World Invasion : Battle Los Angeles, Jonathan Liebesman

Certains titres de films sont mystérieux, font référence à un point de détail ou ne peuvent être compris qu’en regardant le film. D’autres, à l’image de World Invasion : Battle Los Angeles ne laissent, au contraire, aucune place au doute. Le film de Jonathan Liebesman est un film de guerre au cœur de Los Angeles. Dire cela, c’est en gros résumer les deux heures du long-métrage : autant le savoir avant d’entrer en salle, vous aurez de la baston et tous les détails annexes seront insignifiants. Le tout forme un blockbuster assez efficace, mais aussi téléphoné que vite oublié…

World invasion battle los angeles

D’emblée, World Invasion : Battle Los Angeles prend les spectateurs par les tripes avec une mise en bouche sur fond de journaux télévisés catastrophés. Par un beau matin d’un jour quelconque en 2011, une pluie de météorites s’abat en différents points de la surface terrestre, à proximité d’une vingtaine de grandes villes. Des météorites ? que nenni, il s’agit en fait, on le comprend vite, de vils envahisseurs venus de l’espace. Ces extra-terrestres ne sont pas à ranger dans la catégorie des visiteurs amicaux venus découvrir notre civilisation, ils sont là pour coloniser la terre et récupérer ainsi sa plus précieuse ressource, l’eau. Et comme tout bon colonisateur qui se respecte, l’envahisseur décime toute forme de vie humaine avant de s’installer1. Quand le film commence, on apprend que la plupart des grandes métropoles sont déjà tombées. Aux États-Unis (ce qui revient à dore dans le monde entier), la seule ville encore debout, c’est Los Angeles. Et Los Angeles ne doit pas tomber, il en va de la survie des États-Unis (et donc du monde entier) ! Vous l’aurez compris, c’est une lutte à mort qui s’annonce. Les bestioles de l’espace sont là pour nous tuer, donc c’est nous ou les bestioles, comme le rappelle judicieusement un lieutenant en début de film.

World Invasion : Battle Los Angeles suit une poignée de marines partis sauver une autre poignée de civils restés près du littoral. Le souci, c’est que l’histoire est placée sur des rails au début du film, et qu’elle ne déviera jamais, si bien que l’on pourrait l’écrire avant même la séance. Sans surprise, une bonne partie des soldats mourra dans d’atroces souffrances, certains bêtement, d’autres en héros. Sans surprise aussi, le héros survit et il va évidemment se trouver au bon endroit au bon moment et avoir la bonne idée à ce même instant pour gagner la bataille. Tout ceci est très téléphoné et si vous avez déjà vu des films de guerre, vous saurez déjà tout de celui-ci. Même le choix du lieu paraît caricatural, même si on est presque déçu de ne pas avoir de plans de la colline Hollywood en flammes. World Invasion : Battle Los Angeles est non seulement un film convenu dans son scénario, mais c’est aussi une ode aux marines et aux États-Unis qui pourrait faire une excellente caricature, si elle n’était pas au premier degré. C’est bien simple, on a un peu l’impression de voir un film de propagande en faveur de l’armée : engagez-vous, vous allez en chier, certes, mais vous allez sauver votre pays et ça, les jeunes, c’est génial. Fort heureusement, World Invasion : Battle Los Angeles a la bonne idée de se concentrer sur ses quelques soldats et d’éviter une mise en perspective douteuse qui aurait pu confronter soldats et politiques, par exemple.

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La force du film de Jonathan Liebesman est peut-être sa modestie. World Invasion : Battle Los Angeles n’essaie pas de la jouer fine avec son sujet, il a une idée et une seule et il l’a suit modestement de bout en bout. C’est à la fois un point fort et sa principale limite. Côté pile, World Invasion : Battle Los Angeles constitue un film de guerre qui ne manque pas d’efficacité et s’avère assez prenant. L’originalité n’est pas son point fort, mais dans le genre il fonctionne plutôt bien, avec une tension régulièrement relancée, quelques effets de surprise bien placés et des scènes vraiment violentes. Celui qui est venu pour voir un blockbuster en aura pour son argent, World Invasion : Battle Los Angeles a de l’action à revendre et Jonathan Liebesman s’avère efficace. Côté face, l’aspect science-fiction du film a été totalement passé à la trappe. La science-fiction a souvent été une excuse pour des récits plus généraux, mais elle manque ici à l’appel. On s’en fiche que les envahisseurs viennent de l’espace : la seule originalité de ces ennemis, c’est que leur organe vital est situé à droite et non à gauche. C’est plutôt léger, d’autant qu’il s’agit sinon d’humanoïdes accompagnés de robots pilotés à distance. Nulle intelligence artificielle au programme donc, même leurs armes sont communes et sans intérêt. C’est bien la peine de venir de l’autre bout du monde…

Le scénario de World Invasion : Battle Los Angeles n’est pas le point fort du film, faute d’originalité, mais la réalisation de Jonathan Liebesman manque elle aussi d’intérêt. Le principe de base semble avoir été : la caméra au cœur de l’action. C’est assez logique pour un film de guerre, mais on se lasse un peu des caméras sur l’épaule et des plans saccadés qui en découlent. Cela étant, il faut bien avouer que le réalisateur ne s’en sort pas trop mal et parvient au moins à maintenir la lisibilité de la plupart de ses scènes. Malheureusement, Jonathan Liebesman a eu la fausse bonne idée d’inclure des scènes 24 heures avant le drame, procédé courant pour « planter la psychologie » des personnages. Comme souvent, cette partie n’a aucun intérêt (tous ces hommes et femmes sont là pour crever pour leur pays), mais elle a aussi la fâcheuse conséquence de montrer que Jonathan Liebesman ne sait manifestement pas composer un cadre normalement et poser sa caméra. Même sur des scènes insignifiantes (achats de fleurs pour un mariage), la caméra bouge tout le temps, tournicote, tremble… bref elle est insupportable. Heureusement, l’action arrive vite et la caméra sur l’épaule retrouve sa légitimité. Avec un film de guerre aussi convenu, les choix musicaux sont réduits et World Invasion : Battle Los Angeles suit là encore les canons du genre. On a donc droit à une bande-son avec orchestre symphonique, tantôt héroïque tantôt larmoyante (ah, ces chœurs…) qui s’avère assez pénible. Heureusement, le bruit des canons la couvre le plus souvent.

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World Invasion : Battle Los Angeles aurait sans doute pu être un bon film. Pour cela, il aurait fallu une réalisation et un scénario un peu moins convenus, s’immerger encore plus dans l’action, ou alors prendre un peu de hauteur (non, le monde ne se résume pas à Los Angeles…). À la place, Jonathan Liebesman livre un blockbuster décérébré qui n’est pas indigne puisqu’il remplit globalement son office de divertissement, mais qui ne fera pas date non plus. À voir si vous n’en attendez pas un film de science-fiction et si vous n’avez pas de problèmes d’épilepsie.


  1. Oui, World Invasion : Battle Los Angeles est un film anglo-saxon, cela se sent. Cela étant, rares sont les puissances colonisatrices à avoir fait preuve de tendresse envers leurs colons…