Where is my Mind

The Leftovers est une série résolument à part pour son idée si étrange et surtout si forte1, mais aussi pour sa musique. Composée par Max Richter, la bande originale de cette série est d’une puissance émotionnelle rare, elle n’est pas joyeuse, mais elle emporte dans un tourbillon d’émotions avec une force à laquelle on peut difficilement résister. Dans la deuxième saison, le thème principal imaginé par le compositeur germano-britannique a été repris sur un mode légèrement différent au fil des épisodes, mais il y a eu un ajout significatif. « Where is My Mind ? », le tube des Pixies, fait son apparition dès le deuxième épisode, dans une séquence qui semble n’exister que pour s’accorder parfaitement au morceau. C’est un moment déjà très intense, mais ce n’est rien à côté de ce qui attend le spectateur dans l’épisode suivant, où une scène avec deux autres personnages centraux lui fait écho. Et si c’est à nouveau le titre des Pixies qui est repris, la série opte pour une autre version, celle de Maxence Cyrin.

Comment rester insensible face à ces images d’une tristesse folle, sans paroles et portées par cette reprise toute simple des Pixies, mais qui, par l’action seule du piano, prend une tout autre dimension ? La scène aurait fonctionné de toute manière, mais en l’accompagnant de cette musique qui la lie à la séquence de l’épisode précédent, The Leftovers atteint des sommets d’émotion, en tout cas pour moi. Et quand le titre de Maxence Cyrin revient, quelques épisodes plus tard, le souvenir de sa musique associée aux images de la série est resté ancré profondément en moi. Renseignements pris, ce morceau si simple et si parfait est l’œuvre d’un compositeur français, un pianiste qui s’est spécialisé dans les reprises au piano seul. « Where Is My Mind (The Pixies Piano Cover) » est d’ailleurs le premier titre de Novö Piano, un album sorti en 2009. On y retrouve aussi des reprises de Daft Punk, de Justice ou encore de Nirvana et quelques-unes sont très réussies, mais aucune ne me reste en mémoire autant que cette relecture de Pixies. Elle ne dure même pas trois minutes, mais cela suffit à créer une ambiance presque hypnotique et on a souvent du mal à s’en sortir, à ne pas rejouer, en boucle, ce titre.

maxence-cyrin

La reprise est très réussie, mais honnêtement, au-delà du morceau seul, c’est son association avec les images de The Leftovers qui incrustent ces notes dans la mémoire, probablement pour longtemps. La meilleure preuve, c’est que la série de HBO n’est pas la seule à avoir exploiter ce morceau en 2015 : Mr. Robot l’a aussi utilisé dans l’un de des épisodes de sa première saison. J’aimerais dire que je le savais, mais c’est faux : je l’ai appris en voulant en savoir plus sur Maxence Cyrin et sur sa reprise. Pourtant, je n’en ai aucun souvenir, ce qui ne veut pas dire que c’était une mauvaise série, mais plutôt qu’elle ne jouait pas sur la même émotion. Et de revenir à la musique : si The Leftovers marque tant, c’est probablement grâce à Max Richter et ses compositions exceptionnelles, souvent aussi très dépouillées, parfois avec un seul piano. Depuis la première saison, j’ai essayé d’écouter au maximum ses compositions et j’ai découvert un univers souvent triste, toujours magnifique. Au-delà des bande-originales, From Sleep est exceptionnel. Il est aussi moins accessible, mais il mérite un petit effort pour l’écouter quelques fois et mieux l’appréhender, le jeu en vaut la chandelle. Ou alors commencez par Memoryhouse et The Blue Notebooks, ses deux premiers albums où l’on retrouve déjà en gestation les thèmes de The Leftovers.

Le plus dur maintenant, ça va être de sortir de ces morceaux écoutés en boucle. Surtout de ces deux minutes quarante six de piano qui revisitent un classique de la pop avec une simplicité qui n’a d’égal que sa justesse.


  1. Si vous n’avez pas vu la série, arrêtez tout, prenez le temps de voir l’intégralité et revenez. Rappelons son idée de base toutefois : un beau jour, 2 % de la population mondiale disparait du jour au lendemain, sans raison. La série ne raconte pas l’histoire des disparus toutefois, mais celle des survivants, ceux qui sont restés.