Megamind, Tom McGrath

Megamind est la dernière création du studio Dreamworks, comme ne manque pas de le rappeler fièrement l’affiche en évoquant la série à succès Shrek. Sans surprise, ce film joue sur plusieurs tableaux, tachant de satisfaire la difficile contrainte de plaire à la fois aux enfants et à leurs parents. Disons-le, Megamind plaira plus aux plus jeunes : le film reste bien trop dans des cadres vus et revus pour convaincre pleinement. Film sympathique, mais qui s’oubliera vite.

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Megamind est bébé extraterrestre tout bleu qui rend sans doute ses parents extrêmement contents, jusqu’à ce que leur planète se trouve engloutie par un trou noir. Les parents décident alors de donner une seconde change au rejeton en l’envoyant dans une capsule à travers l’espace. Notre héros atterrit, comme on pouvait s’y attendre, sur la Terre. Mais Megamind n’est pas le seul rejeton à connaître ce sort : d’une planète voisine qui allait connaître le même sort, les parents de Metro Man l’envoient dans une petite capsule qui arrive aussi sur Terre. D’emblée, les deux capsules se font la guerre et alors que Metro Man arrive dans un foyer idéal, parfaite représentation de l’American Dream (et qui ne se demandent pas pourquoi un bébé qui vole a débarqué dans leur salon), Megamind débarque… dans une prison. Cette différence d’originale sociale va conduire les deux êtres à deux destins opposés. Il ne fait guère de doute que Metro Man va faire le bien quand Megamind tend au mal et les deux s’opposent ainsi au cours de multiples batailles qui, invariablement, se terminent par la victoire de Metro Man sur le méchant loser. Là n’est cependant pas le sujet du film : quand Megamind commence, c’est avec l’ultime combat entre les deux, combat qui se termine avec la mise à mort de Metro Man et la victoire éclatante de Megamind. Victoire qui le conduit à diriger toute la ville et imposer sa méchanceté et obtenir tout ce qu’il a jamais souhaité.

Comme tout superhéros moderne qui se respecte, Megamind est cependant un héros en proie aux doutes. Son constat est simple : sa vie n’a plus de sens sans un gentil à affronter. Il a tout désormais, mais à quoi bon se lever le matin si l’on n’a plus aucun objectif ? Bref, il déprime et regrette d’avoir tué son ancien ennemi, car, finalement, c’était beaucoup plus fun du temps de Metro Man. C’est alors qu’il décide de créer un nouveau superhéros gentil à affronter à partir de l’ADN de feu le sauveur de la ville. Son plan fonctionne à merveille sauf que, classiquement, sa créature lui échappe et Titan, c’est son nom, découvre que le rôle de gentil n’est vraiment pas marrant et qu’il est beaucoup plus fun d’être méchant. La grande idée de Megamind est ainsi le doute du héros traditionnel et les inversions entre gentils et méchants. Megamind autant que Metro Man sont des caricatures, ils sont jusque dans les moindres détails faits pour être ce qu’ils sont, tantôt le gentil invincible, tantôt le méchant savant fou, aussi intelligent qu’il peut être médiocre dans la méchanceté. L’idée est donc de jouer sur les attentes pour mieux les déjouer, les gentils devant les méchants et vice-versa. Le souci, c’est qu’une fois posée l’inversion, les habitudes reprennent le dessus et Megamind redevient un film très classique, avec même une histoire d’amour à la clé, un héros au grand cœur… la routine donc du blockbuster d’animation décalé comme on en a vu tant depuis Shrek.

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Sans surprise, l’humour est une composante essentielle de Megamind, mais on ne peut pas dire que ce soit très réussi. Le film est parfois amusant, mais rarement vraiment drôle. À dire vrai, le principal problème du film est sa date de sortie : fin 2010, on a déjà vu tous les gags des dizaines de fois et ils peinent à faire rire. Alors certes, inutile de le nier, on rit de temps en temps, certaines blagues sont efficaces comme le coup des affiches « No you can’t », mais tout cela ne va jamais très loin. Nounou, l’espèce de poisson rouge qui n’est d’ailleurs par rouge, a très clairement le rôle bien connu du personnage secondaire décalé, mais c’est un échec. L’idée est peut-être bonne sur le papier, mais dans les faits on s’ennuie un peu avec ce meilleur ami de Megamind extrêmement prévisible. Megamind manque cruellement de nouvelles idées, à part peut-être le sens du spectacle de son héros qui est assez amusant, surtout quand on passe d’AC/DC à un slow par erreur. C’est tout de même bien léger pour un film censé se construire en grande partie sur le ressort comique. Je dois néanmoins reconnaître que j’ai un problème de fond avec les deux interprètes français, que ce soit Kad Merad (Megamind) ou Franck Dubosc (Metro Man), un problème qui a indéniablement réduit le potentiel comique des deux personnages auxquels ils ont donné leurs voix.

Film d’animation assez classique, Megamind s’en sort bien, sans pour autant ne serait-ce que s’approcher du rendu d’un Pixar. Voulu ou non, le résultat est plus proche d’un dessin animé à l’ancienne, avec des traits et textures qui restent assez simples. Le résultat est dans l’ensemble très satisfaisant et la technique remplit bien son rôle de support à un récit, la démonstration technique n’étant jamais souhaitable. On regrette comme d’habitude que la version 3D assombrisse le tout sans apporter d’ajouts significatifs, même si la troisième dimension ne m’a pas autant gêné que pour d’autres films – je crois que l’on finit vraiment par s’habituer. Il y a bien quelques effets ici ou là, mais on pourra s’abstenir.

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Megamind est un film d’animation parfaitement calibré pour les fêtes de fin d’année, un film qui doit plaire autant aux enfants qu’à leurs parents. À en juger aux réactions de la salle pleine de jeunes spectateurs, le contrat est totalement satisfait pour les premiers. On reste plus dubitatif pour les parents : l’histoire qui inverse les rôles traditionnels de gentil et méchant était plutôt bonne a priori, mais une fois l’inversion effectuée, on retrouve les bons vieux schémas sans nécessairement plus d’intérêt. Le film semble aujourd’hui daté, son humour ne fait plus tellement mouche et on aimerait un peu de renouveau. Reste un film qui se regarde malgré tout sans déplaisir, parfait pour les séances en famille.