Miss Peregrine et les Enfants particuliers était à l’origine un roman fantastique publié pour les jeunes adolescents et adapté dans la foulée pour le cinéma. Ce premier long-métrage ne ferme aucunement la porte à une future saga et cela tombe bien, c’est une trilogie que Ransom Riggs, l’auteur, a déjà publiée. Autant dire qu’à ce stade, il n’y a rien de bien intéressant à y trouver, mais c’est Tim Burton qui réalise le film, ce qui suscite un petit peu d’intérêt. Malheureusement, le cinéaste n’a plus le talent de ses débuts et cela fait longtemps qu’il n’a pas réalisé une œuvre exceptionnelle. Miss Peregrine et les Enfants particuliers ne sera pas l’exception digne de ses premiers films, mais le réalisateur amène avec lui un petit peu de noirceur qui ne fait pas de mal, même si le résultat reste largement formaté pour les plus jeunes. Le bilan est mitigé, entre un univers visuel riche et plaisant et une intrigue simpliste qui ne passionne pas vraiment.

Tim Burton prend son temps avant de nous faire entrer dans un univers fantastique. La première partie se déroule ainsi dans notre monde, par la mort étrange d’Abe, le grand-père de Jake. Notre héros est un jeune adolescent qui était très proche de son grand-père et qui est traumatisé par sa mort. Il multiplie les rendez-vous chez une psychiatre, mais il entraîne finalement son père sur les traces d’Abe, sur une petite île au large du pays de Galle. Miss Peregrine et les Enfants particuliers aborde très vite la question du fantastique néanmoins, mais d’abord sous la forme d’histoires racontées par Abe. Sur l’île, le ton très mystérieux prépare toutefois à un basculement dans le fantastique total, quand Jake rencontre d’autres jeunes qui disent venir de 1943. Tim Burton introduit alors rapidement dans un univers surréaliste, où des enfants « particuliers », dotés de pouvoir comme les mutants de X-Men, sont protégés par une femme capable non seulement de se transformer en oiseau, mais aussi de manipuler le temps. Ils vivent pour toujours dans des bulles temporelles, une journée qui se répète à l’infini, en parallèle du présent. En l’occurrence, les enfants protégés par Miss Peregrine restent sur cette île, une journée de septembre 1943, juste avant un bombardement allemand. Chaque soir, ils reviennent au jour d’avant et restent ainsi pour toujours avec leurs pouvoirs, loin de la société et surtout loin du terrible M. Barron qui veut obtenir la vie éternelle en mangeant leurs yeux. Le cadre est posé et Jake peut débarquer pour sauver tout le monde, comme il se doit.

Il faut bien le reconnaître, l’intrigue déployée dans Miss Peregrine et les Enfants particuliers n’est pas très originale, pour ne pas dire qu’elle est même un petit peu barbante. On retrouve les thématiques habituelles et les passages obligés des romans récents écrits pour les ados, avec une histoire d’amour au cœur de l’histoire entre Jake et l’étrange Emma. Tout est un petit peu prévisible et le scénario porté au cinéma par Tim Burton tombe même parfois dans la facilité, avec plusieurs moments où la situation ne se débloque qu’au moment opportun, comme par hasard. La fin est particulièrement décevante à cet égard : évacuant la question fascinante des paradoxes du voyage temporel, le long-métrage se contente de réunir les deux tourtereaux en un tour de main. Aucune suite n’est encore prévue à ce jour, mais ce sera probablement le cas et on peut espérer que les scénaristes seront un petit peu plus inspirés. Pour autant, Miss Peregrine et les Enfants particuliers n’est pas totalement raté et c’est peut-être l’univers sombre et limite gothique de Tim Burton qui le sauve. Le cinéaste ne fait pas vraiment dans l’originalité, mais son identité visuelle est bienvenue dans le long-métrage qui aurait été bien lisse sans cela. Quelques scènes, à commencer par le combat de poupées réanimées par l’un des enfants particuliers, sont plus sombres qu’on ne l’imaginait dans un tel film. Et les monstres, qui semblent tout droit sortis de l’esprit de Guillermo Del Toro, sont plus impressionnants que la norme dans ce genre de films. De manière générale, le long-métrage est plus satisfaisant sur le plan visuel que sur le fond et on passe un bon moment malgré ses problèmes de scénario.

Tim Burton a vraiment perdu ce qui faisait l’intérêt de ses premiers films, mais le réalisateur s’en tire plutôt bien au fond avec cette adaptation. Miss Peregrine et les Enfants particuliers n’est pas un excellent long-métrage, mais ce n’est pas non plus la catastrophe que l’on pouvait craindre. Les plus jeunes y trouveront sans doute une histoire riche et plaisante, les adultes y trouveront peut-être en partie leur compte dans son univers bien ficelé, à défaut d’être original. C’est mignon et parfois même fun — l’attaque des monstres par les squelettes —, un divertissement gentil à voir effectivement en famille. Espérons que la suite des aventures de ces enfants particuliers sera meilleure, mais pour l’heure, le scepticisme reste de mise…