Michaela Coel n’est pas seulement l’actrice principale de Chewing Gum, c’est aussi la créatrice de cette série diffusée désormais sur Netflix. Un petit peu comme Please Like Me, série de et avec Josh Thomas, cette jeune femme dévoile son univers déjanté dans un récit probablement largement autobiographique. Même si, on l’espère pour elle en tout cas, dans une relecture comique et caricaturale bien éloignée de la réalité. Chewing Gum aborde la question de l’identité d’une jeune femme moderne coincée entre la religion très stricte imposée par sa famille et l’image renvoyée par la société qui veut faire d’elle une femme ouverte notamment sur le plan sexuel. La sexualité est au cœur des douze épisodes d’une vingtaine de minutes que compte actuellement la série et à défaut d’être très fine ou réaliste, cette série est vraiment très drôle.
Tracey, la vingtaine, vit dans une cité défavorisée la banlieue londonienne avec sa mère et sa sœur. Sa famille est extrêmement pieuse, surtout parce que la mère de famille impose un suivi strict et très exigeant du catholicisme, avec notamment l’exigence de virginité avant le mariage pour ses deux filles. De fait, Chewing Gum place la question de la sexualité, et avant tout de son interdit, au cœur de son scénario dès le tout premier épisode et cette thématique ne quitte ensuite jamais la série. Le personnage incarné par Michaela Coel est fiancée à un homme qui l’exploite comme une moins que rien et ne l’aime visiblement pas. On découvre bien vite qu’il préfère les hommes, ce qui ne l’empêche pas de se présenter comme un homme pieux et sage, une hypocrisie que les deux saisons pointent constamment du doigt. La mère aussi est hypocrite, elle cherche surtout à garder son rang dans la société et se sent inutile sans son culte souvent haineux qui lui offre la crainte de ses fidèles. Naturellement, Tracey elle est aussi est pleine de contradiction et d’hypocrisie. Ce personnage est toujours à la limite de la folie et la créatrice de la série se présente comme une hyper-active qui compense sa mauvaise connaissance de la société — et des affaires du sexe tout particulièrement — par une énergie dingue qui fatigue vite tous ceux qui l’entourent. Elle est hyper expressive et toujours dans le trop plein, trop d’émotions, trop de rires, trop de larmes… elle ne peux jamais faire quelque chose calmement et dans la mesure. C’est un personnage haut en couleur comme on dit, assez similaire à ceux d’Unbreakable Kimmy Schmidt, une série assez proche dans son traitement déjanté de l’humour et dans le côté découverte ingénue. Mais même si on peut rapprocher Chewing Gum de telle ou telle autre série, elle reste résolument à part et c’est clairement l’œuvre d’une personne unique, ce qui en forge le caractère unique. Dans le rôle qu’elle s’est créé, Michaela Coel est excellente évidemment et les deux premières saisons de la série passent bien trop vite.
Rares sont les séries qui abordent la sexualité de manière aussi frontale et souvent caricaturale, mais sans tomber dans la vulgarité pure pour autant. Chewing Gum est une œuvre osée, gonflée même, mais elle fonctionne très bien, précisément parce que c’est la création d’une personne à qui on a manifestement laissé carte blanche. Michaela Coel n’est pas qu’une actrice, elle apporte son univers et à condition de tolérer le ton caricatural et nerveux, c’est un plaisir de la suivre. À découvrir !