Quicksand, Pontus Edgren et Martina Håkansson (Netflix)

Une fusillade dans un lycée et le procès qui suit. Si Quicksand se déroulait aux États-Unis, on ne s’y intéresserait probablement qu’à peine, mais cette création de Netflix se passe en Suède. Adaptée d’un roman qui a connu un énorme succès dans le pays, cette série de Pontus Edgren et Martina Håkansson s’intéresse à Maria, jeune adolescente retrouvée dans la salle de classe où la fusillade a eu lieu et soupçonnée très vite de complicité ou pire. Quicksand n’est pas très originale, mais le scénario est extrêmement bien ficelé et l’interprétation impeccable. Les six épisodes sont intenses et l’ensemble mérite bien le détour.

Le scénario se construit autour de deux axes temporels : l’intrigue suit principalement l’emprisonnement et le procès de Maria après la fusillade, mais les multiples flashback permettent de reconstituer peu à peu ce qui s’est déroulé exactement. C’est un procédé extrêmement classique dans ce genre d’histoires, mais quand il est bien mené comme c’est le cas ici, c’est un procédé qui fonctionne pleinement. Le spectateur est perdu au départ entre cette classe sanglante qui ouvre le pilote et la réalité de ces lycéens suédois aisés, qui semblent avoir tout pour eux. On remonte le temps d’un an, jusqu’au moment où avant la rentrée de la terminale, Maria et Sebastian commencent à sortir ensemble. Elle vient d’une famille aisée, mais lui est le fils d’un richissime homme d’affaire, qui partage son temps entre une immense maison avec piscine et vue mer, un yacht en Méditerranée et pourquoi pas une partie de chasse en Afrique du Sud. Sebastian vient au lycée en Porsche décapotable et il passe ses soirées dans des clubs, où l’alcool coule à flot et la drogue circule librement. Il entraîne Maria, jeune fille studieuse et très sage jusque-là, dans son univers et elle s’épanouit jusqu’au moment où elle se sent étouffer. C’est là que leur histoire commence à dérailler, alors que l’instabilité psychologique de Sebastian éclate au grand jour, mais tout cela est révélé très progressivement et on est pendant un long moment dans le noir.

C’est une excellente idée, qui est par ailleurs très bien mise en place par les scénaristes. Quicksand porte bien son titre : on sent que la jeune fille est prise au piège dans des sables mouvants qui l’attirent inexorablement. Elle est fascinée par Sebastian et c’est elle qui choisit de le suivre, mais son entourage ne l’aide pas du tout quand elle en a besoin et tout le monde porte sa part de responsabilité. Les parents sont constamment absents, ou pas présents comme ils le devraient et même ses amis ne sont pas là pour elle. Pontus Edgren et Martina Håkansson dressent un portrait assez peu flatteur de la Suède, souvent érigée en modèle, mais cette population aisée est présentée comme étant violente, insouciante sur tout et notamment le plan écologique, et complètement à la ramasse sur le plan psychologique. La violence des relations entre Sebastian et son père fait froid dans le dos et ces scènes intenses sont particulièrement convaincantes. Quicksand peut compter sur des dialogues finement écrits, mais aussi sur un casting parfait, à commencer par Hanna Ardéhn, bluffante dans le rôle principal.

Quicksand prouve à nouveau qu’une œuvre n’a pas besoin d’être originale pour plaire. Cette histoire de fusillade dans un lycée est hélas plus banale qu’on l’aimerait dans notre monde, et le scénario qui reconstitue les événements du passé par une série de flashbacks est déjà vu et revu. Malgré tout, la création de Pontus Edgren et Martina Håkansson reste passionnante de bout en bout, et particulièrement intense et prenante sur la fin. Une belle réussite.