Un jour sans fin, Harold Ramis

Personne ne croyait vraiment au succès d’Un jour sans fin à ses débuts et le film est sorti dans une indifférence assez générale en 1993. Et pourtant, Harold Ramis avait réalisé, probablement sans le savoir, l’une de ces œuvres qui gagnent en intérêt au fil des années au point de devenir cultes. C’est indéniablement le cas de cette comédie romantique qui repose sur une idée assez originale, même si elle est loin d’être unique : un homme revit sans arrêt la même journée et se réveille toujours au petit matin du Jour de la marmotte (Groundhog day en version originale). On pourrait croire que cette étrange fête où une marmotte est censée prédire l’arrivée plus ou moins tardive du printemps a été imaginée pour les besoins du projet, mais pas du tout : Harold Ramis s’est contenté de broder son histoire autour de l’évènement qui apporte au projet une touche originale supplémentaire. Un jour sans fin regorge de bonnes idées et on comprend aisément pourquoi il a acquis son statut : c’est un excellent film, qui se (re)voit avec toujours autant de plaisir !

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Tout le monde attend la fameuse journée qui se répète à l’infini, mais Un jour sans fin prend son temps pour poser ses personnages. Il faut dire que c’est une étape préliminaire indispensable, puisqu’il s’agit de montrer à quel point Phil Connors, le personnage principal, est un sale type. Ce présentateur dans une chaîne de télévision locale basée à Pittsburg n’a que du mépris envers ses collègues et son travail et il est hautain et constamment déplaisant. Quand le film commence, il doit se rendre à Punxsutawney, en Pennsylvanie, où, comme tous les ans, une marmotte est sortie de son trou et si elle voit son ombre, c’est que l’hiver durera plus longtemps. Ce n’est pas la première fois qu’il assure ce marronnier et il n’en peut plus de la journée et de sa bourgade paumée. On le suit ainsi avec le caméraman et Rita, la productrice, du petit main jusqu’au soir, où l’équipe tente de rentrer à Pittsburgh, avant d’être arrêtée par une tempête de neige. Cette journée est horrible et Phil est insupportable avec tout le monde. Une fois ce contexte bien en place, Harold Ramis peut instaurer son mécanisme principal en bloquant le temps et en relançant la même journée là où on devrait passer au lendemain. On retrouve le même rituel : le réveil qui sonne à six heures du matin avec la même chanson de Sonny et Cher, le petit déjeuner et la cérémonie de la marmotte dans le parc. La boucle infernale est lancée !

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Ce jour qui revient sans fin est une excellente idée, d’autant que le long-métrage l’exploite pleinement. Ce n’est pas seulement un gadget, c’est le moteur de l’intrigue et celle-ci est plus fine qu’on ne pourrait le croire au premier abord. Certes, Un jour sans fin est une comédie qui joue sur le comique de répétition, avec un Bill Murray en pleine forme d’ailleurs. Une dizaine d’années après S.O.S. Fantômes qui l’a lancé sous les feux de la rampe, l’acteur est excellent dans ce rôle qui semble taillé sur mesure pour lui. Dans le genre humour triste, il est incontestablement l’un des meilleurs et le film joue à plein sur ce registre, surtout les premiers jours où l’histoire se répète. Mais le film de Harold Ramis n’en reste pas là et prend de la hauteur en introduisant quelques idées pas si idiotes qu’elles en ont l’air. En revivant tous les jours la même journée, le personnage de Phil apprend à apprécier les petites choses et il découvre les gens qui habitent à Punxsutawney ont une histoire et quelque chose à apporter. Le scénario ne révolutionne rien, mais on évite un surplus de niais grâce à un traitement assez sobre au fond : on comprend assez vite que la solution viendra d’un changement de personnalité du personnage principal, mais la transition se fait en douceur, de manière assez subtile. De la même manière, la romance entre le personnage principal et Rita, interprétée par Andie MacDowell, est assez vite évidente, mais elle est traitée, là encore, avec toute la finesse nécessaire. Les deux personnages prennent le temps de se découvrir, Phil passe par plusieurs échecs et il doit bien la connaître avant, enfin, de conclure…

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Un jour sans fin tenait cette excellente idée de la boucle temporelle, et le film l’a exploité de la meilleure manière. Pas étonnant dans ces conditions que le long-métrage de Harold Ramis ait rencontré un tel succès, mais pas dans l’immédiat, de manière assez amusante. Comme son personnage principal, le public a progressivement apprivoisé l’œuvre, avant de l’apprécier pleinement. Avec le recul, Un jour sans fin est toujours une excellente comédie romantique, à la fois très drôle et émouvante. On ne s’en lasse pas, ne serait-ce que pour voir et revoir Bill Murray le pied dans cette flaque !