Au cœur du Vieux Lyon, Aux Trois Maries ne se distingue pas tellement par sa devanture très classique, mais un petit peu plus par sa salle plus soignée qu’à l’accoutumée. Il faut dire qu’au royaume des bouchons lyonnais, celui qui se proclame « l’un des plus anciens » de la catégorie (l’adresse est née il y a plus de cinquante ans) cultivent sa différence. Nulle nappe à carreaux ici, aucune table ridiculement petite et collée à une autre table ridiculement petite. On privilégie ici une pointe de raffinement, un service un petit peu plus distingué qui permet aussi au vénérable restaurant de se différencier des usines à touristes qui pullulent dans le quartier.
L’été, on pourra profiter si l’on est chanceux de la minuscule terrasse installée sur la place de la Baleine. Sinon, Aux Trois Maries dispose d’une petite salle au rez-de-chaussée et d’une autre, plus généreuse, à l’étage. Dans tous les cas, on ne sert ici que quelques dizaines de couverts chaque jour, guère plus. On s’installe pour découvrir une carte qui rassemble les incontournables de la gastronomie lyonnaise autour d’un menu à 25 € (entrée, plat, fromage ou dessert). Gâteau de foies de volailles, quenelle de brochet et sa sauce aux écrevisses et cervelle de Canuts : les incontournables sont tous là et permettent de découvrir la cuisine typique de la région. Le chef maîtrise d’ailleurs ses classiques et on ne sera pas déçu : de l’entrée au dessert, les saveurs sont au rendez-vous, sans la moindre originalité, mais avec l’assurance de découvrir une bonne cuisine lyonnaise. Mention spéciale à la quenelle, un incontournable parfaitement exécuté, avec une sauce au bon goût d’écrevisses, même si elle aurait peut-être méritée d’être un petit peu moins liquide. Côté desserts, il y avait au menu ce soir-là une île flottante améliorée par l’ajout de pralines roses : rien d’original, mais un dessert solide !
Au fil des années, Aux Trois Maries s’éloigne un petit peut de son statut de bouchon pour expérimenter sur d’autres terrains. L’ancien propriétaire tentait de revisiter les classiques (leur Tatin de boudin noir reste ainsi un excellent souvenir), la nouvelle direction va chercher plus clairement ailleurs. Si vous le souhaitez, vous pouvez ainsi sortir du bouchon et opter pour un menu plus proche de la gastronomie, avec une formule à 34 € (également entrée, plat, fromage ou dessert) ou la totale pour une quarantaine d’euros. À ce tarif, on navigue constamment entre la plus grande tradition et une cuisine contemporaine. En entrée, on peut ainsi opter pour une terrine de porc et canard très classique, ou bien partir en Italie avec de la ricotta affinée par le restaurant et agrémentée de vinaigre balsamique et d’olives. Une entrée inattendue et intéressante, même si on pouvait s’attendre à un fromage plus fort : le mélange de toutes les saveurs rassemblées dans l’assiette reste convaincant et on finit l’assiette avec plaisir. Le plat hésite là aussi entre de l’agneau cuisiné « à la française », ou bien du thon rouge mi-cuit avec des légumes parfois crus. Rien de très original, mais c’est un plat bien maîtrisé et très léger, un petit peu trop peut-être. Les gourmands compenseront avec la généreuse profiterole faite maison. Une précision importante, mais malheureusement, le chef n’est manifestement pas pâtissier. Le choux est beaucoup trop pâteux et il manque de finesse, la sauce chocolat manque quant à elle d’un liant crémeux. Qu’à cela ne tienne, l’association glace vanille, chocolat et amandes fonctionne parfaitement et c’est un dessert régressif et excellent. Si vous êtes au régime, le gaspacho de fraises est frais et bien assaisonné.
Sans faire d’étincelles, Aux Trois Maries est un bouchon atypique qui ose sortir des sentiers battus, et qui le fait plutôt bien. Si vous voulez découvrir la gastronomie lyonnaise dans un cadre différent, c’est un bon choix. Et si vous accompagnez des visiteurs de passage, vous pouvez y déguster une cuisine plus contemporaine, tout en les laissant découvrir la tradition. Une valeur sûre dans le quartier !