St. Vincent n’a pas bénéficié de sortie en salles, la faute à une chronologie des médias qui aurait empêché Netflix, son distributeur, de le proposer à ses abonnés pendant trois ans. Le premier long-métrage réalisé par Theodore Melfi aurait pourtant mérité plus d’attention : cette comédie très sympathique portée par un Bill Murray en pleine forme est une réussite. Ce n’est pas un grand film, mais il n’en a pas non plus l’ambition et si l’on pourrait lui reprocher un scénario un peu convenu, force est de constater que St. Vincent est très plaisant, tour à tour drôle et touchant. Un joli film, à découvrir.
Le talent de Bill Murray n’a plus être prouvé et cet acteur excelle depuis des années dans un registre à part, comique, certes, mais systématiquement assombri par une tristesse infinie, voire de la mélancolie. Le rôle de Vincent imaginé par Theodore Melfi semble avoir été conçu pour lui : ce vieil homme ne semble plus vivre que porté par l’alcool, il n’a plus aucun plaisir dans la vie et se laisse vivre en attendant la mort. Quand St. Vincent commence, ce personnage n’est pas beau à voir et l’acteur l’incarne à la merveille. Dans la maison à côté de la sienne, une mère et son fils, Oliver, viennent s’installer : elle fuit un mari volage et lui un garçon gringalet, manifestement très intelligent, mais peut-être un peu trop pour son bien. D’ailleurs, le premier jour dans sa nouvelle école se passe mal, ses nouveaux camarades de classe lui volent ses affaires et il est bloqué hors de chez lui, à attendre sa mère qui travaille tard pour joindre les deux bouts. C’est pour cette raison qu’Oliver va frapper à la porte de Vincent et même s’il est mal accueilli par l’homme bougon, il est malgré tout accueilli. La suite est assez convenue, mais bien mené : sans perdre de temps, Theodore Melfi déploie son récit avec des pointes d’humour en permanence, mais aussi une émotion qui va grandissante. Si St. Vincent a un peu tendance à trop en faire par moment — la cérémonie qui sanctifie Vincent en est un bon exemple —, le film se rattrape en ne s’attardant jamais sur ces scènes qui ne sont jamais larmoyantes, mais aussi grâce à ses acteurs, tous très bons. Le jeune Jaeden Lieberher est très convaincant, mais on retiendra surtout Naomi Watts, méconnaissable en prostituée d’Europe de l’Est et Melissa McCarthy, parfaite dans ce rôle plus sérieux que ceux qu’on lui connaissait souvent. Et puis si le film devient plus sérieux vers la fin, il n’en oublie pas totalement son impertinence pour autant, jusqu’au délicieux générique de fin.
Sans prétendre au chef-d’œuvre, le premier film de Theodore Melfi est une réussite qui mérite d’être vue, surtout si l’on est fan de son principal acteur naturellement. On pourrait arguer que Bill Murray joue un peu toujours le même rôle, mais il est si bon dans la peau de ce Vincent que l’argument ne tient pas. Et puis il n’est pas seul : St. Vincent est une solide petite comédie, avec quelques scènes très drôles, d’autres plus émouvantes. Si vous êtes abonné à Netflix, ne ratez pas ce film indépendant vraiment très plaisant, à défaut d’être très original.