Une bande de jeunes en colocation, des épisodes de moins d’une demi-heure… en apparence, Please Like Me a tout de la sitcom déjà vue et revue. Ce serait une erreur de s’arrêter à cette apparence toutefois, parce que cette série australienne a beau manier l’humour et ressembler très souvent à une comédie, elle flirte constamment avec le drame et finit même dans une grande tristesse. Écrite et interprétée par Josh Thomas, cette série largement autobiographique est inclassable et c’est tout ce qui fait son charme et son intérêt. Please Like Me est une vraie réussite, notamment parce qu’elle parvient à surprendre à partir d’une base conventionnelle. Ne passez pas à côté, mais ne la regardez pas pour vous remonter le moral, elle aura exactement l’effet opposé.
La toute première scène pose le décor : Josh, la vingtaine, mange une glace avec Claire, sa copine. Cette dernière lui annonce son intention de rompre et lui explique qu’il est gay. Le personnage principal de Please Like Me ne veut pas y croire, mais se rend vite à l’évidence et la première saison, très courte avec ses six épisodes de 25 minutes, se concentre largement autour de son coming-out et de son premier copain. L’intrigue reste alors extrêmement conventionnelle, mais Josh Thomas parvient déjà à instiller un humour assez spécial, très sombre et parfois même cassant. Il faut dire que dès le premier épisode, la mère de Josh, Rose, tente de se suicider, ce qui n’est pas ce que l’on attendait d’une comédie légère. Les personnages imaginés par le jeune comédien sont tous très tranchés, mais dès le départ, la finesse de l’écriture est évidente. Ils sont tous parfois dans les clichés, mais ils ne résument jamais à une caricature facile, ils ont tous une complexité qui les rend passionnant. C’est le cas du héros et de sa gestion difficile de son homosexualité ainsi que de son humour souvent gênant. C’est le cas de ses parents divorcés qui constituent l’un des couples les plus improbables qui soient. C’est le cas de sa tante, un personnage haut en couleur qui se révèle vite plus riche qu’on ne le pensait. C’est le cas de Tom, son colocataire qui n’arrive pas à se débarrasser d’une copine (et qui est interprété par Thomas Ward, le vrai ami de Josh Thomas). Et même de Geoffrey, le petit ami très entreprenant qui montre vite qu’il n’a pas qu’un corps bien dessiné pour lui. Dès cette première saison un petit peu trop brève, Please Like Me a déjà bien plus à faire valoir qu’une banale sitcom et même si le ton reste globalement léger, la noirceur est déjà là et elle n’est pas du tout ignorée.
Au fil des saisons, c’est la noirceur qui l’emporte de plus en plus. Sans en dire trop sur l’intrigue et ses rebondissements, disons simplement que Josh Thomas n’a jamais l’intention de rester sur la comédie légère et le drame n’est jamais loin. Please Like Me enchaîne les échecs amoureux pour son héros et même si Arnold est le petit ami dans une bonne partie des épisodes, son histoire avec Josh n’est jamais simple. C’est la même chose pour Thomas, mais le principal moteur du drame vient certainement de Rose envoyée en clinique pour se reposer. À partir de ce moment, la série déraille de la comédie et s’intéresse beaucoup plus à la dépression et aux malades. L’auteur garde son humour très noir et il trouve le moyen de faire rire au cœur d’un hôpital psychiatrique, mais il n’oublie jamais aussi les difficultés de ces malades qui luttent tous les jours contre leur humeur. Plus encore que dans une comédie qui peut se permettre des écarts vers la caricature, ces séquences psychologiques exigent une écriture précise et Josh Thomas prouve à moins de trente ans qu’il a déjà un grand talent. Ses personnages sont tous très bien écrits et l’intrigue est plaisante d’un bout à l’autre. Même quand le drame vient frapper au cœur, Please Like Me trouve toujours le moyen de faire rire et il fallait un scénario extrêmement fin pour y parvenir. Le résultat doux-amer est la véritable originalité de cette série, sa réussite aussi : son concepteur a trouvé un ton juste et créé des personnages attachants et étonnamment réalistes, qu’ils soient drôles ou tristes.
On pensait regarder une sitcom de plus, ou bien un Looking australien (ce qui est vraiment injuste, puisque cette série a commencé un an avant), Please Like Me s’avère finalement bien plus surprenant. Josh Thomas manie un humour très noir, qui vise là où cela fait mal et le fait bien, mais surtout, qui n’hésite pas à mêler humour et drame. La dépression ne fait pas peur à ce comédien qui n’hésite pas à la regarder en face et la montrer sans détour, pour faire rire, oui, mais aussi pour la montrer telle qu’elle est, souvent terrible et destructrice. C’est cette dualité qui est passionnante et qui permet à Please Like Me de se distinguer de la masse. Étonnante et plaisante, une série à découvrir !