Losing Alice est un thriller psychologique qui compte beaucoup sur une ambiance poisseuse et prenante. Cette mini-série israélienne est composée de huit épisodes, tous écrits et réalisés par sa créatrice, Sigal Avin. Cela offre au projet commandé par la chaîne Hot 3 une grande cohérence sur la forme comme le fond, si bien que l’on pourrait presque parler d’un long-métrage particulièrement long. Losing Alice sait toutefois parfaitement jouer avec son format et chaque épisode est l’occasion d’une plongée toujours plus profonde dans un environnement bizarre et mystérieux. Une vraie réussite, tendue de bout en bout, à ne rater sous aucun prétexte.
Alice fut une réalisatrice estimée qui a signé plusieurs films remarqués, mais qui a abandonné sa carrière quand elle a fondé une famille et eu trois filles. À l’aube de la cinquantaine, elle se sent frustrée de son rôle de femme au foyer, surtout quand son mari, David, est un acteur qui enchaîne les succès au cinéma. Le jour où elle tombe sur le scénario écrit par une jeune femme, une œuvre érotique et gonflée, elle se sent revivre. Elle rêve de le réaliser et de quitter, au moins pour un temps, son simple rôle de mère pour redevenir la cinéaste reconnue qu’elle a été. Problème, David devait jouer le rôle principal et il n’est pas partant du tout pour que sa femme le dirige, alors que le projet contient plusieurs scènes de sexe explicites. Autre problème, la scénariste, Sophie, est une fan survoltée qui semble avoir un peu trop puisé dans sa vie pour imaginer cette histoire si glauque et qui a aussi tendance à être un petit peu trop proche d’Alice, de David, de leurs trois filles et aussi de leur voisin. Losing Alice se construit autour d’une successions de mystères qui s’empilent et troublent de plus en plus la situation. Dans un premier temps, le scénario de Sophie paraît génial et dingue, mais Alice note vite des points communs avec la vie de son autrice. A-t-elle pioché dans son propre parcours pour décrire celui de ses personnages ? Qu’est-il arrivé exactement à sa meilleure amie, mystérieusement disparue lors de leurs études de cinéma ? S’inspirent-elle de personnages qui l’entourent au quotidien ou a-t-elle tout inventé ? Alors que le projet se met en place, les parallèles entre la vie de la jeune femme et le personnage féminin de son film sont de plus en plus troublants. Et pour ne rien arranger, elle semble constamment chercher à séduire tous ceux qui l’entourent. Veut-elle voler David ? Alice elle-même semble troublée par son charme et fantasme volontiers sur elle. Et que dire de Tamir, le voisin qu’elle a menée par le bout du nez avec une facilité déconcertante ? Ce personnage intelligent et manipulateur est indéniablement un gros point fort et Lihi Kornowski trouve le ton juste pour l’incarner. La série peut aussi compter sur Ayelet Zurer, parfaite dans le rôle d’Alice, avec un jeu qui retranscrit toute la complexité du personnage.
Mieux vaut ne pas trop en savoir pour apprécier pleinement Losing Alice et notamment son dénouement qui atteint des sommets de tension. Par sa mise en scène très esthétique et qui s’inspire volontiers d’un David Lynch, Sigal Avin signe une série aussi soignée formellement qu’intense sur le fond. Les huit épisodes se regardent d’une traite et le scénario déploie une montée en puissance remarquablement menée. La mini-série ne connaîtra pas de suite et c’est bien ainsi : ne passez pas à côté de Losing Alice.