Les beaux gosses, Riad Sattouf

Les beaux gosses est le premier film de Riad Sattouf, dessinateur de bandes dessinées. Son passage derrière la caméra est plutôt réussi avec ce film mêlant de manière surprenante humour et réalisme.

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La première image des Beaux Gosses est plutôt frappante : on voit un très gros plan sur deux visages gras et boutonneux s’embrasser goulûment, avec les langues elles aussi bien visibles. Ce qui frappe d’abord avec ce film, c’est le décalage entre le titre et la réalité : ces beaux gosses ne sont pas vraiment beaux. Le film dépeint l’âge ingrat de l’adolescence, celui des transformations psychologico corporelles pas évidentes à comprendre, celui des premiers émois amoureux, celui du début de la séparation avec la famille.

Riad Sattouf a pris le parti de ne rien cacher de cet âge, surtout pas ses aspects peu ragoûtants. On a ainsi des gros plans acnéens et des appareils dentaires, mais aussi des jeunes quelque peu obnubilés par le sexe et la masturbation et sans complexes sur ce point. Par bien des aspects, cette comédie française est bien plus réaliste et crue que bon nombre de films censés être plus sérieux et elle évoque plutôt les comédies à l’américaine, tendance Apatow.

La comédie est bien présente, on rit de ces jeunes grandes-gueules, mais finalement ignorants, à l’image du héros qui part en courant quand les choses commencent à devenir un peu trop sérieuses. L’humour tourne évidemment beaucoup autour de la sexualité, mais pas seulement et le réalisateur se joue aussi de nos attentes. Ainsi, lors de la scène d’espionnage de voisins en pleine action, la fin prévisible est déjouée par un suicide inattendu et la satisfaction de nos jeunes de n’avoir pas été pris en faute est très drôle. On rit aussi de la mère poule dépressive et ultracastratrice, des échanges parfois violents entre les jeunes, mais toujours drôles.

Les beaux gosses est aussi, étonnamment, réaliste. Certes, quelques personnages tirent vers la caricature — comme le souffre-douleur de la classe, d’ailleurs assez drôle —, mais le film dit aussi des choses très vraies et intemporelles sur l’adolescence. Je pense que beaucoup de monde peut se retrouver, au moins en partie, dans ces jeunes. Apparemment, les BD de Riad Sattouf, dont j’ignorais jusqu’à l’existence avant le film, sont basées sur ce mélange de réalisme et de fantaisie, ce qui n’est pas étonnant et se retrouve bien à l’écran.

La réussite du film doit beaucoup aux acteurs, tous très bons avec une mention spéciale pour Hervé, le héros, interprété par Vincent Lacoste qui s’en sort remarquablement bien avec ce rôle pas si facile qu’il en a l’air. Comme dans une BD, et ça n’est sans doute pas un hasard, les personnages sont toujours habillés de la même façon pendant tout le film, comme si les habits les caractérisaient fondamentalement, ce qui n’est pas idiot quand on connaît l’importance de l’apparence, surtout à cet âge là.

L’autre élément qui contribue à la réussite du film tient dans les dialogues. Faire parler des adolescents est un exercice des plus casse-cou, la caricature n’étant jamais très loin. Les beaux gosses réussit à faire parler les jeunes naturellement, sans jamais tomber dans la caricature, mais avec une justesse rare dans le cinéma français. Si les dialogues sont très bien, il manque peut-être au film un peu de scénario : le film suit les aventures d’Hervé sans autre justification, ce qui est après tout suffisant je trouve, mais peut-être que le film aurait gagné en force avec une histoire plus construite…

Je ne peux pas finir sans parler de la musique : composée pour le film, elle est vraiment très bien, et éloigne là encore Les beaux gosses des habituelles productions françaises.

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J’allais voir Les beaux gosses pour me détendre et je n’ai pas été déçu. Non seulement ce film m’a détendu, m’a fait rire, mais je l’ai trouvé plus intéressant qu’une simple comédie sympathoche. Ça n’est certes pas un chef-d’œuvre du cinéma du XXIe siècle, mais pour un premier film, c’est franchement pas mal. Et puis, sur un autre registre,il fait écho quelque part à Entre les murs, palme d’or de l’an dernier, mais en plus léger, plus drôle et sans doute finalement plus vrai sur la description de collégiens.

La critique est assez unanime sur le sujet, que ce soit les Inrocks, Télérama ou Critikat, tous ont aimé. Je suis aussi assez d’accord avec Rob Gordon, même si je le trouve sévère sur la note, mais je suppose qu’elle s’explique par l’humour qui ne l’a pas touché.

EDIT : oh, mais c’est le centième article de ce blog !