Lupin, George Kay et François Uzan (Netflix)

Lupin n’était même pas sortie qu’elle énervait déjà tous les racistes bas de plafond. Imaginez donc, une série où Arsène Lupin interprété par Omar Sy, un acteur noir ! Il suffit pourtant de regarder quelques minutes de la dernière série Netflix française pour comprendre que l’acteur interprète un autre personnage qui s’inspire de celui créé par Maurice Leblanc pour ses propres vols. C’est un « gentleman cambrioleur » modernisé que nous proposent George Kay et François Uzan, un pari plus intéressant qu’une simple adaptation. Le résultat est une première saison partie bien trop courte — cinq épisodes ! —, mais fort sympathique. Lupin n’évite pas quelques clichés et facilités, mais elle ne se prend jamais trop au sérieux et bénéficie de sa simplicité pour s’en tirer honorablement. Vivement la suite !

Ce n’est pas Arsène Lupin qui est le héros de notre histoire, mais bien Assane Diop, fan du personnage de fiction qui a décidé de vivre selon ses préceptes. Comme lui, il vole les plus riches en utilisant des ruses et de multiples déguisements. Le premier épisode se concentre ainsi sur le vol du célèbre collier de la Reine lors d’une vente aux enchères au Louvre, un vol qui demande au héros de se faire embaucher par l’équipe de nettoyage de nuit pour le repérage, puis de volontairement s’endetter auprès de petits malfrats qui deviendront ses complices le soir de l’opération. Lupin montre comment ce gentleman agit, en se faisant passer pour l’acheteur du collier après s’être fabriqué une fausse identité de millionnaire. Le vol se fait au grand jour et selon un plan exécuté parfaitement, ce qui laisse la police dans le noir complet. Les cinq épisodes de la première saison se concentrent ainsi sur l’enquête menée par la police contre ce mystérieux homme qui semble insaisissable, mais aussi sur la vengeance d’Assane contre la famille qui a causé la mort de son père, vingt-cinq ans auparavant. Et en parallèle, il est aussi père de famille et tente d’accorder du temps à son fils Raoul et de reconquérir Claire avec qui elle est séparée. Un programme chargé qui n’est pas une excuse pour écrire un scénario complexe. Bien au contraire, la série de Netflix fait preuve d’une grande simplicité qui s’avère être un point fort. Les enjeux sont très clairs, chaque épisode avance dans une direction qui est évidente et on apprécie cette histoire directe et sans complications gratuites. Autre bon point, Lupin ne se prend jamais trop au sérieux, ce qui la sauve face à une avalanche de clichés. Le premier épisode les accumule tout particulièrement, entre le Paris touristique chargé d’attirer le public mondial du service de streaming et la cité de banlieue qui fait peur, la bêtise des malfrats concurrencée par celle de la police, l’indécence de la bourgeoisie… tout y passe. C’est un petit peu gros, et le fait que Louis Leterrier signe la réalisation des trois premiers épisodes n’arrange rien, mais c’est assumé et surtout compensé par la légèreté de l’ensemble. Rien n’est vraiment sérieux ici, ni les vols qui calquent les idées d’Arsène Lupin, ni l’enquête qui ignore systématiquement le seul policier qui a tout compris et encore moins le grand méchant de l’histoire, un riche homme d’affaires colérique délicieusement ridicule.

Si Lupin se prenait trop au sérieux, cette avalanche de clichés deviendrait insupportable. Mais la première partie est portée par un ton plus léger, une simplicité de bon aloi et une brièveté qui évite toute lassitude. Est-ce que la série pourra tenir la distance ? Difficile à dire, et on ne sait pas si Netflix a prévu plus qu’une saison divisée en deux parties. On verra ce que la suite nous réserve, mais ces cinq épisodes sont plaisants, à défaut d’être inoubliables. La relecture moderne de George Blanc est bien partie, reste à espérer que le cliffhanger final lance la deuxième partie de Lupin sur de bonnes bases.


Lupin, partie 2

(24 juin 2021)

Quelques mois après une première partie courte, pleine de clichés, mais qui avait le bon sens de ne pas se prendre trop au sérieux et qui s’avérait assez fun, Lupin est de retour. Netflix propose cinq nouveaux épisodes, c’est donc toujours aussi court, mais le rythme monte d’un ton, alors que la police parvient à mettre la main sur le célèbre voleur dans le premier épisode. Commence une longue course-poursuite qui culmine lors d’un concert, où Assane Diop veut dévoiler au monde entier que Peregrini est un le vrai sale méchant qu’il est. Une suite cohérente, mais le charme des débuts est rompu. Le scénario oublie la légèreté initiale et devient nettement plus sérieux, révélant d’autant plus toutes les faiblesses dans l’écriture des dialogues, la création des personnages et surtout les innombrables incohérences du côté de l’action. Résultat, on trouverait presque le temps long et même si cette deuxième partie reste ouverte pour une suite, on n’est pas sûrs de vouloir y revenir…

La police n’avait pas un rôle bien glorieux dans la première partie, c’est encore pire dans cette suite où le héros parvient à s’enfuir avec une facilité confondante. C’est le principe de la série, certes, mais Lupin joue systématiquement sur cette carte sortie de prison gratuite. Sans trop en dévoiler sur l’intrigue, le personnage passe bien trop régulièrement à deux doigts de se faire attraper et s’en sort avec un coup de baguette magique. À force, cela finit par devenir répétitif et surtout, comment instaurer un semblant de suspense si, quoi qu’il arrive, Assane parvient à s’en tirer sans problème ? La première partie s’en tirait mieux, parce qu’il fallait introduire les personnages et présenter le fonctionnement de son héros. Cette fois, tout est en place et il ne reste plus qu’à avancer l’intrigue principale, mais cette voie toute tracée est un piège pour la création de George Kay et François Uzan, car elle met en valeur les incohérences et la grosseur du fil rouge. Plus rien ne tient la route et surtout, on se désintéresse vite de ce qui se passe. Notre attention est plus dirigée vers les erreurs grossières, tout particulièrement les anachronismes des flash-backs de 1995, avec notamment une Zoé électrique qui passe au milieu d’un plan. Pour une série qui joue autant sur l’attention des spectateurs, au point d’en faire une brillante campagne marketing, c’est assez ironique de tomber dans ce piège.

Peut-être que le découpage en deux parties était une mauvaise idée et que Lupin aurait été plus appréciable en un seul bloc de dix épisodes. Peut-être aussi que le concept très simple des débuts ne pouvait pas tenir la distance et que la création de Netflix allait forcément finir par décevoir. Quoi qu’il en soit, ces cinq nouveaux épisodes ne sont pas aussi plaisants que les premiers et on a du mal à voir ce que la série pourrait faire pour nous donner envie de voir la suite.