Niché rue Pailleron, au cœur du quartier de La Croix-Rousse dans le quatrième arrondissement lyonnais, Les Saveurs de Py appartient à cette grande catégorie d’adresses franco-japonaises. En cuisine, Pierre Mercier compose des assiettes sur une base de cuisine française classique, mais relevée par l’influence apportée par Yuko Matsumoto qui officie aussi en salles. Ce type d’association entre les deux cultures est très courant à Lyon et il fonctionne toujours aussi bien. Le résultat est léger et très savoureux, toujours dans la finesse et la précision, une vraie réussite à ne pas rater dans les environs.
La salle du restaurant est assez petite, quelques tables autour d’un bar qui fait aussi office de sas vers les cuisines. Il y a une deuxième salle derrière, mais Les Saveurs de Py reste une adresse à taille humaine, ce qui est une excellente chose. En fin de soirée, la salle devient un petit peu bruyante parce qu’il y a un groupe plutôt joyeux ce jour-là, néanmoins c’est un lieu où l’on peut discuter calmement et le nombre de couverts assez faible est bienvenu à cet égard. On s’installe et les cartes arrivent rapidement, avec très peu d’options au menu, ce qui est là aussi une très bonne nouvelle. Ici, le chef travaille peu de produits et privilégie la qualité, et il suffit de suivre les publications sur la page du restaurant pour confirmer que la carte change régulièrement, au gré des saisons. Le soir, il n’y a que deux menus au choix et deux ou trois assiettes à chaque fois. Comptez 25 € minimum par personne, une quarantaine pour le menu le plus cher, ce qui reste raisonnable quand on en juge à la qualité de l’ensemble.
Le printemps commençait à arriver et les entrées fraiches et légères convenaient parfaitement au retour des beaux jours. D’un côté, du thon rouge proposé en deux façons, d’une part sous la forme d’un tartare servi sur un nuage de riz qui ressemblait à une crème chantilly très légère, un coussin aérien qui sublimait le goût très prononcé du poisson. D’autre part, mi-cuit façon tataki, avec un morceau d’encornet à côté. C’est une assiette pleine de saveurs qui explosent en bouche, un mélange entre la tradition française et l’Asie, entre la mer et la terre avec un jus de volaille qui venait réveiller l’ensemble. Quelques légumes bien assaisonnés et des dès de poivron qui viennent apporter du pep’s : une très belle entrée décidément, peut-être un poil légère sur les quantités, mais excellente malgré tout. En face, un crémeux de petit pois froid et bien vert, quelques escargots, des lamelles de canard et du foie gras. Une association audacieuse où la fraicheur et la verdure l’emportent. Les Saveurs de Py attaque fort avec ces entrées parfaitement réglées et il ne fallait pas décevoir avec les plats principaux, ce qui fort heureusement ne fut pas le cas.
Les trois options testées ce soir étaient toutes réussies, avec trois assiettes assez différentes, classiques sur le fond, mais toutes parfaitement réalisées. On commence avec du merlu accompagné de morceaux de sèches et de petites pommes de terre, le tout étant assaisonné avec un étonnant caviar de haddock, des épinards, quelques poireaux et un jus de choux-fleur. Le poisson était bien cuit, même s’il aurait peut-être mérité une ou deux minutes de moins et ce plat plutôt léger était en revanche riche en goût. Très classique, mais incontournable, la lotte agrémentée de langoustines est elle aussi cuite avec précision et les goûts sont au rendez-vous. Dans un autre registre, le carré d’agneau était fondant à la perfection, présenté rose comme il se doit et accompagné de gnocchis, de quelques artichauts et surtout d’un confit d’épaule d’agneau fondant en bouche… un délice. Là encore, les accompagnements réveillent tout le plat, avec un jus de viande relevé par un anchois et une vinaigrette d’agrumes qui ne couvre pas l’assiette, mais qui vient la renforcer. C’est une explosion de saveurs et une cuisine maîtrisée, très réussie encore une fois. Et ce, jusqu’aux desserts, que l’on opte pour la légèreté avec la fraise et la rhubarbe qui est malgré tout relevé par un peu de crème vanillée sur le côté, ou pour la gourmandise avec ce crémeux au chocolat posé sur un socle croustillant. Il y a quelques surprises à piocher, à l’image de cette mousse cardamome qui surprend avec le chocolat, ou du nuage de riz japonais rendu aérien par un passage au siphon et qui hésite entre le sucré et le salé.
C’est un sans faute pour Les Saveurs de Py, avec un menu léger et en même temps plein de saveurs. Les quantités sont réduites, mais très correctes sur un menu complet et la qualité est au rendez-vous, avec un assemblage précis de goûts qui se coordonnent parfaitement. La note japonaise est bien présente, même si elle est discrète, elle permet de réveiller la cuisine française et lui offrir un nouveau souffle. À ne pas rater.