Si Twin Peaks: Fire Walk with Me évoque la dernière semaine de Laura Palmer, il ouvre en fait sur une autre affaire suivie par le FBI. Évoquée par Dale Cooper dans Twin Peaks, cette affaire concerne la mort de Teresa Banks, une jeune femme de l’âge de Laura. La lettre placée sous l’ongle et enfin l’arrivée de Dale Cooper qui reprend l’affaire suite à la disparition d’un premier enquêteur : quand on a vu la série, on se retrouve en terrain connu, avec des informations qui n’étaient pas au centre des épisodes, mais qui ajoute un éclairage à l’ensemble. En effet, David Lynch semble partir sur tout autre chose avec cette histoire de Teresa Banks, mais il finit par tisser des liens entre les deux affaires. Passée cette introduction, le film revient d’ailleurs à Twin Peaks, que l’on retrouve presque telle qu’on l’avait laissée. Presque, car la petite ville est bien réduite dans Twin Peaks: Fire Walk with Me. On se concentre désormais sur Laura, toujours interprétée par Sheryl Lee, et Donna, qui a changé de visage — c’est désormais Moira Kelly qui interprète la meilleure amie. On suit aussi Bobby, James, les parents de Laura et quelques personnages encore, mais le casting a été singulièrement réduit. Malheureusement, ce n’est pas un choix assumé du réalisateur, mais une contrainte liée aux désistements des acteurs, déçus par la fin de la série. Quoi qu’il en soit, la ville imaginée par David Lynch et Mark Frost semble bien vide ici, et on a un peu de mal à croire à cette préquelle. Les personnages principaux de cette histoire sont censés être des lycéens, mais on y croit encore moins que dans la série. Dans les couloirs d’un lycée, ces hommes et ces femmes qui se droguent et baisent tout au long de journée ne sont absolument pas crédibles. Par ailleurs, Twin Peaks: Fire Walk with Me place Laura au centre, et c’est l’occasion de découvrir que Sheryl Lee n’est pas une très bonne actrice. L’ensemble fonctionne assez mal au fond, et le réalisateur semble en avoir conscience. Pour ne pas que cela se voit, il noie son intrigue sous un flot de fantastique parfois audacieux, mais le plus souvent un peu ennuyeux. À l’image des scènes de sexe et même de viol explicites, l’ensemble paraît gratuit et on peine à se passionner pour ces personnages, alors que l’on rêvait d’en savoir plus sur leur histoire.
Twin Peaks: Fire Walk with Me n’est pas vraiment la conclusion attendue pour la série culte, mais ce n’est pas non plus un film extraordinaire si on le considère pour lui-même. Certes, on retrouve quelques traits caractéristiques du travail de David Lynch, mais les délires outranciers n’ont plus aucun sens ici, alors qu’ils constituaient bien une mythologie dans Twin Peaks. Au total, ces 2h15 n’apportent quasiment aucune réponse supplémentaire à la série, et elles n’ajoutent rien à la série. L’ambiance de mystère qui entourait tous les épisodes, même les derniers, a un peu disparu, la magie ne fonctionne plus. Pour quelques réponses de plus, on peut regarder l’heure supplémentaire de scènes coupées (disponible sur l’intégrale Blu-ray prestige), mais on peut aussi en rester à Twin Peaks et ses mystères sans réponses. On sait aujourd’hui que ni David Lynch, ni Mark Frost ne comptaient donner le nom de l’assassin et au fond, peut-être que la série aurait été encore meilleure ainsi. Dans tous les cas, Twin Peaks: Fire Walk with Me n’apporte rien d’essentiel…