui concluait une trilogie de blockbusters initiée par le plus grand du genre, l’idée d’offrir une suite à la saga Jurassic Park a fait son chemin. Et une vingtaine d’années après le mythique Jurassic Park, les dinosaures font leur grand retour avec Jurassic World. Steven Spielberg ne réalise toujours pas, mais reste à proximité des commandes en produisant le long-métrage signé Colin Trevorrow. Vingt ans après, les scénaristes trouvent une nouvelle idée pour relancer la saga sans en appeler au reboot, bien au contraire. Cette suite n’oublie pas ses prédécesseurs et multiplie même les hommages aux deux premiers épisodes. Des clins d’œil appuyés que les fans apprécieront, mais qui n’excusent pas un scénario paresseux et souvent stupide. Jurassic World reste un blockbuster estival convaincant, avec quelques scènes d’action redoutables, mais il suit les mêmes travers que Jurassic Park III et oublie qu’il ne s’agit pas d’en faire trop, mais de le faire bien.
Comme tous les volets de la saga, Jurassic World se situe dans la chronologie d’ensemble et il se déroule ainsi une vingtaine d’années après les évènements du premier épisode. Dix ans après la fermeture du premier parc d’attractions, un milliardaire achète le concept et ouvre un nouveau parc, beaucoup plus classique. Cette fois, il construit une sorte de Disneyland, mais sur le thème des dinosaures. Les enfants sont visés avec des attractions gentillettes et le succès est au rendez-vous. Quand le film commence, le parc a bien grandi en dix ans et il est le plus grand jamais créé. Un beau succès, mais qui ne suffit pas : les actionnaires en veulent toujours plus et il faut relancer l’intérêt du public avec de nouvelles bêtes plus grosses et impressionnantes encore. Cette idée ressemble fort à celle qui semble avoir animé les scénaristes de ce nouveau volet. Comme les propriétaires du parc, Colin Trevorrow en veut toujours plus : le T.Rex au cœur des deux premiers volets n’est plus la star, pas plus que le dinosaure du troisième opus. Non, Jurassic World va encore plus loin et fait encore plus fort avec l’Indominus rex, une espèce créée de toute pièce par les généticiens du parc. Croisement de plusieurs dinosaures sur une base de T.Rex justement, cette créature est très grande et puissante, mais elle est surtout très intelligente. Naturellement, rien ne se passe comme prévu et l’intrigue se met en place autour de la sortie de la bête de son enclos. Le parc accueille alors vingt mille visiteurs environ, mais comme toujours, on se concentre sur un groupe resserré… et en l’occurence deux frères venus en vacances pendant une semaine dans le parc d’attractions gérés par leur tante. Sans surprise, ils seront au cœur du conflit et dans les pates du dinosaure suite à une série de péripéties : sur ce point, Colin Trevorrow reste en terrain bien connu.
C’est d’ailleurs sans doute le plus gros défaut de Jurassic World : loin de l’originalité du premier volet, ce blockbuster reste parfaitement dans les rails du genre et il ne prend aucun risque. En fait, Colin Trevorrow semble si impressionné par son sujet, qu’il oublie qu’il en est le réalisateur et qu’à ce titre, il est censé apporter son savoir-faire et sa vision. Au lieu de cela, il reste obnubilé par une idée : reconnaître l’héritage et rendre hommage au travail de Steven Spielberg. Résultat, on a en permanence des clins d’œil aux premiers films : une séquence entière se déroule dans le bâtiment où Jurassic Park se terminait ; une autre est une copie presque parfaite de la très réussie attaque de velociraptors dans Le Monde Perdu : Jurassic Park. Et puis le scénario évoque explicitement et à plusieurs reprises les faits qui se sont déroulés vingt ans auparavant. Tout ceci est amusant pour le fan, mignon par moment, mais donne aussi le sentiment que Colin Trevorrow ne sait pas quoi faire d’autre, ou du moins n’ose rien faire. Ce n’est pas tout à fait exact, Jurassic World dévie sur plusieurs points, mais malheureusement, ses idées propres sont en général ratées. On apprécie les premiers moments dans ce parc qui ressemble à n’importe quel autre, avec d’immenses hôtels et une rue pleine de boutiques de souvenirs. C’est assez bien vu, même si le film ne va pas sur le terrain que l’on attendait de la dérision. En revanche, l’idée que l’on puisse dresser des dinosaures est absurde et toute la dernière partie tombe ainsi dans le grotesque. On n’y croit pas une seconde et surtout on n’a jamais peur. On aurait apprécié que Steven Spielberg, en tant que producteur exécutif, intervienne et donne une leçon de cinéma. L’important, pour impressionner, n’est pas de multiplier les bestioles les plus immenses et les plus réalistes possible. Une ombre est souvent bien plus efficace et l’essentiel est ailleurs : il faut créer une ambiance et générer la peur… ce qu’oublie totalement Jurassic World.
Colin Trevorrow assure le spectacle et il faut reconnaître qu’à cet égard, son Jurassic World est réussi. La technique a évolué et les dinosaures sont hyper réalistes, avec des scènes de combat à couper le souffle. C’est souvent bluffant et le long-métrage mérite ainsi d’être vu si on aime le cinéma qui en met plein la vue. Hélas, le dernier volet de la saga Jurassic Park ne fait que ça, et oublie totalement qu’il faut aussi une bonne histoire pour créer un excellent film. Le scénario n’est pas le point fort de Jurassic World et si ce volet n’est peut-être pas le pire du lot, il est loin d’être le meilleur. Dommage…