Très vaguement inspiré d’une histoire vraie, Split exploite le trouble dissociatif de l’identité, peut-être mieux connu sous le nom de trouble de la personnalité multiple, à son paroxysme. Si un individu peut contenir plusieurs personnalités différentes et qui ne communiquent pas, est-ce que chaque personnalité peut avoir des réactions physiques différentes ? Le corps peut-il s’adapter à une personnalité diabétique et vraiment souffrir de diabète ? Et si l’une des personnalités pense être un surhomme, le devient-il ? M. Night Shyamalan invente un homme aux 23 personnalités pour construire un thriller psychologique très classique, mais qui sait être efficace pour monter une tension. Malheureusement, le traitement grossier de cette maladie et un final de superhéros grotesque gâchent un peu la fête. Split était construit sur une excellente base, mais il n’est qu’un petit film que l’on oubliera vite, dommage…
M. Night Shyamalan ne perd pas de temps et il introduit très vite son histoire avec le kidnapping de trois jeunes filles par un jeune homme qui les enferme dans un lieu étrange. Très vite, on s’aperçoit que cet homme souffre d’un trouble de la personnalité : il est tantôt très méticuleux et obsédé par la propreté, tantôt au contraire très féminin et même travesti et à un autre moment, il se comporte comme un enfant. Split ne propose pas un traitement très subtil de cette maladie bien réelle, il faut reconnaître toutefois que cela fonctionne bien, essentiellement grâce au talent de James McAvoy. L’acteur n’incarne pas à l’écran toutes les personnalités de son personnage, mais au moins cinq ou six et il est excellent pour passer de l’une à l’autre. Quand on a vu une personnalité une fois, on la reconnaît ensuite instantanément, en partie à cause du costume et des accessoires naturellement, aussi parce que le jeu de l’acteur évolue. À défaut d’être finement mené, l’efficacité est bien au rendez-vous et M. Night Shyamalan donne le sentiment de maîtriser cette maladie et d’en livrer une vision vulgarisée, certes, mais malgré tout assez juste. Cette idée que la multiplication des personnalités, loin de constituer une faiblesse, renforce en fait cet homme en faisant davantage travailler son cerveau est très intéressante et le cinéaste aurait pu creuser dans cette direction. Malheureusement, ce n’est pas le cas et Split est avant tout un thriller extrêmement conventionnel. La réalisation est à la hauteur, avec un bon niveau de stress et quelques scènes prenantes, rien à dire de ce côté. En revanche, l’intrigue se résume finalement en quelques lignes et elle enfile les clichés, notamment avec cette fille qui est mise à part par le scénario à coups de flashbacks un peu lourdingues. On comprend qu’elle va jouer un rôle important et l’histoire peine à s’éloigner d’un cadre très classique. Et quand elle le fait à la fin, avec cette dérive vers le fantastique pur, ce n’est pas une très bonne surprise. Le cinéaste entend apparemment donner une suite à Split qui serait aussi une suite à Incassable et la dernière scène donne le sentiment qu’il s’inspire des sagas de superhéros façon Avengers… et là on se demande : mais pourquoi ? N’y avait-il pas une meilleure voie, plus psychologique peut-être ?
Split était un projet passionnant, M. Night Shyamalan en sort un thriller psychologique assez bien réalisé dans l’ensemble, mais simpliste et un petit peu grossier. Outre la représentation, encore une fois…, d’une maladie psychologique sous un angle exclusivement négatif et dangereux, le long-métrage tombe dans la facilité avec cette piste surnaturelle un peu facile. Il aurait été beaucoup plus intéressant de creuser la piste évoquée par la psychologue, mais il aurait fallu oublier cette montée en puissance du thriller. Split aurait été un film très différent et peut-être davantage mémorable. En l’état, c’est un divertissement pas déplaisant, oublié aussitôt vu.