La mort n’était pas au rendez-vous

Exceptionnellement ce soir, je suis allé au cinéma non pour voir un film sorti récemment, mais un film de… 1945 ! La mort n’était pas au rendez-vous est en effet un film de Curtis Bernhardt, un célèbre inconnu, réalisateur allemand et juif qui a été contraint de quitter l’Allemagne pour la France puis les États-Unis dans les années 1930. À l’image de son réalisateur, ce film est globalement un oublié de l’histoire du cinéma malgré la présence, dans le rôle principal, d’Humphrey Bogart. Pourtant, ce film de la Warner ne manque pas d’intérêt et mérite notre attention.

Ce film appartient à la catégorie des films noirs, une catégorie très à la mode à cette époque. La figure bien connue d’Humphrey Bogart, grand acteur de films noirs (ne serait-ce que pour le plus connu, Le faucon maltais) l’annonce d’emblée : on est ici dans un cinéma noir plutôt classique dans la forme et effectivement, ce film respect bien les codes du genre (la nuit, très présente, les nombreuses scènes d’intérieur, etc.) sans innover outre-mesure. Par contre, l’intrigue est un peu plus originale, surtout dans le cas de l’acteur vedette. En effet, le film se construit autour d’un meurtre opéré par Humphrey Bogart sur sa femme et le spectateur sait donc immédiatement qui est le meurtrier. L’enquête qui se déroule dans le film vise donc à démasquer le héros du film, et le suspense vient plutôt de là, à savoir comment le meurtrier va être démasqué. Ce dispositif n’est pas si original que cela, en soit, mais deux points sont plus étonnants. Déjà, en 1945, Bogart est un acteur ultra-célèbre en Amérique et ne joue plus que des rôles de gentil, contrairement aux années 1930 où il jouait plutôt des méchants. Ce retour au source, si l’on peut dire, contribua à l’oubli du film, apparemment le public n’apprécia pas outre-mesure.

Mais à mes yeux ((Il est vrai que ma connaissance de l’histoire du cinéma est encore très limitée. Je compte bien réparer ce manque mais entre temps, je vais être étonné de choses peut-être tout à fait banales.)), l’originalité vient d’abord de l’utilisation de la psychanalyse dans le film. 1945, c’est le début de la reconnaissance publiques des thèses freudiennes et le thème psychanalyste était apparemment très apprécié des studios hollywoodiens. Dans ce film, la psychanalyse, incarnée par le docteur et ami du héros, résout l’intrigue en démasquant le coupable. Et d’ailleurs, dans une intéressante inversion scénaristique, toute l’intrigue consiste non pas à savoir qui est le coupable, mais qui est l’inspecteur et on comprend à la fin que la psychanalyse était présente depuis le début (je n’en dis pas plus pour ne pas tout dévoiler).

J’ai passé un très bon moment dans cette salle à voir ce vieux film. Je dois dire que les explications qui précédèrent ont contribué largement à ouvrir mon intérêt. En effet, je ne suis pas allé dans une salle obscure du quartier latin (Action Christine pour être précis) au hasard. Il s’agissait d’une projection organisée par le site Critikat dont, vous vous en serez aperçus si vous suivez ce blog, les critiques me plaisent fortement. Une fois par mois, ils organisent une projection dans un des deux Action avec explications et débat à la clé. J’avais, à tout hasard, donné mon adresse pour recevoir une invitation gratuite, et j’en ai reçu une, à ma grande surprise ! Je tiens donc à remercie ici l’équipe de bénévoles derrière Critikat pour cette invitation qui m’a donné envie de revenir le mois prochain ! Quoi de mieux, en effet, en guise d’apprentissage du cinéma classique ? Si cela vous intéresse, vous trouverez les infos sur la prochaine séance sur leur site. Faites-moi signe si vous vous y rendez… 😉

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Comme d’habitude, je ne peux que recommander la critique de Critikat