Young Royals, Lisa Ambjörn, Sofie Forsman et Tove Forsman (Netflix)

Une série Netflix, des adolescents dans un lycée huppé et des histoires de sexe, le tout saupoudré d’une pincée ou deux de drogue. Vu de loin, Young Royals ressemble fort à un Élite du nord, avec la fraîcheur de la Suède à la place de la chaleur hispanique. Pour autant, la création de Lisa Ambjörn, Sofie Forsman et Tove Forsman n’a strictement rien à voir. Pas seulement parce que les acteurs ont l’âge de leurs personnages, ni parce qu’ils se comportent comme des ados normaux, même si cela joue beaucoup. Cette vision modernisée d’un conte traditionnel interroge le rôle d’une monarchie moderne, le tout pour servir de cadre à une charmante romance homosexuelle. Le plus gros défaut de la première saison de Young Royals est d’être trop courte, alors vivement la suite !

Wilhelm est prince de Suède bien à son insu. Fils cadet de la reine, il n’a pas à se soucier de succession puisque c’est son grand frère Eric qui doit hériter du trône. Lui ne veut surtout pas de ce monde, il préfère vivre normalement comme tous les garçons de son âge, mais on ne fait pas ce que l’on veut quand on appartient à une telle famille. Après une soirée un petit peu trop mouvementée qui a fait le tour de l’actualité, il est envoyé de force dans un lycée privé qui accueille la haute société suédoise, une institution où son frère s’est illustré et que Wilhelm voulait éviter à tout prix. À son arrivée, il découvre un entre-soi malsain qui le révulse, mais au milieu de ses pairs imbus d’eux-mêmes, il repère vite la voix puis le minois de Simon. Ce boursier « non-rés » — non-résident — n’est pas du même monde que lui et Wilhelm tombe immédiatement amoureux. Ce n’est sans doute déjà pas facile d’assumer son homosexualité quand on est prince de Suède, mais ça l’est encore moins quand un accident le propulse au premier niveau de la succession de la Couronne. Young Royals déploie cette romance secrète avec une trame assez classique dans le genre du récit de coming-out, tout en gardant en tête cette question à l’arrière-plan. Une monarchie basée sur le droit du sang peut-elle exister avec une monarchie homosexuel ? Naturellement, la reine considère que non et fait tout pour forcer son fils à oublier Simon et à cacher son homosexualité.

En six épisodes, la première saison n’a pas le temps de répondre à cette question et on ne sait toujours pas ce que son personnage principal compte faire, mais on peut relever le travail d’écriture qui offre à ces personnages une crédibilité rare. L’histoire d’amour est très belle, notamment parce qu’elle est sincère : on ressent instantanément l’attirance entre les deux garçons et les deux acteurs, Edvin Ryding pour interpréter le prince comme Omar Rudberg pour son amoureux, sont tout simplement excellents. Le prince qui tombe amoureux d’une personne pauvre, c’est Cendrillon revisité et modernisé, mais les scénaristes ont fait un travail remarquable pour normaliser l’homosexualité. La reine ne la remet jamais en cause, par exemple, elle demande à son fils de la cacher publiquement pour sauver la couronne. De même, personne dans l’école ne fait preuve d’homophobie et Simon, ouvertement gay, n’est jamais rejeté par ses camarades pour cette raison. Cette image positive est un point fort, mais Young Royals ne verse pas dans l’angélisme. Bien au contraire, elle laisse toute la place nécessaire pour l’immaturité de son personnage principal, qui perd son meilleur ami en perdant son frère et qui se retrouve brutalement propulsé dans un rôle qu’il ne veut pas. Face à une telle pression, il ne réagit pas comme on l’aimerait et il accepte de jouer le jeu en mentant à la télévision face à son pays. Ailleurs, cela pourrait être une déception, mais c’est ce qu’impose le personnage et sa psychologie. Tout est parfaitement cohérent, de l’intimité entre les deux amoureux jusqu’à la réaction de la famille royale et c’est à nouveau la preuve d’une écriture de haut niveau.

Young Royals a été rapidement renouvelée pour une deuxième saison qui devrait arriver prochainement. C’est normal, il faut profiter au plus vite de la jeunesse des acteurs pour ne pas tomber dans le piège habituel. Et surtout, il ne faut pas perdre cet équilibre parfait de la première saison, le ton juste du scénario et les interprétations sincères de tout le casting. Par bien des aspects, ces six premiers épisodes tiennent presque du miracle, tant il aurait été facile de passer à côté et de tomber dans l’excès. Souhaitons que les trois créatrices tiennent le cap par la suite et Young Royals pourrait bien devenir une excellente série !

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