Queer Force, Gabe Liedman (Netflix)

James Bond, mais gay, voilà le point de départ de Queer Force. Cette série d’animation créée par Gabe Liedman imagine une force spéciale au sein de l’« AIA », une agence américaine d’espions qui affiche son ouverture et inclusivité tout en bloquant la carrière de l’agent Maryweather, pourtant meilleur de promotion, suite à son coming-out. Envoyé à West Hollywood, il reste pendant dix ans à ne rien faire avec son équipe, avant enfin de connaître son heure de gloire et ses premières missions. L’idée est intéressante et on sent qu’il y a des homosexuels au scénario, mais Queer Force se contente trop souvent de rejouer des clichés éculés qui peinent à faire sourire. Si l’on applaudit l’ambition, l’effort pour inclure un spectre LBGTQ élargi ou encore le casting queer, on ne peut que regretter un résultat daté et pas très drôle.

L’équipe qui se fait nommer « Q-Force » au sein de l’agence est composé de cinq membres principaux, autour de « Mary », l’agent recalé à cause de son orientation sexuelle. Il a rassemblé une équipe atypique, avec un autre gay, espion le jour et drag-queen la nuit ainsi que deux lesbiennes. Le créateur de la série a voulu inclure le maximum de personnalités, ce qui est une bonne chose, mais le résultat ressemble hélas à un concours de clichés. Entre le gay musclé qui ne pense qu’à son corps, la lesbienne garagiste assez forte, le drag-queen un petit peu efféminé et l’autre lesbienne geek, on a un sacré étalage de lieux communs. D’autres personnages secondaires ouvrent un petit peu l’horizon, avec le petit ami de Mary barbu et fort façon bear, mais il n’en reste pas moins que ces personnages ont du mal à se hisser au-dessus de ces caricatures. Queer Force n’essaie même pas de les en sortir, la série assumant la collection de clichés, comme en témoigne le personnage de Buck, seul hétéro de la bande et qui est lui aussi résumé en quelques traits simplistes. C’est un parti pris, mais qui réduit l’intérêt porté à l’intrigue, d’autant que celle-ci ne brille pas non plus par son originalité. Après tout, c’est une série animée, avec un trait volontairement peu réaliste et une mise en scène toujours outrancière. Les scènes d’action sont bien rendues et le divertissement est au rendez-vous, mais que reste-t-il après les dix épisodes d’une vingtaine de minutes qui composent la première saison ? Ni les personnages caricaturaux et simplistes, ni l’intrigue banale au possible, tout iau plus le plaisir de voir les clichés sur l’espionnant détournés par l’homosexualité — mention spéciale pour la lutte entre Mary et Buck pour séduire un autre homme dans le cadre d’une mission. Ce n’est pas si mal, certes, mais on pouvait attendre davantage d’une série qui voulait précisément renouveler un classique.

À l’arrivée, Queer Force reste un divertissement sympathique, surtout si l’on partage l’orientation sexuelle des créateurs, il y a quoi s’amuser avec toutes les références et clins d’œil qui s’accumulent dans chaque épisode. Malgré tout, on ne peut s’empêcher d’être déçu par le traitement vieillot des personnages et le manque d’originalité de l’ensemble. Gabe Liedman aurait pu offrir bien plus que ces poncifs déjà vus mille fois ailleurs et qui sont si souvent synonymes d’homophobie latente d’ailleurs. Rien de tel ici bien évidemment, mais on aurait préféré une série qui se libère des lieux communs pour suivre sa propre voie, dommage.