Conçue à l’origine comme un spin-off de The Office, cette nouvelle sitcom de NBC partage en effet de multiples points communs. Parks and Recreation adopte le même dispositif comique, à savoir un faux documentaire tourné sur le lieu de travail et les premiers épisodes peuvent ressembler à un clone un petit peu inutile. Mais tout comme Greg Daniels et Michael Schur ont rapidement abandonné l’idée de conserver l’univers de The Office pour créer une nouvelle série indépendante, cette sitcom de NBC trouve sa propre voie au fil des épisodes. Loin d’une redite, elle parvient à imposer son univers et surtout ses personnages et après sept saisons et 125 épisodes, elle s’impose même comme l’une des meilleures du genre. Parks and Recreation est drôle et elle est surtout attachante, avec un bon esprit qui est trop rare dans le genre et qui la distingue du reste. Un classique.
Parks and Recreation prétexte un documentaire sur le département des parcs et loisirs de Pawnee, petite bourgade de l’Indiana, pour poser ses caméras au milieu d’une bande d’employés municipaux. Au cœur du département, Leslie Knope est une employée dévouée et c’est peu de le dire : dès le départ, la sitcom la présente comme une femme brillante, organisée, bosseuse et surtout à l’optimisme inébranlable. Elle est persuadée que son métier est le meilleur au monde, elle est convaincue de l’intérêt de son action pour les citoyens et elle n’envisage pas une seconde de faire quoi que ce soit d’autre. Le contraste entre cette employée motivée et le reste du département est un gros moteur de l’humour dans toute la sitcom. À ses côtés, Tom Haverford cherche à en faire le moins possible, sauf si ça lui est bénéfique. Donna Meagle vient bosser ici faute de mieux et Ron Swanson, le directeur du département, déteste la politique et l’action gouvernementale et il veut en faire le moins possible pour aider sa communauté. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il engage April Ludgate comme stagiaire, elle qui refuse d’être là et revendique de ne rien vouloir faire. Comme toutes les séries comiques, Parks and Recreation commence avec des caricatures, mais épaissit le trait au fil des épisodes et des saisons. Greg Daniels et Michael Schur imaginent des personnages qui peuvent être résumés initialement à quelques traits grossiers et qui gagnent en crédibilité au fil du temps. L’exemple le plus flagrant concerne sans doute Ron Swanson, qui reste d’abord presque exclusivement à bouder dans son bureau, mais qui développe une psychologie riche surtout dans les dernières saisons. Ce n’est pas le seul cas toutefois, tous les personnages s’enrichissent avec les épisodes et quand la série se termine, on pourrait avoir l’impression de les connaître comme notre propre famille.
Cette richesse psychologique est la clé pour toute série réussie et à cet égard, la sitcom de NBC a particulièrement bien rempli son contrat. Parks and Recreation n’est pas la seule à y parvenir bien sûr, en revanche sa bienveillance à l’égard de ses personnages est plus originale. Même le souffre-douleur de la bande, Garry/Jerry/Larry/Terry Gergich, est gentiment maltraité et c’est un personnage positif par ailleurs. Leslie Knope est une femme haute en couleurs qui pourrait être facile à moquer avec ses classeurs pour tout et ses obsessions bizarres. Les scénaristes n’en font pas un sujet de méchantes plaisanteries toutefois et son intelligence, son dévouement ou ses raisons ne sont jamais remises en cause. Mieux, son sens du service public et son féminisme sont régulièrement salués et félicités. C’est le cas pour tous les personnages, de Ron Swanson qui s’avère être un grand cœur généreux sous sa carapace, à Andy Dwyer, un benêt qui se comporte comme un enfant capricieux, mais qui a toujours un bon fond. Ce traitement surprend face à l’humour plus caustique qui est la norme, mais il ne faut pas prendre Parks and Recreation comme une série niaise, toute en douceur et bonté. La cible de ses créateurs est davantage du côté de la société américaine, résumée et concentrée dans la ville fictive de Pawnee. Cette bourgade est un archétype et ce n’est pas glorieux : de son passé semé de morts, de racisme et de sexisme à son présent contrôlé par les lobbys de l’agro-alimentaire, il n’y a rien à sauver. C’est d’ailleurs un trait essentiel de l’humour de la création de NBC : Leslie Knope est une femme bien trop bonne et investie pour Pawnee, et pourtant elle n’a de cesse de présenter la ville comme la meilleure au monde. Ce n’est pas qu’une vue de l’esprit, elle est persuadée que c’est le cas et n’en changerait pour rien au monde, alors même que c’est un lieu plein d’obèses surtout bons à râler pour un rien, jamais prêts à agir pour aider. Au fond, même si Greg Daniels et Michael Schur ont signé une comédie qui semble légère et bon enfant, leur critique de la société américaine est acerbe et bien plus sérieuse qu’elle n’en a l’air.
Même s’il lui faut quelques épisodes pour trouver le bon ton, on peut être frappé à l’heure des bilans à quel point la sitcom de NBC a tenu la route sur la durée. Parks and Recreation ne faiblit jamais et parvient à toujours maintenir son ambiance et son humour, tout en offrant à ses personnages une épaisseur psychologique toujours croissante. C’est une belle performance, qui doit beaucoup à la qualité de l’écriture, mais aussi casting, avec en tête une mention toute spéciale pour Amy Poehler, l’interprète brillante de Leslie Knope. Il est évident que l’actrice a mis de sa personnalité dans son incarnation de cette femme politique, elle s’est investie et elle est toujours impeccable dans ce rôle. Mais tout le casting est à la hauteur, avec une autre mention qui s’impose pour Nick Offerman, bougon à souhait pour donner vie à Ron Swanson. Parks and Recreation n’a peut-être pas la renommée de The Office, mais elle mérite tout autant, si ce n’est plus, votre attention. Une série culte !