Spy, Paul Feig

Avec Spy, Paul Feig retrouve sa comédienne fétiche — c’est sa troisième collaboration avec Melissa McCarthy —, mais cette fois, ce n’est pas pour se moquer du mariage, pas pour parodier le FBI, mais… la CIA. Ou plutôt l’espionnage, puisque ce long-métrage est une parodie à peine déguisée de la saga James Bond, ce qu’il prouve en commençant par une séquence d’action spectaculaire suivie d’un générique qui évoque nécessairement ceux de l’agent OO7. C’est un choix assumé de la part du cinéaste, qui l’exploite pour une comédie pas toujours très légère, ce n’est pas sa marque de fabrique, mais pas si stupide non plus. Spy est une œuvre presque féministe, où seules les femmes ont un rôle important à jouer et où les hommes ne servent qu’à jouer les gros durs qui n’assument pas derrière. À condition d’accepter l’humour un peu lourdingue de Paul Feig, c’est une comédie divertissante et très plaisante !

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On le disait, Spy commence avec une séquence d’action qui a deux fonctions : en mettre plein la vue d’entrée de jeu, mais aussi présenter le personnage principal dans son quotidien. En l’occurrence, Susan Cooper est une agente de la CIA, mais elle ne va jamais sur le terrain. Non, elle travaille dans un sous-sol de l’agence, d’où elle surveille un agent sur le terrain, le véritable espion, Bradley Fine. Incarné par Jude Law, il est l’archétype même de l’espion anglais distingué et extrêmement compétent, un clone presque parfait du personnage de James Bond. Et il est distingué, mais aussi élégant et mignon et Susan, depuis sa cave, tombe inévitablement amoureuse. Oui, mais voilà : celle femme ronde et un peu gauche passe totalement sous le radar de cet agent qui enchaîne probablement les conquêtes. Paul Feig place ses deux personnages avec la subtilité d’un pachyderme et toute cette partie est grossière, un petit peu trop peut-être. Fort heureusement, Spy est sauvé par une astuce de scénario : au cours de l’une des missions, Fine est laissé pour mort et c’est Susan qui est envoyée par la CIA pour enquêter sur les responsables. Ou plutôt la responsable, car tous les personnages principaux sont féminins dans cette comédie.

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L’intrigue imaginée autour d’une tête nucléaire revendue à des terroristes n’a, il faut bien le dire, aucun intérêt et Paul Feig ne s’y intéresse qu’à peine. Le cœur de Spy, ce n’est pas tant l’excuse pour rassembler toutes ces femmes le temps d’une histoire folle, c’est le rassemblement. Dans le rôle principal, Melissa McCarthy est tout simplement parfaite : l’actrice prend manifestement énormément de plaisir à jouer cette espionne qui se rêve en agent secret classe, mais à qui l’on ne confie que des missions de surveillance dans la peau de femmes banales, pour en rester à un euphémisme. L’humour repose souvent sur le décalage entre la femme projetée par son entourage et supérieur et celle qu’elle est vraiment, une redoutable combattante qui se sort toujours des pires situations et qui est, il faut le dire, la seule bonne agente du film. À ses côtés, Jude Law est très bien, mais on retient surtout un Jason Statham dans le rôle d’agent macho qui considère toujours que sa collègue va échouer, alors que c’est elle qui le sauve de toutes les situations. C’est un pied de nez plutôt bien vu à ses rôles habituels et on peut maintenant le dire : l’acteur est bien meilleur dans ce second degré que dans ces rôles habituellement trop sérieux.

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Paul Feig ne restera pas dans les annales avec ses comédies lourdes, c’est incontestable, mais il faut aussi reconnaître qu’il signe un divertissement très amusant. Spy regorge de gags qui font souvent mouche, mais le film oscille aussi constamment entre la parodie et l’hommage au genre. Le résultat est très plaisant et Melissa McCarthy justifie à elle seule de regarder ce long-métrage qui rappelle qu’un peu de second degré, même lourdingue, ne fait jamais de mal.