Your Honor, Peter Moffat (Showtime)

Adaptation d’une série israélienne, Your Honor part d’une idée simple : un juge qui doit abandonner tous ses principes le jour où son fils tue accidentellement le fils d’un baron de la mafia locale. La version américaine commandée par Showtime se déroule à la Nouvelle-Orléans, avec un juge qui affronte la mafia italo-américaine toute puissante dans la ville. Jusqu’où peut aller un père pour protéger ou venger son fils ? La question est l’origine d’une mini-série composée de dix épisodes intenses et prenants. Malgré son manque d’originalité, quelques ficelles un peu trop grosses et un final assez ridicule, Your Honor parvient à captiver d’un bout à l’autre.

Tout commence par un accident de la circulation, deux jeunes de 17 ans qui se croisent un petit peu trop rapidement : Adam, dans la vieille Volvo familiale, ne voit pas Rocco sur sa moto. Le choc est terrible et le motard projeté sur plusieurs mètres meurt presque instantanément. Paniqué, Adam tente d’appeler les secours, mais son asthme prend le dessus et quand il réalise qu’il a tué une personne, il prend peur et fuit la scène. De retour chez lui, il dévoile tout à Michael, son père qui est aussi un juge respecté dans la ville et qui convainc son fils de se rendre auprès de la police. Sauf qu’en arrivant au commissariat, il découvre que la victime est le fils d’un puissant mafieux du coin et il sait que le sien n’aura aucune chance de survie si cela se sait. Your Honor se construit à partir de cet incident et imagine comment un juge peut s’en sortir, ou pas, en cachant la vérité à propos de son fils. Il faut nettoyer les vêtements d’Adam, faire disparaître discrètement la voiture… mais rien ne va. Le jeune gangster du coin appelé pour emmener le véhicule se fait arrêter et les problèmes s’accumulent autour de la famille. Peter Moffat construit la saison en augmentant rapidement la pression sur le juge, qui doit compromettre de plus en plus. Au départ, il s’agit uniquement de bâtir un mensonge pour se protéger de la mafia. Mais bientôt, la police découvre que la voiture familiale a été impliquée dans l’accident et de fil en aiguille, l’étau se resserre. Bryan Cranston, habitué à ce rôle de père prêt à tout manifestement, est parfaitement à son aise pour incarner ce juge qui se découvre prêt à tout, vraiment tout, pour protéger son enfant. Le scénario va un petit peu trop loin en quelques occasions, avec des astuces un peu difficiles à justifier, notamment des coïncidences presque grossières qui viennent pimenter les situations. On a du mal à croire que les personnages s’en sortent aussi bien pendant autant de temps quand on voit ce qu’ils font, mais Your Honor n’en est pas déplaisant pour autant. La réalisation est efficace, la musique prenante et on ne s’ennuie jamais, avec une véritable envie d’en savoir plus et de découvrir comment les personnages vont s’en sortir. Dommage que la fin soit traitée de manière si légère, avec une surprise finale dont on se serait bien passé, mais cela n’enlève rien à tout ce qui précède. Autre bizarrerie d’ailleurs, on voit bien le découpage du tournage, impacté par la pandémie de Covid-19 qui ajoute brutalement un ou deux masques et la distanciation sociale. C’est bien d’avoir ancré la série dans son temps, mais cela survient au milieu d’une intrigue qui semble se dérouler sur quelques semaines seulement, et non plusieurs mois.

Certes, Your Honor n’est pas la série la plus originale qui soit et c’est une variante sur des thèmes que l’on a déjà vus de nombreuses fois par ailleurs. L’enquête de police dans une ville gangrénée par la mafia, les familles prêtes à tout pour protéger les siens ou même les oppositions sociales et raciales sont autant de sujets qui ne surprendront personne. Mais après tout, on ne peut pas toujours tout renouveler et Peter Moffat se contente de signer une relecture bien menée de ces thématiques. Your Honor ne restera pas dans les annales, mais la série de Showtime mérite d’être vue.