Saurez-vous retrouver le titre du film uniquement sur son affiche ? Très court, il est perdu au milieu des mentions énormes pour prévenir le spectateur : six nominations aux Oscars, le nouveau Slumdog Millionaire, il « va vous émouvoir aux larmes ». En général, ce n’est pas une bonne nouvelle quand les distributeurs se sentent obligés de massacrer une affiche à coups de slogans publicitaires et Lion ne fait pas exception, hélas. Garth Davis tenait pourtant un sujet en or avec cette histoire étonnante et, indéniablement, émouvante d’un enfant indien qui retrouve sa mère biologique après 25 ans d’adoption. Sauf qu’au lieu d’émouvoir aux larmes, ce long-métrage sans la moindre originalité et encore moins de finesse psychologique enchaîne les clichés et finit par ennuyer.
Quelque part en Inde, Saroo vit avec sa mère, son grand frère et une petite sœur. La famille est très pauvre, mais ce petit garçon de cinq ans accompagne Guddu, son frère, un petit peu partout et Garth Davis occupe la première partie de son film à présenter leur bonheur. Ils n’ont pas grand-chose, mais ils sont ensembles et heureux et le grand promet monts et merveilles au petit frère, les yeux toujours émerveillés. Ce n’est pas une introduction très originale, mais il faut reconnaître que le réalisateur offre un aperçu assez complet de l’Inde, c’est dépaysant et plaisant à suivre. Lion enchaîne rapidement pour montrer comment Saroo se perd, en l’occurrence en montant dormir dans un train qui l’emporte ensuite vers Calcutta, à plus de mille kilomètres de son point de départ. Les péripéties s’enchaînent ensuite rapidement, jusqu’au moment où le jeune garçon est adopté par un couple d’Australiens et qu’il part en avion très loin de son pays natal. L’intrigue reprend ensuite 25 ans plus tard, alors que Saroo est devenu un occidental complet, mais que la question de ses origines le taraude. Commence alors un long périple pour retrouver sa famille d’origine au cœur du continent indien… et on ne dévoilera rien de vraiment majeur en disant que cette quête se termine bien.
Comme son personnage principal, Garth Davis monte à bord d’un scénario fixé sur des rails et il ne fait rien pour s’en éloigner. Tout est téléphoné dans Lion et le fait qu’il soit inspiré d’une histoire vraie ne change rien, on voit venir toutes les péripéties à des kilomètres à l’avance et on n’est jamais surpris. C’est le cas dans les grandes lignes, comme dans les petites scènes, notamment entre le Saroo devenu jeune homme et sa copine. On voit venir l’exclusion et l’enfermement du personnage alors que sa quête est obsessionnelle. On imagine bien avant la réconciliation quand sa recherche est terminée… et le long-métrage n’essaie jamais de nous donner tort. Le scénario enfile les lieux communs, mais les acteurs ne sont guère plus inspirés. Dans le rôle principal, Dev Patel est constamment dans l’emphase et son personnage sonne faux, comme s’il essayait de manière maladroite de susciter artificiellement l’émotion au lieu de la laisser venir naturellement. Le jeune acteur qui incarne le jeune Saroo, Sunny Pawar, est bien meilleur à cet égard, mais aussi moins présent à l’écran. La réalisation n’aide pas, du montage alternatif entre passé et présent jusqu’à la musique lourde au possible. Bref, rien ne colle et Lion essaie à tout prix d’émouvoir par tous les moyens. Ce qui, comme souvent, suscite finalement l’effet inverse.
Garth Davis tenait un bon sujet, mais il s’est malheureusement senti obligé d’utiliser tous les leviers à sa disposition pour susciter le maximum d’émotion, au lieu de faire confiance à son histoire. Le résultat est très artificiel et Lion perd toute sa force à trop essayer de faire pleurer ses spectateurs de manière artificielle. Dommage, l’histoire originale était belle et elle aurait mérité mieux.