How To Sell Drugs Online (Fast), Philipp Käßbohrer et Matthias Murmann (Netflix)

How To Sell Drugs Online (Fast) s’ajoute à la liste décidément toujours plus longue des séries qui confrontent des personnes « normales » au monde de la drogue. N’imaginez pas voir la version allemande de Breaking Bad, Weeds ou Ozark toutefois, la création originale de Netflix ne manque pas d’idées pour se distinguer. L’intrigue est vaguement basée sur une histoire vraie, ce qui est assez impressionnant, mais ce n’est pas le plus intéressant. Philipp Käßbohrer et Matthias Murmann ont surtout réussi à exploiter au mieux la plateforme de streaming pour offrir une série addictive, très drôle et qui ne dévie jamais de ses bonnes idées pendant deux saisons malheureusement trop courtes. Ne passez pas à côté de cette excellente série !

Moritz et Lenny sont les deux geeks de service dans le petit lycée de Rinseln, une petite ville allemande sans histoire et, de l’avis de nos jeunes personnages, sans intérêt. Ils passent leur temps dans leur coin, à bricoler sur des ordinateurs et imaginer des idées de start-ups un peu médiocres jusqu’au jour où Moritz décide de tout faire pour récupérer sa copine Lisa. Après un an aux États-Unis, elle lui préfère Dan, le beau gosse de service, bien musclé et bien fourni en drogues. Au lieu de se démonter, Moritz décide d’égaler Dan et puisqu’obtenir un corps de rêve est trop compliqué, il préfère espionner son rival pour acheter de la drogue auprès de son fournisseur. C’est ainsi que le héros de How To Sell Drugs Online (Fast) met le doigt dans un engrenage infernal qui va faire de lui le plus gros vendeur de drogues sur internet au monde. Voilà le postulat de départ, et par bien des aspects, la série de Netflix ressemble à une pale copie de bien d’autres. On retrouve les lycéens et leurs problèmes, la confrontation de deux univers avec le petit mafieux albanais local et bientôt les gros dealers de drogue hollandais, ou encore les conflits amoureux avec un triangle Moritz-Lisa-Dan.

Sur le papier, cela ressemble à une formule déjà vue et bien ennuyeuse, mais c’est sans compter sur la qualité du scénario qui exploite astucieusement la plateforme de diffusion. La série ne se contente pas de profiter du binge-watching et de jouer sur le désir d’enchaîner tous les épisodes en une session, ça c’est classique. Elle utilise aussi des petites astuces de mise en scène, à l’image de cette explication technique sur le MDMA que le spectateur peut passer avec un bouton, comme s’il s’agissait du générique de début. Ou alors cette fin simulée, avec l’interface de Netflix pour choisir une autre série à voir. Philipp Käßbohrer et Matthias profitent au maximum du médium et, plus important encore, ils ne perdent jamais de vue le cœur de leur histoire. C’est un défaut constant, surtout dans ces récits qui confrontent la normalité à une mafia, le ton monte trop vite et le réalisme disparaît trop rapidement. Rien de tel ici, avec un scénario parfaitement dosé, qui parvient à maintenir un sentiment de réalisme. Tous les personnages sont crédibles comme lycéens et on y croit, car il n’y a pas d’escalade de la violence, ni l’arrivée soudaine de toutes les forces de police contre les personnages. How To Sell Drugs Online (Fast) introduit bien ces deux éléments, mais la série a le sens de la mesure et l’arrivée très progressive de ces difficultés face à Moritz, Lenny et Dan fait toute la différence.

Difficile de savoir si la création de Netflix pourra tenir la distance, mais le service de streaming n’a évidemment pas hésité à la renouveler pour une troisième saison. À l’issue des deux premières, c’est bien une évidence : How To Sell Drugs Online (Fast) est une excellente série, parmi les meilleures de sa catégorie. Elle est très fun à regarder, bien écrite et impeccablement incarnée, et la complicité introduite avec les spectateurs fonctionne à merveille. On a hâte de retourner à Rinseln pour découvrir la suite.


How To Sell Drugs Online (Fast), saison 3

(2 août 2021)

Retour à Rinseln pour une nouvelle saison de How To sell Drugs Online (Fast), toujours aussi courte malheureusement avec ses six épisodes seulement, mais toujours aussi plaisante. On pouvait craindre qu’elle s’essouffle, mais ses deux créateurs prouvent qu’ils avaient encore de quoi tenir la distance et cette suite va encore plus loin sans perdre de vue l’originalité de la série, mais aussi sa crédibilité. Certes, c’est la guerre ouverte entre Moritz et les deux néerlandaises qui avaient pris le contrôle de son site dans la deuxième saison, mais elle se fait par police interposée ou avec une bonne dose de chance. Les personnages principaux restent des lycéens qui ne savent pas bien ce qu’ils font et qui se comportent comme des lycéens, à se chamailler pour un rien, ou de manière un petit peu plus sérieuse quand de la drogue et des centaines de milliers d’euros sont impliqués. Philipp Käßbohrer et Matthias Murmann trouvent à nouveau le ton juste et parviennent à prolonger cette histoire invraisemblable — mais toujours inspirée d’une vraie ! — en gardant l’humour qui a aussi fait le succès de la série portée par Netflix. Et même si les personnages sont toujours des gamins crédibles1, ils évoluent aussi dans cette saison et leurs relations se complexifient, si bien que l’on n’est plus dans la simple farce initiale.

Y a-t-il suffisamment de matière pour tenir un petit peu plus longtemps encore ? À défaut de savoir ce que l’algorithme du service de streaming va décider, How To Sell Drugs Online (Fast) conserve une fin ouverte tout en offrant une conclusion satisfaisante à tous ses personnages. Un beau compromis, mais après ces trois saisons toutes aussi courtes les unes que les autres, on aimerait bien en voir plus. Ou à tout le moins, on a hâte de savoir ce que Maximilian Mundt, l’acteur qui interprète Moritz, va faire ensuite. C’est bien la révélation de cette série allemande, il est excellent dans son rôle, très expressif tout en restant crédible et il pourrait avoir une superbe carrière ! En attendant d’en voir plus, ne passez pas à côté de cette comédie, vous ne le regretterez pas.


  1. Prends-en de la graine, Elite