Le Monde de Dory, Andrew Stanton et Angus MacLane

Treize ans après Le Monde de Nemo, les studios Pixar se risquent à donner une suite à l’un de ses plus grands succès. Succéder à une œuvre qui a convaincu tant de spectateurs et de générations n’était probablement pas un défi évident à relever, en tout cas pas un à prendre à la légère. Andrew Stanton conserve sa double casquette de scénariste et de co-réalisateur, mais il est accompagné cette fois d’Angus MacLane, animateur chez Pixar qui signe ici sa première participation à un long-métrage. Treize ans après, que vaut cette suite ? La technique a évolué et les fonds sous-marins n’ont jamais été aussi réalistes et magnifiques. Malheureusement, cette base technique n’a pas servi à une intrigue renouvelée et comme son titre l’indiquait assez bien au fond, Le Monde de Dory ressemble fort à son prédécesseur. C’est une bonne chose en un sens, tant Le Monde de Nemo avait des qualités, mais le dix-septième long-métrage du studio souffre aussi d’un incontestable sentiment de redite. Cela n’empêchera pas les fans de replonger avec bonheur dans cette suite, mais c’est indéniablement un Pixar mineur.

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Comme le précédent volet, Le Monde de Dory commence sur une séquence triste, et c’est à nouveau une scène de séparation. Cette fois, Dory qui souffre de pertes de mémoire à court terme perd de vue ses parents et s’éloigne irrémédiablement d’eux en les cherchant. La suite fait explicitement le lien avec le film qui le précède en reprenant la scène clé de la rencontre entre Marin et Dory, puis on avance dans le temps. Un an après donc, le trio forme une sorte de famille normale, mais le chirurgien bleu qui souffre toujours autant de courtes amnésies, se souvient pourtant du temps lointain où elle avait une famille. À force d’y penser, Dory se met en tête de retrouver ses parents et elle convainc ses deux amis de l’aider dans cette nouvelle quête qui les mène tous, à nouveau, à l’autre bout du monde, ou plutôt de l’océan Pacifique. Après Sydney, place à Los Angeles et on est reparti avec les tortues et le courant sous-marin, puis de multiples péripéties dans un centre de loisir aquatique. À peu de choses près, on retrouve le fil conducteur du premier film, et c’est bien là que le bat blesse : Le Monde de Dory ne surprend jamais, alors que l’histoire de Nemo était nouvelle et rafraîchissante à l’époque. Ici, on a un petit peu le sentiment de voir un remake, avec une galerie de personnages secondaires, passages obligés de tout film d’animation qui vise toute la famille. On sent globalement ce qui va se passer et Andrew Stanton ne parvient à nous surprendre, il préfère jouer la carte de la sécurité et c’est bien dommage.

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Pour autant, Le Monde de Dory n’est pas un mauvais film et le résultat est loin d’être médiocre. Ce n’est même pas le pire Pixar, probablement parce que ce qui fonctionnait dans l’original n’a pas perdu de sa force ici. Les fonds marins étaient magnifiques en 2003, ils deviennent sublimes en 2016, avec un travail sur l’eau qui maintient indubitablement le studio un net cran au-dessus de tous ses concurrents. Les progrès réalisés sont aussi très spectaculaires sur les animaux, avec des personnages qu’il n’était même pas possible de réaliser il y a treize ans – le poulpe Hank est bluffant et il restera sans doute comme l’une des créatures Pixar les plus impressionnantes –, mais même les personnages que l’on connaissait déjà sont plus complexes et réalistes qu’avant. C’est le cas des deux poissons clowns qui se déplacent désormais de façon beaucoup plus fluide, avec le corps tout entier qui est en mouvement et pas seulement deux morceaux. Tout est très bien réalisé, mais est-ce que l’on va voir un Pixar pour sa beauté plastique ? Cela fait longtemps que l’on est impressionné et ce n’est plus un élément suffisant aujourd’hui, d’autant que le studio a toujours impressionné pour la qualité de ses histoires. Inutile de le nier, Le Monde de Dory déçoit par son manque d’ambition scénaristique et d’imagination, avec un final extrêmement convenu qui n’est pas le meilleur moment du film. Mais il faut aussi reconnaître que le travail des scénaristes reste d’un excellent niveau, avec des trouvailles en permanence qui permettent de passer un très bon moment. Mention spéciale à ce sujet pour le rôle de l’otarie Fluke, délicieusement interprété en version originale par Iris Elba qui multiplie décidément les rôles animaux cette année1 et qui trouve ici encore une interprétation à la hauteur de sa voix.

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Faire une suite en évitant l’effet de redite n’est pas facile, mais Pixar a déjà prouvé que c’était possible, ne serait-ce qu’avec Toy Story 2. Cette fois, c’est moins réussi, probablement parce que le studio est resté sur une histoire très proche, presque strictement parallèle à la précédente. Le Monde de Dory n’est pas raté et le film, très plaisant, n’a pas volé son énorme succès2. Mission remplie pour Andrew Stanton et Angus MacLane, c’est difficile de le contester, mais est-ce suffisant ? Pixar nous a habitué à bien mieux par le passé et on espère que le studio retrouvera le studio de l’excellence, non seulement sur la qualité technique, mais aussi sur l’écriture. Malheureusement, ce n’est probablement pas le suivant sur la liste, Cars 3, qui va remonter la pente…


  1. On l’a vu en buffle dans Zootopie, puis en tigre dans Le livre de la Jungle. Quel sera le prochain animal ? 
  2. C’est déjà le plus gros démarrage de l’histoire pour un film d’animation et il a déjà dépassé le précédent Pixar en termes de revenus en salle.