Le voyage temporel est un sujet fascinant par les multiples paradoxes qu’il engendre forcément. Timeless a choisi d’en faire son sujet principal, un choix ambitieux qui n’a pas payé, puisque NBC a annulé la série après une saison seulement, même si la chaîne a finalement accordé une deuxième saison. La création d’Eric Kripke et Shawn Ryan a été interrompue prématurément et il faut dire qu’elle n’est pas sans défauts, mais Timeless reste intéressante malgré tout. En dépit de son format un petit peu trop proche du feuilleton à l’ancienne, avec des épisodes fermés et indépendants, elle parvient à créer des personnages attachants. Si vous aimez le principe du voyage dans le temps, c’est une série fun qui mérite d’être vue.
Conor Mason a inventé une machine capable de remonter le temps qui se fait voler dans le pilote par Garcia Flynn, un homme bien décidé à modifier l’histoire pour des raisons qui restent initialement mystérieuses. Pour l’arrêter, une unité spéciale est mise en place pour le poursuivre dans le temps : Rufus, un pilote capable de manipuler le « Lifeboat », Wyatt, un soldat qui pourra se sortir de toutes les situations difficiles et enfin Lucy, une historienne qui connaît l’histoire et pourra empêcher ses modifications. Voilà le concept de base et Eric Kripke et Shawn Ryan ont imaginé une série qui se rapproche des feuilletons d’antan. Chaque épisode est l’occasion d’évoquer une époque différente, puisque Garcia se rend sur les lieux d’un fait historique connu pour le faire dérailler. Le pilote se concentre sur l’accident du dirigeable Hindenburg en 1937, puis les épisodes choisissent des faits piochés dans l’histoire américaine : Alamo, Apollo 11, l’assassinat de Lincoln, le Watergate, le procès de Salem, Al Capone, Jesse James… La liste n’est pas des plus originales et Timeless ressemble parfois à une version modernisée de L’histoire pour les nuls. Ce n’est pas nécessairement un défaut toutefois et il faut saluer le travail réalisé sur les décors, les costumes et les moyens mis en place pour recréer chaque époque. NBC a mis le paquet et on peut d’ailleurs imaginer que c’est la raison qui a poussé la chaîne à abandonner cette série, trop coûteuse. On peut presque en juger avec les deux derniers épisodes, diffusés à l’origine sous la forme d’un téléfilm, et tout particulièrement du dernier qui est censé se dérouler en Corée du Nord en plein hiver. Alors que la série était jusque-là bien réalisée, le filtre bleu peine à masquer le décor naturel et les arbres en feuille. Une fin un petit peu triste, alors même que cette série s’était distinguée par son bon niveau technique.
Timeless est loin d’être parfaite. Le choix d’associer à chaque épisode une époque différente a obligé les scénaristes à multiplier les raccourcis et facilités. On ne compte plus le nombre de fois où les trois héros se sortent miraculeusement d’une terrible fusillade alors que tout le monde meurt autour d’eux. C’est un défaut trop courant qui est ici multiplié à l’infini et on n’a jamais peur qu’il arrive quoi que ce soit à nos personnages. Sans compter qu’ils sont toujours au bon endroit au bon moment, il n’y a jamais d’erreur ou de difficultés pour trouver ce qu’il faut faire et comment le contrecarrer. Ajoutons que le grand méchant, Garcia Flynn puis surtout Rittenhouse, est caricatural au point de tomber dans le ridicule. Tout cela paraît bien facile et on pourrait vite s’ennuyer, mais la création de NBC peut compter sur ses personnages. Alors même que c’était le point noir de Les Voyageurs du Temps, une série sur le même thème sorti d’ailleurs la même année, la qualité d’écriture des personnages sauve in fine ces deux saisons. Certes, les romances sont un petit peu forcées, mais il n’empêche que l’on s’attache très vite aux personnages et les scénaristes leur ont offert suffisamment d’épaisseur pour qu’ils tiennent la série entière sur leurs épaules. C’est toujours la clé pour qu’une fiction tienne la durée et c’est ici aussi ce qui permet de tenir la distance et d’oublier les facilités d’écriture et le côté répétitif des missions historiques.
Au bout du compte, Timeless est un divertissement sympathique sans être inoubliable. On apprécie les personnages, moins l’histoire d’ensemble qui est assez faiblarde, avec cette manière de se concentrer sur l’histoire américaine et les oppositions grossières à base de bien et de mal. Au-delà des coûts de production probablement astronomiques, Eric Kripke et Shawn Ryan n’ont pas réussi à exploiter pleinement l’idée des voyages temporels. Timeless n’est à cet égard pas une réussite complète, sans être un échec pour autant.